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Intervention de Annick Girardin

Réunion du 24 mars 2010 à 21h30
Réforme du crédit à la consommation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnick Girardin :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en France, aujourd'hui, 120 000 plans de surendettement sont mis en place par an, pour un montant moyen de 41 700 euros par dossier, soit deux fois plus qu'aux Pays-Bas et presque trois fois plus qu'en Belgique. Si l'on voit donc toute l'urgence à lutter contre le surendettement, premier objectif affiché de ce projet de loi qui constitue, en grande partie, la transposition en droit français de la directive 2008 48CE, on voit mal toutefois l'urgence qu'il y aurait à « réformer le crédit à la consommation afin de le rendre plus accessible », deuxième objectif concurrent qui inspire ce texte.

Je ne suis pas certaine, mes chers collègues, que ces deux objectifs soient compatibles. Est-il cohérent d'abaisser le taux de l'usure de cinq points sur les crédits revolving, et de l'augmenter de six points sur les prêts personnels ? Pour nous, radicaux de gauche, humanistes, entre la prévention des nombreuses situations dramatiques de surendettement que nous connaissons aujourd'hui et la promotion d'une économie à crédit dont nous avons tous constaté les dégâts, le choix est tout fait !

Malgré cette ambivalence, ce vice dans la conception du texte, le projet de loi regroupe toutefois un certain nombre de dispositions intéressantes, qu'il faut saluer.

Il prévoit d'abord, des outils de lutte contre le surendettement, avec notamment cette baisse d'environ cinq points du taux de l'usure sur les crédits revolving, même si cela reste insuffisant.

Par ailleurs l'encadrement de la publicité pour ce type de crédit particulièrement dangereux progresse, même s'il peut encore être renforcé ; tel est le sens de l'un des amendements proposés par les députés radicaux de gauche et apparentés, qui impose la mention explicite dans la publicité des dispositifs législatifs de lutte contre le surendettement dont la personne concernée est susceptible de bénéficier.

Les nouvelles procédures de vérification de la solvabilité des emprunteurs, dont la consultation obligatoire du fichier des incidents de paiement des particuliers, tout comme le renforcement des procédures de traitement du surendettement, contribueront à lutter contre les drames humains que celui-ci engendre et qui se multiplient ces dernières années, particulièrement dans la période de crise que nous connaissons. À ce propos, je souhaite, madame la ministre, que nous tombions tous d'accord pour instaurer le fichier positif.

Malheureusement, les effets potentiellement bénéfiques de ces nouvelles mesures risquent, je l'ai dit, d'être contrecarrés par les dispositions visant à rendre le crédit plus accessible, dont l'augmentation du taux de l'usure sur les prêts personnels et la facilitation des regroupements de crédits.

Cependant, si le texte comporte des dispositions intéressantes visant à développer le micro-crédit, je ne peux que déplorer la manière dont leur application outre-mer, notamment dans les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution, a été négligée. Pour cette raison, et à l'initiative de notre collègue de Wallis et Futuna Albert Likuvalu, les députés radicaux de gauche et apparentés défendront un amendement tendant à rendre ces dispositions applicables dans les collectivités françaises du Pacifique.

Quant à Saint-Pierre-et-Miquelon, les nouvelles dispositions y seront applicables de droit mais inapplicables en fait, puisque les opérateurs du micro-crédit, dont l'association pour le droit à l'initiative économique, l'ADIE, ne sont pas présents sur le territoire. Au-delà des considérations législatives, l'État doit intervenir d'urgence et assurer un accompagnement afin que Saint-Pierre-et-Miquelon ne soit plus le seul territoire de France où les acteurs économiques n'ont pas accès au micro-crédit. Certes, en volume, les enjeux sont peu importants en raison de notre petite taille ; mais nous sommes en pleine reconversion économique et, proportionnellement, la demande locale est forte. Un partenariat doit donc être conclu avec les organismes locaux afin de trouver une solution adaptée au territoire qui permette d'instaurer chez nous le micro-crédit. Je vous propose, madame la ministre, que nous commencions de travailler ensemble en ce sens.

D'autres l'ont dit avant moi : les députés socialistes et radicaux de gauche ont longuement travaillé sur les questions relatives au crédit et ont formulé de nombreuses propositions visant à lutter efficacement contre le surendettement et à protéger les personnes. Je songe bien sûr à notre récente proposition de loi relative à la suppression du crédit revolving, à l'encadrement des crédits à la consommation et à la protection des consommateurs par l'action de groupe, examinée dans cet hémicycle le 15 octobre dernier.

Nos propositions, rejetées par la majorité, sont en partie reprises dans ce texte ; tant mieux. Les amendements défendus par notre groupe permettront de compléter cette démarche. Ainsi, leur adoption permettrait d'éviter que ce texte ne reste, pour reprendre une expression employée ce soir par plusieurs de mes collègues, au milieu du gué. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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