Avant d'examiner plus en détail le contenu inacceptable de l'article 30, cavalier législatif imposé au forceps par le Gouvernement contre l'avis de toutes les organisations syndicales représentatives des professions paramédicales de la fonction publique hospitalière, permettez-moi de relayer ici la parole des infirmières, des infirmiers anesthésistes, des aides-soignants, fortement et largement mobilisés pour stopper le hold-up de la majorité présidentielle sur leur retraite.
Que nous ont dit ces professionnels lorsque, la semaine dernière encore, nous les avons reçus ? Que le climat à l'hôpital était sévèrement tendu, que nombre d'entre eux étaient au bord de la rupture, malgré la passion pour leur métier. Que la charge de travail et les conditions largement dégradées de celui-ci, pour cause de pénurie de personnel, mettaient aussi en danger la qualité des soins. Que les postes de douze heures se généralisaient, comme les glissements de tâches.
Qu'ils n'étaient ni « nantis », ni privilégiés, loin de là. En témoigne le nombre d'agents en invalidité, les salaires plafonnant, pour les infirmiers, à 1 487 euros brut en début de carrière, avec des primes de nuit de 1,06 euro brut de l'heure, sans parler de la prime de dimanche et jours fériés de 45 euros brut.
Ces femmes et ces hommes nous ont dit aussi leur attente forte d'une reconnaissance à leur juste valeur de leurs qualifications, de leurs engagements. Ils nous ont dit leur colère face au mépris du Gouvernement vis-à-vis de la profession infirmière, qui demeure oubliée des politiques de santé du Gouvernement malgré l'engagement ferme qu'avait pris le candidat Sarkozy de revaloriser les professions paramédicales en termes de rémunération et de carrière.
Tous nous ont dit, à leur manière, combien ils étaient écoeurés, après un an de négociations « fermées » du protocole portant sur la revalorisation des carrières des personnels infirmiers et paramédicaux, par l'intégration de ceux-ci dans le système licence-mastère-doctorat, dans la mesure où, d'une part, les revalorisations statutaires et salariales sont en deçà des promesses et annonces, et où, d'autre part, les contreparties exigées du Gouvernement, notamment l'abandon de la catégorie active – le troc salaire contre recul de l'âge légal de départ en retraite de 55 ans à 60 ans – sont tout simplement insupportables, totalement scandaleuses. Cela ruine toute possibilité d'avancée sur la question forte de la pénibilité.
La coordination nationale infirmière résume assez bien la situation en dénonçant « l'enfumage politiquement incorrect » dont sont victimes ces professionnels. Le Gouvernement a beau s'enorgueillir de promesses prétendument tenues – reconnaissance à bac+3 du diplôme infirmier, revalorisation salariale immédiate et « substantielle » –, nous ferons la preuve que tout ceci n'est que tromperie.
Les infirmières hospitalières se voient proposer, non pas une catégorie A classique, mais une catégorie « petit a », une sous-grille en quelque sorte, avec suppression de la catégorie active. Les infirmiers anesthésistes, déjà en catégorie A tout en bénéficiant du droit de partir en retraite de façon anticipée – comme quoi l'un n'est pas exclusif de l'autre, tout étant affaire de volonté politique – sont les « grands perdants » de cette réforme. Leurs trois années d'études, plus les deux ans de spécialisation, ne sont reconnues qu'au niveau licence et non mastère. Quant à la revalorisation indiciaire, elle sera deux fois moins importante que celle des infirmiers diplômés d'État.