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Intervention de Alain Claeys

Réunion du 16 février 2010 à 9h30
Organisation du débat public sur les problèmes éthiques et les questions de société — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Claeys :

Monsieur le rapporteur, pourquoi tant de précipitation ?

Une mission d'information vient à peine de se terminer ; elle a retenu un grand nombre de propositions. Pourquoi vouloir adopter celle-ci dès aujourd'hui ?

Certes, sur certains points, madame la secrétaire d'État, il y a bien urgence. En effet, en matière de recherche, des échéances existent : si nous ne voulons pas que la recherche sur les cellules souches embryonnaires cesse en février 2011, le Gouvernement devra déposer un projet de loi.

Mais nous aurions pu, monsieur le rapporteur, déposer des propositions de loi sur bien d'autres sujets. Pourquoi avancer si rapidement alors que nous attendons toujours des textes sur la vie des espaces éthiques régionaux ? C'est pourtant là que se déroule aujourd'hui le débat public.

Monsieur Leonetti, la lecture de l'exposé des motifs de votre proposition de loi m'a un peu inquiété. En effet, il pouvait laisser croire au grand public que les sujets abordés étaient traités entre parlementaires et experts, que nous restions dans notre monde. Une telle interprétation serait un mauvais coup pour la démocratie représentative, que je tiens pour une démocratie moderne.

Cependant, les amendements déposés, dans le cadre de l'article 88 du règlement, par le président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ainsi que par Jean-Sébastien Vialatte, m'ont rassuré. J'y souscris totalement. Laisser croire que de tels débats pouvaient se réduire à des échanges entre les seuls parlementaires et les experts, c'eût été méconnaître le travail mené depuis des années par l'Office parlementaire pour rapprocher nos concitoyens des problématiques de la recherche – je pense, par exemple, à la question du nucléaire, de la bioéthique ou des OGM. Nous ne pouvons pas laisser croire que la démocratie représentative serait à bout de souffle sur ces questions !

Les états généraux de la bioéthique ont été un moment important : nous pouvons en tirer des enseignements et réfléchir à ce modèle – je parle sous le contrôle d'un éminent philosophe assis au banc des commissaires du Gouvernement. Ils ont donné lieu à la création d'un site internet, géré par l'Agence de biomédecine, qui a bien fonctionné, et à trois réunions de panels ; des conclusions ont pu en être tirées.

Je m'interroge d'autre part sur le dispositif de la proposition de loi. Votre rapport indique que vous faites le choix du Comité national d'éthique pour organiser le débat public. Mais prenons un exemple. Je viens d'apprendre que le président du Comité national d'éthique s'est autosaisi sur le sujet de l'éthique et des neurosciences –sujet majeur pour les années qui viennent. Comment ce comité pourra-t-il, sur un même sujet, donner à la fois un avis indépendant et animer le débat public, s'il est saisi dans le cadre de l'examen d'un texte législatif ? La réponse n'a rien d'évident.

Enfin je ne suis pas convaincu qu'il soit opportun d'organiser un débat public – dont je reconnais la pleine utilité – à la veille d'un débat législatif. En Grande-Bretagne, le débat public relève de la HFEA, un équivalent de notre Agence de la biomédecine, mais il se déroule tout au long de l'année sans être lié à un calendrier parlementaire. Comme nous, les Anglais cherchent à construire le rapport du citoyen à la science et au progrès. Mais ils ont compris que cette démarche ne pouvait pas seulement s'insérer dans le cadre d'un calendrier parlementaire.

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