Je vous remercie, monsieur le ministre, pour cette présentation à la fois concise et exhaustive. Comme le président l'a précisé, c'est sous l'angle de l'aménagement du territoire que notre commission examinera les textes sur la réforme territoriale. Les trois points principaux du présent texte que sont les métropoles, le couple départementsrégion et le couple communautécommunes donnent à l'organisation de notre territoire une nouvelle inflexion, dont il nous paraît important de mesurer l'impact.
Ma première série de questions porte sur les métropoles.
L'abaissement du seuil démographique, qui offre l'opportunité à de nombreuses grandes villes de se transformer en métropoles, ne fait-il pas courir un risque aux régions ? Je prends un exemple. Imaginons qu'il y ait trois métropoles en région PACA : Nice, Toulon et Marseille. La région PACA devra consacrer l'essentiel de son activité à l'arrière-pays, peu dense, alors que l'essentiel des ressources seront transférées aux métropoles de la zone littorale.
Par ailleurs, un rapide survol des agglomérations de plus de 450 000 habitants montre qu'il y aura une gigantesque bulle à l'intérieur de notre pays, allant de Dijon à Bordeaux et d'Orléans à Toulouse, dépourvue de métropole. Je sais bien qu'on peut vivre en dehors d'une métropole. Je suis l'élu d'un secteur rural où il n'y a pas une commune qui dépasse 5 000 habitants et mes concitoyens de la Somme vivent bien. Il y a quand même un effet de concentration et d'attractivité des richesses sur les métropoles qui peut poser des problèmes en termes d'aménagement du territoire.
Ma deuxième question a trait aux fusions de communes. J'ai été pendant vingt et un ans maire d'une petite commune qui était fusionnée, selon la loi Marcellin, à une autre commune de même taille. Cela n'a pas été facile, ce qui me laisse penser qu'à une taille supérieure, cela doit l'être encore moins. Le processus de fusion de communes, tel qu'il a été adopté par le Sénat, me semble tellement exigeant que je me demande s'il est voué à fonctionner un jour.
Ma troisième question concerne les pays. Il est exact qu'un trop grand nombre de niveaux nuit à la lisibilité de l'action. C'est compliqué et parfois coûteux car cela impose des moyens financiers. Cela étant, il n'est pas absurde que des communautés de communes travaillent ensemble à des actions de long terme sur leur territoire. Si la création de nouveaux pays n'est pas prévue, quel mécanisme les remplacera ? Ne va-t-on pas obliger les élus à réfléchir à un nouveau processus permettant aux communautés de communes de coopérer avec le voisin quand elles auront à le faire ? Ne va-t-on pas se priver des conseils de développement, qui sont pourtant des moyens intéressants de réunir les forces vives, notamment en zone rurale ? Le concept de conseil de développement est assez « grenellien ». Rassembler des gens pour réfléchir à l'avenir de la société civile présente un intérêt certain.
Ma dernière question porte sur les spécificités territoriales. Notre pays n'est pas un bloc homogène. Le souci républicain centralisateur, qui a fait de ce pays ce qu'il est, est encore très présent dans nos esprits. Il n'a pas gommé les spécificités locales. La montagne en est l'exemple type ; la vie dans ces zones est tellement particulière qu'il est spécifié, dans la loi montagne, que toute loi concernant les collectivités territoriales devait tenir compte de la spécificité des problématiques rencontrées. La singularité des zones du littoral n'est pas moindre puisqu'elles doivent concilier urbanisation et fragilité des milieux. On pourrait multiplier les exemples. La concentration urbaine est également une donnée qui mérite d'être traitée à part. C'est d'ailleurs l'objet de la création de métropoles. Les spécificités territoriales sont-elles suffisamment prises en compte dans le projet de loi tel qu'il nous revient du Sénat ? Ne pourraient-elles pas l'être davantage ?