Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de l'honneur que vous me faites en me recevant de nouveau. Ma précédente venue date de janvier 2009.
Je dois reconnaître que, concernant l'évolution au Proche-Orient, 2009 aura été une année difficile, même pour les optimistes comme moi, puisque, d'une part, nous n'avons observé aucun relâchement dans les menaces qui pèsent sur la région et que, d'autre part, nous n'avons pas pu faire avancer les négociations et le processus de paix. Sans être au point mort, les canaux de la négociation n'ont pas connu une activité débordante.
Il convient de commencer par l'Iran, comme le justifient tant la lecture des journaux français et israéliens que les événements eux-mêmes. Le Président de la République française a coutume de dire que la nucléarisation éventuelle de l'Iran est le défi numéro un que la communauté internationale doit aujourd'hui relever. Je pense, à l'instar des dirigeants de mon pays, qu'il a d'autant plus raison qu'Israël est dans la ligne de mire des intentions iraniennes. Il est toutefois nécessaire de rappeler que la question du nucléaire militaire iranien ne concerne pas le seul État d'Israël et qu'elle est appelée à avoir un impact considérable sur la situation géostratégique de toute la région, voire du monde entier.
En 2009, l'Iran s'est révélé dans tout son cynisme et sa capacité de manipulation de la communauté internationale : s'il a fait semblant de vouloir ouvrir des négociations avec les pays du Groupe des six, principalement les États-Unis, en réponse à la main tendue du président Obama, alors nouvellement élu, très vite, chacun s'est rendu compte qu'il ne s'agissait que d'un stratagème supplémentaire visant à gagner du temps, celui-ci étant, aux yeux des Iraniens, une matière première tout aussi importante que l'uranium enrichi, car il leur est nécessaire pour conduire à son terme leur projet de nucléaire militaire. Du reste, durant l'année, l'existence d'autres installations nucléaires, inconnues jusqu'alors, a été révélée, ce qui sème un doute supplémentaire sur la crédibilité des déclarations des dirigeants iraniens depuis le début de cette affaire.
L'année 2009 a également vu un sursaut impressionnant de l'opposition et du peuple iraniens face à un pouvoir qui, notamment depuis les élections, s'est montré chaque jour plus oppressif : non seulement il persécute les minorités, notamment les homosexuels, mais, de plus, les trois-quarts des exécutions de mineurs dans le monde ont lieu sur le sol iranien – plus de 130 cette année.
Un réveil s'est produit ces derniers mois et les espoirs, louables, mis par les États-Unis et le Groupe des six, dans une possible négociation avec l'Iran en vue de résoudre à l'amiable la question nucléaire, se sont évanouis. Désormais tous les pays, en premier lieu les États-Unis, comprennent qu'il convient de recourir aux moyens de pression que la diplomatie offre à la communauté internationale, notamment à des sanctions efficaces et suivies, sévères non pas envers le peuple iranien mais envers le régime lui-même. Les sanctions sont un outil pacifique que la communauté internationale peut utiliser pour faire valoir ses positions dans un dossier en suspens depuis trop longtemps : l'arrêt du programme nucléaire iranien. Le Parlement européen a du reste adopté récemment une résolution à l'égard de l'Iran qui me semble témoigner de ce réveil et traduire un sentiment d'urgence.
Les ondes de choc de la question iranienne conduisent jusqu'au Proche-Orient, du fait que l'Iran continue de soutenir des organisations telles que le Hezbollah et le Hamas, et de fomenter des troubles dans notre région. Chaque fois que la situation semble se stabiliser, des événements liés à l'Iran se produisent dans la région, que ce soit sous forme de déclarations ou de manoeuvres, en vue de la troubler. C'est un comportement irresponsable, compte tenu de l'instabilité de la situation tant au nord qu'au sud d'Israël. Il est de la responsabilité de tous les acteurs, non seulement régionaux, mais également internationaux, de décourager ceux qui cherchent le conflit et d'encourager ceux qui veulent la stabilité.
Il est clair, monsieur le président de la commission, que 2009 a été une mauvaise année pour le processus de paix puisque les appels israéliens à négocier, lancés dans les dernières semaines du précédent gouvernement comme depuis la formation du nouveau gouvernement, n'ont pas été entendus. Dois-je rappeler que le précédent gouvernement était engagé dans des négociations intenses avec les Palestiniens, que ce sont ces derniers qui les ont rompues de manière unilatérale et qu'ils ont refusé jusqu'à présent de les reprendre, alors que le nouveau gouvernement n'a cessé d'appeler les partenaires palestiniens à revenir à la table des négociations ? Certes, le succès n'est pas garanti en cas de négociations, mais l'échec est assuré si on ne négocie pas. Les négociations sont donc la seule chance de voir un jour les efforts de paix couronnés de succès.
