Comme l'écrivait Victor Hugo, lorsque l'enfant paraît, la famille réunie applaudit à grands cris ! Bien évidemment, le père et la mère doivent consacrer du temps, des soins et de l'amour au nouveau-né. Nous sommes tous de cet avis, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons.
Madame la rapporteure, cette proposition de loi présente quelques mérites, que vous avez mis en avant. Elle réforme les principaux congés liés à la naissance – congé maternité, congé parental d'éducation –, améliore l'égalité entre les hommes et les femmes, garantit le maintien du salaire de l'ensemble des salariées en congé de maternité. La durée du congé parental d'éducation est considérée comme un temps de travail effectif. Sur le principe, nous ne pouvons qu'être d'accord avec ces dispositions. Reste que la proposition aura un coût, qui doit être de l'ordre de plusieurs milliards. Pouvez-vous nous indiquer, madame la rapporteure, le chiffrage que vous en avez fait ? Il n'apparaît pas dans votre rapport, et je rejoins les observations faites par le président Méhaignerie.
Vous avez eu raison de souligner que cette proposition de loi s'inscrit dans le cadre des différents textes, d'ailleurs ponctuels, d'ores et déjà adoptés. Je pense notamment à la résolution adoptée hier par un certain nombre d'entre nous, visant à améliorer et à harmoniser les droits des femmes en Europe. Vous avez fait allusion, toujours avec juste raison, à une décision prise au niveau européen par la commission du droit des femmes et de l'égalité des genres, qui a débattu en première lecture d'un congé de maternité qui serait étendu à vingt semaines. Toutefois, la Commission européenne envisage de ne porter qu'à dix-huit semaines la durée de ce congé de maternité.
De son côté, hier, l'eurodéputée Élisabeth Morin-Chartier, vice-présidente de la commission du droit des femmes, tout en reconnaissant que des avancées étaient nécessaires, se demandait s'il ne fallait pas d'abord davantage de crèches et de mesures d'adaptation du temps de travail au rythme familial pour le père comme pour la mère. Elle ajoutait : « Si l'intention est bonne, il est indispensable de bien tenir compte du fait qu'en période de crise économique, cela représentera une charge très lourde pour les entreprises et que cela ne doit pas être un argument supplémentaire pour rendre plus difficile le recrutement des jeunes femmes dans les entreprises. »
Cette proposition est l'occasion de rappeler les points forts de notre politique familiale. La France n'est pas forcément en retard en ce domaine. Elle dispose d'un des meilleurs taux de natalité – 2,02 enfants par femme. Le taux d'activité des femmes en couple, en âge de travailler, y est de 82 %. Enfin, notre pays consacre 3,8 % de son PIB à la politique familiale.
Notre réflexion doit aller au-delà de cette proposition de loi. Il faut pouvoir offrir un véritable choix aux femmes et aux familles. Comment les aider à concilier au mieux vie professionnelle et vie familiale ? Comment leur proposer des solutions de garde adaptées ? Comment les aider à retrouver le chemin de l'emploi après un congé parental ? Je rappelle que le Gouvernement et notre majorité ont fait un effort financier, en créant 200 000 places de garde supplémentaires d'ici à 2012.
Vous avez évoqué le rôle des entreprises. On leur a déjà demandé de s'impliquer davantage dans le développement de l'offre de garde. Je reconnais qu'aujourd'hui 2 % seulement d'entre elles proposent à leurs salariés une place en crèche. Avant d'aller plus loin, madame la rapporteure, peut-être faudrait-il les inciter à mettre en oeuvre une disposition figurant dans les textes que nous avons adoptés. Grâce au financement de berceaux par les entreprises, on pourrait faire évoluer ces modes de garde, parfois dits atypiques parce qu'ils s'adaptent aux réalités de la vie professionnelle (travail qui débute tôt ou qui se termine tard).
L'article 1er propose de porter le congé maternité de seize à vingt semaines. Il modifie le code du travail. Pour autant, vous ne prévoyez pas de modifier le code de la sécurité sociale, et donc le régime des indemnités. En tant que tel, votre texte ne pourrait donc pas s'appliquer parce qu'il est incomplet. Mais vous pourrez peut-être m'apporter des éléments de réponse.
L'article 2 propose d'étendre la période d'interdiction d'emploi des salariées qui vont ou qui viennent d'accoucher. De nombreuses autres dispositions amènent déjà de la souplesse dans la gestion du congé maternité. En outre, la durée actuelle de six semaines après l'accouchement est celle que préconise la directive européenne en cours de discussion. Un délai d'attente, avant de mettre en oeuvre cette proposition de loi, serait peut-être nécessaire.
L'article 3 permet de verser à la salariée, pendant son congé de maternité, une indemnité compensatrice d'un montant équivalent à son salaire. Vous faites pour cela appel aux employeurs. Or, M. Darcos a demandé aux partenaires sociaux, le 22 décembre 2009, d'ouvrir des négociations sur l'articulation entre la vie familiale et la vie professionnelle. Cela relève des accords conventionnels. Connaît-on aujourd'hui le nombre de conventions collectives qui complètent le congé maternité ? Il serait intéressant, avant d'adopter ces dispositions, d'avoir une vision plus globale et plus complète de ce qui existe déjà ou non, au niveau national.
L'article 4 est un bon article dans la mesure où il vise à étendre aux femmes exerçant une activité non salariée les mêmes droits à congé maternité que les femmes salariées : intermittentes du spectacle, conjointes collaboratrices de l'agriculture. Mais là encore, comment financer ?
L'article 9 prévoit de financer les charges nouvelles qui pourraient résulter de l'application de cette proposition de loi en relevant le droit des alcools. Mais comment et pour quel montant ? Dans leur principe, toutes les mesures de cette proposition sont bonnes. D'ailleurs, certaines d'entre elles sont inspirées du rapport déposé en 2008 par notre collègue Michèle Tabarot – je pense notamment à l'institution d'un nouveau congé partagé entre les parents.
Enfin, l'article 6 qui prévoit que pourraient bénéficier d'un congé parental alternatif non seulement la mère de l'enfant, le père, le conjoint, mais aussi la personne vivant maritalement avec la mère de l'enfant ou ayant conclu avec elle un pacte civil de solidarité, etc. m'amène à m'interroger : l'homoparentalité est-elle prise en compte ? Il semblerait que oui. J'aimerais avoir une réponse sur ce point, qui me semble important.