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Intervention de Marc Goua

Réunion du 24 mars 2010 à 21h30
Réforme du crédit à la consommation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Goua :

Or, s'ils sont extrêmement dangereux, ceux-ci représentent moins de 24 % des encours de crédits. Ce qui attend nos concitoyens, c'est donc une augmentation importante des intérêts payés pour 75 à 78 % des crédits à la consommation contractés.

J'en viens à l'un des éléments essentiels de votre projet de loi : les conditions de formation du contrat, regroupées au sein de l'article 4 du présent texte.

Cet article impose une obligation d'information au vendeur de crédits, notamment sur le lieu de vente. Or j'estime que la vente concomitante d'un bien et d'un crédit est perverse. Il convenait donc de séparer strictement la vente du financement ; vous n'êtes malheureusement pas allés jusque-là.

Une légère avancée est constituée par l'obligation de proposer de façon concomitante un crédit amortissable et un crédit revolving. Cependant cette avancée ne va-t-elle pas se traduire par une hausse des taux d'intérêts des crédits amortissables – comme le laissent entendre les calculs que je viens de vous exposer – afin de rendre l'offre concurrentielle moins attractive ? C'est un travers à éviter, que votre projet de loi ne semble pas anticiper.

Quant à l'article L.311-9, il pose le problème primordial de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur. Certes, il constitue une avancée juridique, mais il correspond pratiquement à ce qui se fait aujourd'hui, car la consultation du FICP est quasiment automatique. Du reste, certains établissements bancaires et financiers qui avaient omis de prendre cette précaution ont été condamnés par les tribunaux pour défaut de conseil. Toutefois, l'inscription au FICP, qui fait suite à des incidents de paiements constatés, n'a qu'un caractère préventif limité. Seul le fichier positif constituerait un garde-fou efficace, comme en atteste l'exemple belge. Sa mise en place, avec un accès subordonné à l'accord de l'emprunteur, permettrait d'éviter la multiplicité des crédits, souvent liés à des achats d'impulsion réalisés à l'aide des multiples cartes privatives qui existent dans notre pays et dont M. Brottes nous a dressé la liste.

Par ailleurs, des avancées non négligeables sont proposées dans l'article 5, qui concerne notamment la formation du contrat de crédit. En effet, il porte le délai de rétractation à 14 jours et interdit de subordonner des avantages commerciaux à l'utilisation du crédit de la carte de fidélité.

S'agissant du crédit renouvelable, dont nous demandons toujours la suppression et l'interdiction, l'article 5 pose le principe fondamental d'un amortissement minimum du capital emprunté, dit « remboursement minimal du capital emprunté », à chaque échéance. L'augmentation de la réserve obtenue doit faire l'objet d'un nouveau contrat. Toutefois, l'efficacité de cette disposition est illusoire, car le prolongement des délais de remboursement se fait par « tacite reconduction ». Pour que cette mesure sur l'amortissement obligatoire soit opérante, il eût fallu préciser que la part de capital amorti comprise dans chaque échéance est proportionnelle à l'autorisation initiale de crédit. Cette précision est en effet décisive pour que la mesure ait du sens et un effet, car elle détermine l'échéance finale du crédit, qui ne serait pas ainsi reporté aux calendes grecques.

Le chapitre VI du présent projet comporte des dispositions relatives aux intermédiaires de crédit. Le rôle de ces derniers se limite souvent à réussir à obtenir des prêts au profit d'emprunteurs déjà en difficulté. La mise en concurrence est le plus souvent illusoire et l'habileté de l'intermédiaire a souvent pour conséquence un renchérissement du coût global. La plupart du temps, les intermédiaires regroupent les crédits en cours en allongeant leur durée pour les rendre plus « supportables ». Cependant, ces regroupements destinés aux emprunteurs qui se sont laissés déborder sont consentis à des taux très élevés et le coût global de l'opération est le plus souvent très pénalisant, avec des taux proches de l'usure et des durées sans rapport avec la valeur des biens et leur revolving.

Il apparaît donc, madame la ministre, que vous ne vous êtes pas donné les moyens de vos objectifs : d'une part, vous n'allez pas au bout de votre logique en refusant la création immédiate du fichier positif et en n'interdisant pas le crédit revolving ; d'autre part, vous proposez une réforme du mode de calcul du taux de l'usure qui aura des conséquences déplorables et dont la logique paraît incompréhensible.

Le groupe socialiste a de nombreuses propositions constructives à vous soumettre. Nous espérons que vous en tiendrez compte, car, sans de profonds remaniements, ce texte ne responsabilisera ni les emprunteurs, ni les organismes prêteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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