Le Premier ministre Nétanyahou ne cesse de rappeler en toutes occasions, que le premier objectif de la diplomatie de son pays est la reprise des négociations avec nos partenaires palestiniens. Il a souvent fait preuve de disponibilité et de courage en la matière. Or les Palestiniens, jusqu'à présent, ont répondu à tous ces appels soit par le refus soit en présentant une longue liste de préalables, ce qui est inédit par rapport au modèle qu'Israéliens et Palestiniens avaient adopté depuis les accords d'Oslo, lesquels ont permis de lancer les négociations entre Israël et, à l'époque, l'OLP – aujourd'hui l'Autorité palestinienne –, à la suite de leur reconnaissance mutuelle. La règle était de négocier sans préalable, tous les sujets pouvant être abordés.
Les Palestiniens ont choisi de rompre avec cette règle en 2009, en posant des exigences préalables à l'ouverture des négociations. Il est aujourd'hui question de « pourparlers de proximité », ce qui est un euphémisme pour des négociations indirectes. C'est sans doute mieux que rien, mais ce n'est malheureusement pas beaucoup mieux que rien et c'est avec une profonde tristesse que nous voyons la méthode des pourparlers revenir ainsi quinze à vingt ans en arrière. Il convient de revenir à un mode plus direct de négociation, même si cela se révèle difficile.
Le Premier ministre israélien a du reste déclaré à maintes reprises son attachement à la notion de deux États pour deux peuples, ce qui signifie clairement son soutien à la création d'un État palestinien qui ne représente pas une menace pour la sécurité d'Israël, c'est-à-dire dans des modalités qui permettent d'assurer l'avenir et la pérennité de l'État d'Israël comme foyer national du peuple juif. Il a plus d'une fois exprimé son soutien à l'autorité palestinienne et à son président, Mahmoud Abbas, non seulement par des paroles mais également par des actes. C'est ainsi qu'en 2009 les efforts, non seulement de la communauté internationale, mais également d'Israël ont permis d'améliorer la situation économique de la Cisjordanie. En pleine période de crise internationale, l'économie de la Cisjordanie a connu une croissance de 7 % à 8 %, voire plus – je cite les chiffres du FMI. La qualité de vie s'est améliorée grâce à une relative prospérité, la majeure partie des obstacles entravant les routes de la Cisjordanie ont été levés par l'armée israélienne et la circulation s'est grandement assouplie. Il convient également de ne pas oublier la création d'outils de gouvernance de l'Autorité palestinienne ainsi que leur amélioration grâce à un effort international soutenu par Israël. Tous les sondages, en Cisjordanie, montrent que la méthode de Mahmoud Abbas et de l'Autorité palestinienne, qui prônent le dialogue avec Israël et la coopération avec les autorités israéliennes, est meilleure que celle que le Hamas a adoptée à Gaza.
Mon gouvernement a du reste toujours estimé que la prospérité des Palestiniens qui souhaitent coexister avec Israël est conforme à l'intérêt du pays. C'est pourquoi, souhaitant la progression de leur économie et l'amélioration de leur qualité de vie, nous continuerons sans aucun doute d'oeuvrer en ce sens en 2010. Il est dès lors d'autant plus paradoxal de voir l'Autorité palestinienne conduire une campagne de dénigrement d'Israël, appelant notamment au boycott international de produits israéliens, y compris en France, ce qui, je vous le rappelle, est contraire à la loi française. Convient-il de tolérer un tel comportement vis-à-vis de pays soutenant l'économie palestinienne, comme Israël et la France ? En Israël, beaucoup se posent la question. Il serait dommage qu'une opération de marketing international visant à délégitimer Israël en vue de compenser la frustration palestinienne devant une situation prétendument sans issue ait pour conséquence de fragiliser le soutien qu'Israël et la communauté internationale apportent à l'économie palestinienne.
L'évolution, ces dernières années, des relations bilatérales entre la France et Israël est une source de satisfaction pour mon gouvernement : elles ont connu un essor extraordinaire et nous avons aujourd'hui retrouvé une intimité et une proximité que nous n'avions pas connues depuis les années 60. Cela profite évidemment aux deux parties, dans le cadre d'un dialogue politique de qualité et sur un éventail de sujets de coopération très variés.
Le seul bémol concerne l'Union européenne : alors que la présidence française avait permis la signature d'un accord de principe sur l'élargissement et l'amélioration des relations entre Israël et l'Union européenne, depuis lors, cet accord n'a pas avancé. C'est pourquoi je souhaiterais que la France reprenne en main, en vue de le débloquer, ce dossier qu'elle a soutenu avec tant de générosité lors de sa présidence.