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Intervention de Jean-Loup Durousset

Réunion du 3 décembre 2009 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Jean-Loup Durousset, président de la Fédération de l'hospitalisation privée :

Nous vous remercions de nous accueillir. Et comme les auditions sont publiques, nous nous sommes permis d'écouter la fin de l'intervention de nos confrères du secteur public.

Le grand principe qui, depuis quelques années, régit la politique hospitalière est théoriquement la convergence des acteurs, qu'ils soient publics ou privés, dans le but de tendre vers une seule tarification, mais par secteur. Or, force est de constater que celle-ci a du mal à se mettre en place. Décidée par la loi de 2004 instituant la tarification à l'activité, avec application dès 2005, elle devait être réalisée à 50 % en 2008 pour devenir effective en 2012. Cette date a été repoussée à 2018 dans le PLFSS. Nous ne pouvons que le regretter, compte tenu des implications que cela a sur le terrain.

Si l'on nous dit que la convergence ne peut être réalisée à cause des importants efforts qu'elle nécessite, c'est oublier que les établissements privés ont déjà dû faire d'énormes efforts depuis 2005. Ils ont subi, chaque année, une baisse ou une hausse de leur rémunération – la convergence s'établissant par rapport à un point défini comme médian – allant jusqu'à 3 % de leur chiffre d'affaires. Vous pouvez imaginer l'impact que peut avoir sur un établissement une perte annuelle de 3 % d'activité depuis 2005.

Cette difficulté, récurrente, nous l'assumons. Pour autant, elle ne justifie pas la non-convergence entre les deux secteurs ; il doit y avoir une autre raison.

Dans le même temps, le législateur et les ARS ont appelé les acteurs de terrain à coopérer et à proposer des solutions de soins harmonisées. Depuis 2005, un certain nombre de tentatives de rapprochement entre cliniques privées et hôpitaux publics ont eu lieu. Mais comment peut-on travailler ensemble si le point essentiel, à savoir la ressource, constitue un élément de divergence ? Pour notre part, nous appelions de nos voeux une convergence tarifaire parce qu'elle nous semblait de nature à faciliter les coopérations sur le terrain.

Dans la loi HPST « Hôpital, patients, santé et territoires », vous avez de nouveau tenté, par la création des groupements de coopération sanitaire, de rapprocher les établissements afin qu'ils offrent à la population des soins de qualité et cessent de se comparer ou de s'analyser. Mais, tant qu'il n'y aura pas convergence, les difficultés sur le terrain resteront grandes, la convergence étant quasiment, pour nous, un devoir de santé publique.

Nous aurions souhaité qu'un point d'horizon soit fixé. C'est pourquoi nous reprochons à la loi de financement de la sécurité sociale d'avoir repoussé l'échéance à 2018. Nous espérions qu'un amendement fixe au moins les modalités ou oblige le ministère et, en particulier, la direction de l'hospitalisation et de l'organisation de soins (DHOS) à définir la méthode pour parvenir à cette convergence. On peut comprendre que le chemin soit long, mais pas qu'aucune méthode n'ait été arrêtée depuis 2005, au prétexte qu'il est nécessaire de mener des études complémentaires pour connaître les raisons permettant d'expliquer les différences de coûts entre les acteurs. En tant que gestionnaire de plusieurs établissements, c'est un argument que je ne peux pas présenter ; je ne me vois pas dire à des établissements : « Des études sont en cours. Je répondrai à votre demande lorsque celles-ci seront terminées. »

La méthode permettant de parvenir à la convergence aurait dû, selon nous, être présentée aux parlementaires cette année. De fait, vous risquez de vous entendre dire, chaque année, qu'une autre étude est nécessaire et que la méthode vous sera donnée une fois toutes les études finies !

La DHOS ayant annoncé que les études devraient être terminées en 2012, cela signifie qu'une méthode devrait être présentée en 2013, pour une application en 2018. Si le principe de convergence consiste bien à rapprocher les tarifs des établissements publics et ceux des établissements privés avec un écart de 25 %, on peut d'ores et déjà prédire que la convergence ne sera pas atteinte en 2018.

La FHP a réagi en 2009 à la décision, prise sans concertation, de reporter la date de mise en place de la convergence. Pas plus sur la loi de financement de la sécurité sociale, que sur le principe de convergence ou encore sur la V11, il n'y a eu de véritable concertation entre les acteurs. Encore un autre reproche à adresser.

Nous aurions souhaité l'institution d'un principe de « contractualisation ». Ce terme n'étant peut-être pas le plus approprié, je m'explique. Nous pensons que la Fédération hospitalière de France, la Fédération de l'hospitalisation privée et la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne sont des acteurs responsables. Pour que la sécurité sociale aille mieux, il faut, à l'évidence, que les acteurs soient responsabilisés. Or, la responsabilisation implique deux protagonistes – l'État, qui fait valoir qu'il a des obligations, et les acteurs, qui mettent en avant qu'ils ont des contraintes – et consiste à trouver un point d'équilibre. C'est d'ailleurs pourquoi, nous aurions souhaité qu'il y ait une contractualisation des trois fédérations sur des objectifs communs.

L'un de ces objectifs aurait pu être le développement de la chirurgie ambulatoire, système qui est bon pour la collectivité car le passage d'un séjour hospitalier à une hospitalisation d'un jour génère une économie substantielle. C'est également relativement bon pour les établissements puisque, comme les patients n'y restent plus qu'un jour au lieu de cinq, ils peuvent supprimer le personnel de nuit et réorganiser les services à d'autres fins. Enfin, c'est bon pour les patients car il a été démontré qu'une hospitalisation prolongée n'apportait rien à la qualité des soins et faisait peser des risques d'infections nosocomiales.

À l'inverse de 1982, il nous est proposé, non de nous contractualiser, mais de nous soumettre à une entente préalable et de nous sanctionner. De ce fait, nous ne nous considérons plus comme des acteurs responsables, mais comme des acteurs à contrôler.

Or comment juger de la pertinence des actes, sinon en s'adressant à des acteurs responsables et en définissant une méthode à utiliser pour, par exemple, opérer une prothèse de hanche ou procéder à une appendicectomie. Le cadre étant posé, la règle ayant été définie et acceptée par tous, les professionnels et l'État peuvent s'engager, et il peut y avoir contrôle. La délégation ou la responsabilité n'exclut pas ce dernier.

Proposer comme a priori le contrôle et la sanction n'est pas sans soulever des difficultés, d'autant que se pose le problème majeur de l'interprétation des dispositions envisagées. La dernière version de la V11 aurait fait, nous a-t-on dit, l'objet de concertations entre l'assurance maladie et l'État. Mais à nos questions sur l'interprétation à faire des conclusions qui avaient résulté de ces concertations, nous n'avons pas reçu de réponse autre que celle nous informant que nous allions être contrôlés et probablement sanctionnés puisque notre interprétation risquait d'être différente.

Nous regrettons l'absence d'engagements forts de l'État sur des projets qui auraient pu être contractualisés, qu'il s'agisse des grandes orientations à donner aux établissements sanitaires, du développement de la médecine, des soins palliatifs ou de la chirurgie ambulatoire, du travail spécifique sur la gériatrie. Nous sommes prêts à nous engager sur de tels projets au plan national et à les décliner à l'échelon régional.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous appelions le Parlement à prendre position en faveur de la contractualisation, car celle-ci est importante.

Bien sûr, des difficultés se présentent, des établissements doivent être restructurés, des réticences se font jour, mais pourquoi nous considérer comme des acteurs irresponsables, alors que nous est confiée la chose la plus importante pour nos concitoyens : leur santé ?

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