Mes chers collègues, je me réjouis que la coopération entre l'OPECST et les commissions se trouve renforcée. Nous sommes au service de l'ensemble du Parlement et il est bon que nous puissions venir rendre compte des travaux que vous nous confiez.
Comme cela vient d'être rappelé, la saisine de l'OPECST, prévue par la loi « Grenelle 1 », a été anticipée afin que nos conclusions, attendues pour le 19 novembre, pussent guider le travail de rédaction des décrets d'application de cette loi. La mise en oeuvre du Grenelle est en effet une affaire urgente. En rendant nos conclusions devant l'OPECST, nous avons tenu le délai que nous nous étions fixé, au prix d'une course de quatre mois, au cours desquels les auditions et les visites ont été nombreuses, compte tenu notamment du fait que, durant l'été, il aurait été difficile de trouver des interlocuteurs.
Je rappellerai rapidement l'objet de l'étude. L'article 4 de la loi de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement du 3 août 2009 a prévu d'abaisser à 50 kilowattheures par mètre carré et par an en énergie primaire, à compter de 2011 pour le secteur tertiaire et de 2013 pour le secteur résidentiel, le plafond de la consommation d'énergie pour les constructions neuves. Cette démarche est pleinement justifiée, dans le cadre des économies d'énergie, par l'importance que revêt le bâtiment dans la consommation énergétique des Français – en énergie primaire, il représente 45 % du total, contre 28 % pour l'industrie et 26 % pour les transports.
Pour l'électricité, l'énergie primaire est égale à l'énergie servant à la produire. En vertu des lois de la physique – cycles de Carnot et lois de la thermodynamique –, deux tiers de cette énergie sont dissipés en chaleur dans les centrales thermiques et la consommation finale de 1 kilowattheure d'électricité mobilise presque 3 kilowattheures d'énergie au niveau de la production. On retient conventionnellement le chiffre de 2,58, appelé « coefficient de conversion », cohérent avec le rendement des turbines actuelles.
Cependant, une contrainte réglementaire fondée exclusivement sur l'énergie primaire risque d'opérer un découplage entre la réduction de la consommation d'énergie et l'autre objectif majeur du Grenelle de l'environnement qu'est la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.
En effet, à configuration technologique inchangée, la consommation moyenne d'un chauffe-eau électrique pour une famille de quatre personnes dans un logement de 100 mètres carrés est de 55 kilowattheures par mètre carré et par an en énergie primaire, contre 21 kilowattheures par mètre carré et par an pour un chauffe-eau à gaz, ce qui signifie que l'application stricte de la norme des 50 kilowattheures par mètre carré et par an évince totalement les équipements électriques classiques des constructions neuves.
La mission confiée à l'OPECST consistait à définir les conditions de mise en oeuvre de la norme, grâce à une « modulation » – selon le projet de loi – permettant d'éviter l'éviction totale de l'électricité, qui aurait un effet contraire à l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce faisant, il convenait évidemment de promouvoir le recours aux énergies renouvelables, qui apportent une contribution essentielle à la lutte contre le changement climatique.
Deux questions annexes étaient également posées par le législateur, l'une sur la nécessité d'adapter ou non le coefficient de conversion de l'électricité, l'autre sur l'évaluation de l'impact économique du nouveau dispositif d'encadrement énergétique pour les constructions. La polémique est intense sur ces sujets, mais l'OPECST a préféré prendre du champ. Conformément aux méthodes usuelles de travail de l'OPECST, nous nous sommes entourés d'un comité de pilotage qui nous a procuré le renfort des meilleurs spécialistes du secteur du bâtiment – le Conseil scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et le Programme de recherche et d'expérimentation sur l'énergie dans le bâtiment (PREBAT), ainsi que de l'Académie des technologies, qui a réalisé en mars 2008 une étude sur l'efficacité énergétique dans les bâtiments. M. Claude Crampes, professeur d'économie à l'université de Toulouse, M. Jean Carassus, ancien directeur du département économie et sciences humaines du CSTB, ont fourni au comité de pilotage l'apport des sciences humaines, complément désormais indispensable à toute approche d'ordre technologique.
Nous avons également pris contact avec le terrain, procédant à l'audition de soixante-cinq acteurs des secteurs concernés et effectuant cinq déplacements en France : à Houilles, dans les Yvelines pour visiter la « maison écologique » de M. Bruno Comby, à Lyon et à Saint-Priest pour voir des bâtiments « Effinergie », à Grenoble pour rencontrer les ingénieurs du projet « Homes » chez Schneider, à Angers et à Orléans pour visiter le siège de l'ADEME et le centre de recherche « Castor et Pollux » de Promotelec. Trois voyages à l'étranger nous ont en outre permis de rencontrer des responsables de Minergie en Suisse, de visiter les quartiers Vauban et Rieselfeld à Fribourg-en-Brisgau, en Allemagne, puis le quartier BedZed à Londres.