J'ajouterai aux précédentes interventions les difficultés créées par l'empilement de réformes sans qu'un bilan en soit fait. Nous avons été très étonnés que le Président de la République affirme l'an dernier que l'hôpital n'avait pas connu de réformes depuis vingt ans : celle qui vient d'être lancée est la cinquième !
Les réformes liées aux plans hôpital 2007 et hôpital 2012, encore en cours, se télescopent avec la loi du 29 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. De ce fait, les responsables d'établissement se trouvent contraints d'agir sur des bases nouvelles alors que les réformes précédentes ne sont pas encore entièrement entrées en vigueur. Cela pèse aussi sur la motivation des personnels.
Notre critique de la tarification à l'activité ne concerne pas seulement « l'enveloppe fermée » qu'elle institue ; la T2A prend en compte essentiellement les pathologies et non pas les patients. Or, les besoins de patients souffrant de la même pathologie peuvent être différents.
La T2A privilégie aussi les actes techniques au détriment des soins au long cours. Aujourd'hui, c'est pourtant à des maladies chroniques que nous devons majoritairement faire face.
Elle entraîne des actes inutiles. Certains établissements abusent ainsi visiblement des opérations de la cataracte, des appendicectomies, des césariennes, au détriment de réels besoins. Ce comportement provoque une inflation des coûts.
L'effort de raccourcissement à tout prix de la durée moyenne des séjours a souvent pour conséquence de nouvelles hospitalisations pour une autre cause, avec un surcoût par rapport à une hospitalisation initiale plus longue.
La réforme impose aussi des regroupements d'activités ; aujourd'hui nous parlons d'usines à soins, et – pour les maternités – d'usines à bébés. L'expression « humanisation de l'hôpital », longtemps employée, est tombée en désuétude. Pourtant, au-delà des actes, nous devons prendre en compte les patients ! Nombre de collègues considèrent que l'obligation de produire des actes à la chaîne, en négligeant les patients, leur fait perdre le sens de leur travail et les soignants sont démotivés, de jeunes professionnels très investis perdant même très rapidement courage en raison de leur charge de travail.
De plus, alors que la démocratie doit être au coeur des réformes, la loi du 29 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires instaure un mode de gestion autoritaire. Les critères de qualités des soins ne pèsent désormais que peu au regard des critères comptables.
L'essentiel des dépenses étant constitué des charges de personnel, c'est sur ce poste que l'on recherche des économies rapides, au prix d'horaires de plus en plus variables, établis sans concertation, de charges de travail totalement déséquilibrées par rapport à la vie personnelle, et, finalement, d'une démotivation des personnels ; quelle que soit leur envie de travailler à l'hôpital, ils veulent pouvoir mener une vie personnelle et non être entièrement soumis aux besoins du service, comme c'est aujourd'hui le cas !
Nous constatons aussi que l'emploi est de plus en plus précaire. Des personnels affectés à des emplois permanents restent pendant des années sous statut de contractuel. Outre que les équipes ont besoin de stabilité, la motivation ne viendra pas seulement de la revalorisation salariale mais aussi d'une vie au travail intéressante. Les idées du personnel ne sont absolument pas prises en compte. Le malaise est réel et il hypothèque ainsi l'avenir.