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Intervention de Bernard Gérard

Réunion du 20 janvier 2010 à 21h30
Protection des consommateurs en matière de vente à distance — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Gérard :

En 2003, Internet ne représentait que le quatrième canal de vente à distance alors qu'aujourd'hui, le e-commerce se situe incontestablement à la première place, avec 80 % du chiffre d'affaires de la vente à distance pour un marché qui s'élève en 2008 à 25 milliards d'euros. Il est tout à fait normal que la loi s'adapte à ce secteur en plein essor : protection des consommateurs, régulation de la concurrence sont autant de domaines dans lequel le législateur se doit d'intervenir pour réguler ce jeune secteur en pleine croissance. Cependant, si la vente à distance traditionnelle souffre de la concurrence du e-commerce et doit s'y adapter jour après jour, elle continue d'attirer nos concitoyens de manière significative, à hauteur de 5 milliards d'euros par an. Bien avant l'essor d'internet, la vente à distance traditionnelle s'est ancrée dans les habitudes commerciales des Français, notamment dans les territoires ruraux, où le fameux catalogue était très attendu et l'est encore ! Longtemps synonyme de bonnes affaires ou de modernité, le catalogue a bien sûr quelque peu perdu de son exclusivité en raison de l'émergence du commerce en ligne, mais il reste néanmoins toujours très apprécié, d'où l'importance de conserver ce canal de vente, ce qui oblige la vente à distance à supporter aujourd'hui les charges du catalogue ainsi que celles du passage à internet. Voilà l'équation à laquelle sont confrontés les VADistes traditionnels qui travaillent à améliorer leur modernité, qui s'inquiètent de leurs retards. Ils sont tout à fait conscients des enjeux.

Élu du Nord, berceau de la vente à distance traditionnelle, je partage avec les entreprises et leurs salariés les enjeux de ce secteur capital pour tout un bassin d'emploi, car, ne l'oublions pas, si la vente à distance symbolise les grandes enseignes, elle représente également des milliers de sous-traitants et des dizaines de milliers d'emplois souvent peu qualifiés. Je ne vais pas m'étendre davantage sur les problématiques du secteur, mais je tenais juste à rappeler en propos liminaires que, si la vente à distance est aujourd'hui fortement représentée par le e-commerce, elle ne s'y résume pas. Cette remarque doit nécessairement être posée avant d'envisager cette proposition de loi dont les réglementations devront être nécessairement adaptées à chaque acteur de la vente à distance. Nous devons donc user de prudence et de pragmatisme dans notre manière de légiférer.

Je tiens également à souligner que compte tenu de l'importance que représente le secteur de la vente à distance aujourd'hui, il ne doit pas être considéré à la marge des autres secteurs d'activité « physique ». Le risque de faillite d'une entreprise engagée par des obligations légales à l'égard du consommateur n'est pas l'apanage des seules entreprises de la vente à distance. Dès lors, les mesures de protection des consommateurs qui seraient en proie aux risques de cessation d'activité d'un VADiste français ne doivent pas peser uniquement sur ces derniers, au détriment de leur compétitivité face à leurs concurrents du commerce physique d'une part et des entreprises de vente à distance étrangères d'autre part. La Redoute, Les 3 Suisses sont à seulement cinq kilomètres de la frontière belge...

Cette proposition de loi doit donc répondre à la nécessité d'adopter des mesures adaptées et non discriminatoires pour ce secteur.

Mais le domaine de la vente à distance comporte un risque supplémentaire par rapport à ses concurrents, induit par le délai entre le paiement du produit et sa livraison. Je ne reviendrai pas ici sur le cas de la CAMIF que nous connaissons bien sur ces bancs pour l'avoir présenté à plusieurs reprises, mais, si cet exemple nous conduit aujourd'hui à légiférer, l'objectif de cette proposition de loi n'est pas de pénaliser un secteur d'activité ni d'entraver sa compétitivité. Il s'agit au contraire de prévenir le plus tôt possible les problèmes qui pourraient survenir en cas de défaillance d'une entreprise de vente à distance, défaillance qui peut dans certains cas pénaliser le consommateur par leur caractère exponentiel. Tout l'enjeu de cette proposition de loi réside dans ce fameux équilibre à maintenir entre l'entreprise de vente à distance et le consommateur, et ce texte ne doit pas être un prétexte pour réécrire le droit de la vente à distance.

Selon une étude Médiamétrie, 98 % des Français se disent satisfaits par la vente à distance : ce chiffre doit nous encourager à trouver la bonne réponse à un problème précis sans pour autant entraver la bonne relation entre les entreprises parfaitement solvables et leurs clients.

Dans la métropole lilloise, je suis bien sûr très concerné par la vente à distance : La Redoute, Les 3 Suisses, Damart, Bonprix et tant d'autres sociétés font la renommée du Nord. Les temps changent, la vente à distance doit évoluer. Faire partie de La Redoute, ce n'est pas appartenir à une institution, mais à une entreprise qui doit avoir le courage, avec ses actionnaires et ses salariés, dans le respect du dialogue, de se poser les bonnes questions. Le textile traditionnel se réforme dans le textile innovant. La vente à distance traditionnelle doit en faire autant.

Avec Jean-Pierre Nicolas, Laure de La Raudière, Jean-Michel Ferrand, nous avons décidé de travailler sur ce texte et nous avons consulté de nombreux professionnels avant d'aboutir à une solution équilibrée. Dans le dernier état des travaux de notre commission, nous avons abouti à certaines propositions qui dépassaient nos premiers objectifs. Aussi ai-je déposé deux amendements pour revenir à l'épure originale de notre texte. Si, demain matin, je dois commander par téléphone un taxi pour me rendre à la gare, il ne serait pas normal que je sois obligé d'accepter des conditions générales de vente et confirmer par écrit la commande de mon taxi. Ce serait déraisonnable.

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