Bien évidemment, ceci remet en cause l'économie globale du projet de loi, ainsi que l'approche que nous en avions.
Par lettre rectificative du Premier ministre, adoptée en conseil des ministres le 23 février dernier, un article 30 a été ajouté à ce projet de loi relatif à la rénovation du dialogue social dans la fonction publique. Cet article est hors sujet. Que viennent faire des dispositions statutaires concernant les professions paramédicales dans un texte qui organise le dialogue social dans la fonction publique ? Cet article est également « hors sol », si je puis dire : pourquoi ne pas attendre les négociations sur la pénibilité et sur les retraites, menées pour l'ensemble des salariés, qui devront de toute façon déboucher sur des textes de loi ? Pourquoi exclure certaines professions du dispositif – les infirmières scolaires, par exemple – et traiter séparément, avec tant de précipitation, le cas d'autres corps de la fonction publique hospitalière ? Pourquoi ne pas mener une réflexion plus globale à partir des conclusions à venir du rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la formation des auxiliaires médicaux ?
La réponse est simple : vous voulez imposer les mesures injustes sur lesquelles vous savez que vous n'obtiendrez pas d'accord par le dialogue social. Et pour cause : l'article 30, intitulé « Dispositions diverses relatives à la fonction publique », est présenté comme la traduction législative du protocole d'accord « Négociations statutaires dans la fonction publique hospitalière » du 2 février dernier, sous-entendant que ce protocole aurait été validé par les syndicats. Or toutes les organisations représentatives – je dis bien toutes – se sont prononcées contre son volet salarial. Ce protocole n'a été signé dans son intégralité que par le Syndicat national des cadres hospitaliers, un syndicat ultra-minoritaire que vous avez pris soin « d'inviter » aux négociations et qui, en tant qu'invité, a pris part au vote – un vote qui, comme par hasard, est le seul dont vous tenez compte !
Cet article 30 est une véritable provocation, car non seulement il constitue un déni de la réalité des négociations, mais il entre en parfaite contradiction avec le texte dans lequel il a été inséré. Je rappelle que celui-ci consacre le principe majoritaire, principe selon lequel, pour être valable, un accord doit être signé par 50 % au moins des organisations syndicales représentatives.
Le groupe GDR a reçu, il y a peu, des représentants des professionnels concernés. Le mouvement qu'ils ont entamé est profond, large et soutenu par les usagers. Cependant, vous refusez toujours de les entendre. Tous ont insisté sur le mépris avec lequel ils sont traités au sujet de ce dossier.
Obligation d'adhérer à un ordre professionnel qu'ils rejettent, non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, dégradation des conditions de travail et, à présent, remise en cause des droits acquis en matière de retraite : l'exaspération est à son comble chez les professionnels, et je les comprends.
Dans un tel contexte, il n'est pas étonnant d'assister à une crise des vocations dans les corps de métiers concernés. Infirmières et infirmiers spécialisés, aides-soignants, rééducateurs, diététiciens, masseurs kinésithérapeutes, ergothérapeutes, orthophonistes, psychomotriciens : toute la filière soignante et de rééducation – c'est-à-dire le personnel non médical des hôpitaux – relève actuellement de différents corps appartenant à la catégorie B de la fonction publique. Il est clair que le niveau actuel de leur rémunération est très insuffisant compte tenu à la fois de leurs diplômes – bac + 3, voire + 5 et + 6 pour les plus spécialisés –, de leurs qualifications, du caractère hautement technique de certaines de leurs missions et des responsabilités qu'ils assument et qui pèsent sur eux.
Ainsi, une infirmière diplômée d'État gagne 1 584 euros nets par mois en début de carrière et 2 499 euros en fin de carrière, soit un salaire supérieur au SMIC de 11 % contre 24 % en 1986... C'est dire à quel point la revalorisation de ces métiers est nécessaire et juste !
Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était candidat à la présidence de la République, s'était adressé en ces termes aux infirmières, dans un courrier daté du 2 mai 2007 : « Je mesure la pénibilité croissante de vos conditions de travail, en ville comme à l'hôpital, de même que la contribution irremplaçable des infirmières et infirmiers au bon fonctionnement de notre système de santé et à la permanence des soins. »
Vous-même, madame la ministre, avez déclaré il y a peu : « Les compétences que les personnels ont en propre et les responsabilités qui leur incombent tout au long de leur carrière méritent d'être pleinement reconnues, tout comme leur place au coeur de notre édifice de soins »,…