Madame la ministre, scandalisée, qualifiant de mensongères et harcelantes les publicités du crédit à la consommation, jugeant que le crédit est un tunnel au bout duquel on ne sort jamais, vous n'avez pas de mots assez forts pour dénoncer le crédit à la consommation et ses pratiques commerciales.
Et pourtant, à la force de vos propos, nous sommes contraints d'opposer la trop grande faiblesse de votre texte sur de nombreux points.
La transposition de la directive européenne du 23 avril 2008 a introduit des avancées, notamment en termes de protection du consommateur.
Cependant, comme nos collègues l'ont précédemment fait au Sénat, nous considérons qu'il appartient au législateur national d'aller plus loin pour encadrer le crédit à la consommation et protéger nos concitoyens des pratiques abusives de ces organismes de crédit.
En effet, chacun s'accorde à reconnaître la dangereuse spirale du surendettement dont nul n'est à l'abri. Si l'unanimité est de mise pour décrire ce mal, on ne peut néanmoins que déplorer l'absence d'outils de prévention du surendettement et du mal-endettement.
Votre rapport revient très justement sur les causes qui conduisent à ces situations : la survalorisation de la consommation immédiate et impulsive – n'oublions pas, au passage, que c'est votre majorité, avec des textes comme celui relatif au travail du dimanche, qui vante cet idéal de vie ! –, l'agressivité des organismes de prêts, les accidents de la vie, et surtout, la perte de pouvoir d'achat.
Les causes sont donc multiples. Et ainsi, à partir d'un incident lié à un manque de liquidité ponctuel, rapide est l'escalade vers le surendettement. Il est donc impératif de travailler à la mise en place de moyens et d'outils permettant de venir concrètement en aide à ces personnes et de les protéger avant que leur situation ne dérape véritablement.
Autre grande absente de ce texte, l'action de groupe. En commission, lorsque je vous ai interrogée à ce sujet, vous m'avez répondu que ce n'était pas l'objet de ce projet de loi. Pas le moment, pas le sujet, c'est la sempiternelle réponse que votre gouvernement nous fait depuis des années.
Sans remonter au déluge, je voudrais tout de même rappeler qu'en 2008, alors que nous examinions la loi de modernisation de l'économie, le ministre de l'époque, Luc Chatel, avait annoncé qu'un texte serait présenté avant la fin de l'année. Nous sommes en 2010, et toujours pas l'ombre d'un projet de loi.
En attendant, la complexité et le coût des procédures dissuadent nos concitoyens d'attaquer ces organismes de prêts, dont nous reconnaissons tous que les méthodes sont répréhensibles. La mise en place de l'action de groupe participerait donc à l'encadrement de ces pratiques.
Pratiques abusives que l'on retrouve également du côté des établissements bancaires, épinglés en septembre dernier par un rapport de la Commission européenne sur le niveau élevé des frais qu'ils pratiquent et pour leur opacité.
Ainsi, vous avez annoncé, madame la ministre, vouloir traquer ces abus, notamment à travers une nouvelle mesure introduite dans ce projet de loi visant à supprimer les pénalités libératoires. Si cela s'inscrit dans le bon sens, il ne faudrait pas que cette décision occulte le reste, à savoir tout le volet traitant du crédit revolving.
Ainsi, je voudrais insister, à l'instar de mes collègues, sur l'absence de cohérence entre vos discours et vos actes. N'est-il pas aberrant de dénoncer avec autant de véhémence le crédit rechargeable sans pour autant en annoncer la suppression ? À cela, vous nous répondez que votre proposition de loi prévoit de l'encadrer, mais nous considérons que vous n'allez pas assez loin. Il faut, par exemple, prévoir une vérification régulière de la solvabilité de l'emprunteur, et interdire la possibilité d'effectuer des retraits ou des paiements sous forme de crédit rechargeable.
En effet, ces derniers mois, on a vu apparaître des cartes bancaires offrant au consommateur la possibilité de choisir, au moment du paiement, entre un paiement comptant ou un paiement à crédit, véritable piège pour le consommateur et véritable effet d'aubaine pour les banques.
Par ailleurs, il faut élargir l'offre de crédit. De récentes enquêtes sur la distribution de crédit ont permis de mettre en exergue certaines pratiques des organismes bancaires ou de crédit. En dessous d'un seuil plancher avoisinant les 3 000 euros – ce qui est relativement élevé –, ces organismes ne proposent que du crédit rechargeable au détriment du prêt personnel.
En conclusion, madame la ministre, ce texte propose des avancées, mais aucune réforme structurante. Nous avons l'opportunité de mettre un terme à des pratiques abusives dont les conséquences sont souvent dramatiques pour certains de nos concitoyens.
J'espère que les débats et l'examen des amendements nous permettront d'aller plus loin dans la protection du consommateur qui, aujourd'hui plus qu'hier, s'affiche en impérieuse nécessité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)