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Intervention de François Brottes

Réunion du 4 mai 2010 à 21h30
Engagement national pour l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes :

J'en conviens, et nous sommes deux à être confrontés à cette difficulté, cher collègue.

En fait, c'était au temps de la rupture, où la droite – ils ne sont pas nombreux ce soir, mais quelques-uns quand même aux bancs du Gouvernement – voulait faire main basse sur l'écologie.

« Sur les pavés de la place Sainte-Catherine

Dansaient les hommes les femmes en crinoline

Sur les pavés dansaient les omnibus »

D'ailleurs, nous avons été nombreux à prendre le même omnibus : on a presque tous voté le Grenelle 1, dont les avancées ont été aussi dues aux parlementaires de l'opposition, en particulier du groupe socialiste, au sein duquel j'ai assumé toute ma part comme l'ensemble de mes collègues qui sont ici, et quelques autres, grâce d'ailleurs à l'écoute du Gouvernement à l'époque.

Rappelons ces avancées : reconnaissance de l'urgence écologique ; insertion du troisième pilier du développement durable, le progrès social, dans les objectifs des politiques publiques – très important – ; réaffirmation de l'impératif de sobriété énergétique avec la pose de compteurs intelligents pour les particuliers et l'effacement de la pointe de consommation d'énergie si néfaste dans la lutte contre l'effet de serre ; consécration de l'objectif de lutte contre la précarité énergétique – on attend maintenant les détails – ; compensation obligatoire des atteintes à la biodiversité au-delà des espaces protégés ; institution de la taxe poids lourds pour financer les transports alternatifs – je parle du Grenelle 1 – ; reconnaissance de l'apport incomparable de l'outre-mer à la richesse naturelle de notre pays – cher Serge Letchimy – ; affirmation du principe de séparation du financement et de l'exécution des mesures des ondes électromagnétiques, seul moyen de crédibiliser et de faire accepter ces mesures par la population, et améliorer autant que faire se peut la transparence des relations entre les différentes parties prenantes sur le terrain des ondes téléphoniques. Autre avancée : le soutien de la France à la création d'un observatoire de l'Arctique.

« Et sur l'impériale,

Le coeur dans les étoiles,

Y avait mon grand-père – non, rien à voir avec l'ambassadeur chargé de la protection de l'Arctique ! –

Y avait ma grand-mère,

Il avait su y faire,

Elle l'avait laissé faire,

Ils l'avaient donc fait tous les deux,

Et on voudrait qu'je sois sérieux », ce qui est quand même difficile.

C'était au temps où Grenelle rêvait,

Au temps du cinéma muet,

C'était au temps où Grenelle chantait,

C'était au temps où Grenelle j'y croyais !

Il faut dire que l'échéance importante de Copenhague à la fin de l'année 2009 rendait hautement souhaitable l'accord de tous sur les grands principes.

Il est vrai que Copenhague a déçu, mais il est vrai aussi que Copenhague a eu le mérite d'exister. Gardons-nous de dénoncer les égoïsmes des autres, alors que dans notre parole collective, ici, dans ce pays, nous ne sommes plus capables de tenir nos engagements fondamentaux issus d'un diagnostic pourtant partagé.

« Et sur l'impériale

Le coeur dans les étoiles

Y avait mon grand-père

Y avait ma grand-mère

Il attendait la guerre

Elle attendait mon père

Ils étaient gais comme le canal

Et on voudrait qu'j'aie le moral. » (M. Philippe Martin interrompt l'orateur. – Rires.).

Il y a toujours quelqu'un de plus talentueux que soi dans cet hémicycle, je n'en attendais pas moins de la part de Philippe Martin.

C'était donc au temps où Grenelle rêvait moins. En effet, et nous y sommes, on assiste à un changement de cap. Ce n'est pas la faute à la crise, ni à mon grand-père, ni à ma grand-mère, ni aux hommes et femmes en crinoline ; c'est la faute d'autre choix politiques de cette majorité qui, de l'esprit de gouvernance du Grenelle, n'a tiré qu'un enseignement : réduire les droits du Parlement. Là, ça se gâte un peu.

Souvenez-vous de la réforme constitutionnelle de l'été 2008, que nous, socialistes, avons combattue fermement ; cette réforme censée revaloriser le rôle du Parlement dont nous mesurons les pleins effets aujourd'hui, avec le mépris croissant pour le travail parlementaire – mais vous n'y êtes pour rien, madame la présidente, et vous en savez d'ailleurs quelque chose – : vote bloqué, temps guillotine, amendements votés à de très larges majorités puis nettoyés par le Gouvernement en fin de discussion, sans égard pour le débat en amont ! Je fais, ici, allusion au texte sur la consommation récemment débattu dans cette enceinte.

Le texte Grenelle 2 – c'est tout de même un comble – va à lui tout seul apporter la démonstration de l'absurdité de cette réforme qui applique le même temps de débat à un texte quel que soit son nombre d'articles et qui nous amènera, en la circonstance, à disposer de moins d'une minute par amendement ou article pour tous les groupes et pour l'ensemble des débats.

Je tiens à préciser, à la demande de Frédérique Massat et de l'ensemble de nos collègues, que nous ne serons, en conséquence, que deux députés socialistes à intervenir dans la discussion générale : Philippe Tourtelier et moi-même, Jean-Paul Chanteguet ayant fait un rappel au règlement en début de débat. C'est pour que l'ensemble de nos collègues qui feront vivre le débat jusqu'au bout, article par article, amendement par amendement, disposent du maximum de temps que nous avons choisi cette stratégie.

M. le ministre ou les présidents de commission nous répondrons, certes, que nous avons eu le débat en commission, sauf que cette même réforme constitutionnelle, à laquelle je viens de faire allusion, nous fait débattre dans l'hémicycle du nouveau texte issu de la commission et non du texte débattu en commission. Il s'agit donc bien d'une discussion totalement tronquée, bâclée, avec un seul objectif, semble-t-il – et j'assume mon procès d'intention – : le sacrifice du Grenelle. C'est un peu comme si c'était pour la majorité UMP un mauvais moment à passer qu'il fallait écourter.

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