Avant tout, il faut bien comprendre qu'il n'existe pas de retraite qui ne soit pas par capitalisation. Toutes les retraites sont par capitalisation, pour une raison économique très simple : on ne peut préparer l'avenir qu'en investissant. Simplement, il y a deux catégories de facteurs de production : le capital classique et le capital humain. Dans leur rapport, MM. Stiglitz, Sen et Fitoussi ont fait une répartition entre les deux, qui est de trois quarts pour le capital humain, et d'un quart pour le capital physique. D'autres diraient plutôt deux tiers et un tiers. Ne chipotons pas sur les chiffres, d'autant que l'évaluation monétaire du capital humain pose quelques problèmes. De toute façon, nous avons un capital humain, un facteur de production, qui représente nettement plus que l'autre. D'ailleurs, la répartition de la valeur ajoutée entre ces deux facteurs de production montre qu'il y a grosso modo un tiers pour le capital, deux tiers pour le travail, c'est-à-dire pour le capital humain. Il s'agit de capitalisation et la question est de savoir s'il s'agit de capitalisation humaine ou de capitalisation classique – financière et physique.
A-t-on la possibilité de passer complètement en capitalisation physique ? Non, de manière évidente. À la fin des années 1970, l'Américain Kefitz et les Français Bourgeois-Pichat et Chaperon ont démontré qu'il n'y avait pas sur notre planète suffisamment de capital au sens traditionnel du terme pour faire fonctionner un système de capitalisation classique à l'échelle mondiale ou d'un grand ensemble comme l'Europe ou les États-Unis ; en revanche, des petits pays comme le Chili ou la Suisse peuvent, eux, s'appuyer beaucoup sur la capitalisation. Dans un pays comme la France, il faut obligatoirement s'appuyer pour au moins la moitié, mais plus vraisemblablement pour les deux tiers ou les trois quarts, sur le capital humain.
En France, la répartition est à peu près d'un quarttrois quarts : selon les statistiques de l'INSEE les revenus des retraités sont fournis à 25 % par leurs revenus des capitaux, compte tenu, bien sûr, de leur revenu en nature que représente la possession de leur logement, ce qui est le cas de 70 à 75 % des retraités.