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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 20 janvier 2010 à 21h30
Protection des consommateurs en matière de vente à distance — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

La procédure de l'article 1er sera mise en oeuvre par la DGCCRF, qui pourra obliger le professionnel à informer le consommateur de la mesure administrative qui le vise. En outre, l'obligation d'information à destination des consommateurs se trouve opportunément renforcée. Quant à la conclusion des contrats procédant d'un démarchage téléphonique, elle est précisément encadrée. Autant de dispositions qui tendent à améliorer la protection des consommateurs, dont nous ne doutons pas qu'elles feront l'objet d'un large consensus sur l'ensemble de ces bancs.

En dépit de ces nouveautés votre texte n'est toujours pas satisfaisant, loin s'en faut !

Notons en premier lieu la contradiction entre les nouvelles missions assignées à la DGCCRF et son démantèlement progressif par le Gouvernement. Pouvez-vous à cet égard nous assurer que cette direction aura les moyens effectifs de faire appliquer cette nouvelle législation de manière exhaustive ? Le rapport précise qu'en 2007 le centre de surveillance du commerce électronique rattaché à la DGCCRF a effectué un peu plus de 6 000 contrôles. Si l'on soustrait de ce chiffre les doubles contrôles résultant des 887 rappels de réglementation, on arrive donc à un peu plus de 5 000 contrôles, soit environ 8 % des sites contrôlés. Au regard du dynamisme du secteur de la vente en ligne et de la prolifération des sites, c'est assez peu.

Sur la forme, l'article 1er, toujours dans son alinéa 3, nous laisse dubitatifs pour ne pas dire inquiets : il y est prévu que : « s'il apparaît [...] qu'un professionnel [...] est dans l'incapacité manifeste de respecter ses obligations, générant ou susceptible de générer un préjudice financier pour un grand nombre de consommateurs, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut interdire au professionnel toute prise de paiement ».

Cette rédaction hasardeuse appelle plusieurs remarques.

Premièrement, la sanction a priori qui ne serait pas adossée à la constatation d'un préjudice subi nous semble être dommageable pour le professionnel. Son manquement à ses obligations contractuelles peut en effet résulter d'un facteur qu'il ne maîtrise pas, ou être temporaire.

Nous souhaitons par ailleurs que le rapporteur nous précise ce qu'il entend par « grand nombre de consommateurs ». Prise a contrario, cette formulation donne un blanc-seing aux professionnels ne respectant pas leurs obligations contractuelles, tant que le préjudice financier généré ne concerne qu'un nombre restreint de consommateurs. Or ce nombre est apprécié empiriquement à l'aune de critères qui nous échappent, à moins que le Conseil d'État ne précise cette notion dans le décret d'application des procédures de l'article 1er auquel renvoie le dixième alinéa de cet article.

En outre, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation ne sera pas obligée de prononcer une interdiction de prise de paiement à l'encontre d'un professionnel, quand bien même un nombre moins élevé qu'un « grand nombre de consommateurs » subirait un préjudice financier de son fait. Peut-être serait-il opportun que le décret précise qu'en cas d'infraction ne pouvant faire l'objet, à raison de son importance, d'une simple notification d'information parlementaire ou d'un rappel de réglementation, l'autorité administrative sera tenue de prononcer l'interdiction de prise de paiement.

Enfin, dans la même logique, l'alinéa 7 de l'article 1er ne ménage que la possibilité pour l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation d'enjoindre le professionnel à communiquer sur la mesure administrative dont il fait l'objet. La disposition se trouve ainsi amputée de sa force dissuasive, et, partant, de son efficience.

Si le droit est un tâtonnement perpétuel, fruit de la tension entre l'aspiration au définitif et la nécessaire adaptation à des conditions exogènes sans cesse renouvelées, la loi que nous avons la lourde responsabilité d'élaborer et de voter ne saurait souffrir autant d'approximations sans faire courir un réel danger à ceux qui doivent en bénéficier.

J'en viens donc au fond de cette proposition.

Ces approximations sont in fine révélatrices des intentions qui vous animent : sous couvert de l'intention louable, et porteuse politiquement,…

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