Nous avions le sentiment que la pratique du port du voile recouvrait une dérive fondamentaliste. Cela est aujourd'hui une conviction, renforcée par nos auditions : le communautarisme se développe sur nos territoires et, si l'on peut constater des différences de ville à ville ou de quartier à quartier, la tendance existe et se renforce.
Nous avons souhaité entendre les associations féministes, laïques, les élus locaux – notamment l'association de maires « Ville et banlieue » – les spécialistes du droit ou du salafisme. Mais avant tout, nous voulons associer à notre démarche les représentants du culte musulman : il ne s'agit pas de lutter contre un signe religieux, mais contre une manifestation politique ; il ne s'agit pas de stigmatiser les musulmans, mais de donner à la deuxième religion de France toute sa place dans l'espace de la République.
C'est la raison pour laquelle nous tenterons de leur faire partager un certain nombre de préconisations, en les conviant, avec les représentants des maires, à une nouvelle séance de travail. La votation suisse, le débat sur l'identité nationale font partie du contexte dans lequel notre mission est appelée à réfléchir. Mais notre volonté a toujours été de nous en tenir à la question du port du voile intégral, à son insertion dans la problématique du vivre ensemble. C'est dans cet esprit constructif que nous souhaitons poursuivre notre réflexion
Nous accueillons aujourd'hui M. Antoine Sfeir, journaliste et écrivain. Monsieur Sfeir, vous avez notamment publié en 2007 Les islamismes d'hier à aujourd'hui, et vous dirigez Les Cahiers de l'Orient. Souvent sollicité par les médias et apprécié du grand public, vous êtes un fin connaisseur de l'islam et du monde arabe. Pourriez-vous retracer les origines et l'évolution de la pratique du port du voile intégral, dans les pays musulmans et dans le reste du monde ? Cette pratique est-elle en extension ? Si oui, est-ce un signe du progrès du fondamentalisme ?