Madame la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, ma question, qui s'adressait à Mme la garde des sceaux, concerne un sujet sensible, à savoir les conditions du droit au mariage pour les personnes en situation irrégulière sur le territoire nationale.
Le principe de la liberté du mariage, composante de la liberté individuelle, est protégé par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : il interdit de subordonner la célébration du mariage à la régularité du séjour d'un futur conjoint étranger sur le territoire français.
Pour autant, le respect de ce principe ne fait pas obstacle à certaines vérifications afin de mieux lutter contre les mariages dits de complaisance.
Ainsi, avant la publication des bans, l'officier d'état-civil peut s'entretenir avec les futurs époux. La loi du 26 novembre 2003 a d'ailleurs renforcé la procédure d'alerte et l'officier d'état-civil peut saisir le procureur de la République, en vertu de l'article 175-2 du code civil, s'il dispose d'éléments sérieux laissant présumer un défaut d'intention matrimoniale des futurs conjoints. Le parquet peut alors ordonner à l'officier d'état-civil de surseoir au mariage ou même de s'y opposer.
Mais si le parquet n'a pris aucune décision de sursis ou d'opposition, le maire a l'obligation de prononcer le mariage, faute de quoi il commettrait une voie de fait. Or il peut arriver que le maire demeure convaincu, au vu d'indices sérieux, que le mariage est simulé. Sans remettre en cause le principe de la liberté du mariage, n'est-il pas possible d'intensifier les enquêtes du parquet, souvent trop sommaires ?
Récemment, le sénateur Gérard César, maire de Rauzan, en Gironde, a jugé simulé un mariage qu'on lui demandait de célébrer. Il a refusé de le prononcer, estimant que l'enquête du parquet avait été bâclée. L'individu qui se présentait devant lui faisait par ailleurs l'objet d'un arrêté d'expulsion, et a ensuite été reconduit à la frontière.
Cela n'a pas empêché que le sénateur maire fasse l'objet d'une procédure en référé, au terme de laquelle il s'est retrouvé condamné pour voie de fait et obligé de prononcer le mariage sous peine de verser une astreinte par jour de retard… Le maire de Rauzan aurait-il dû aller chercher l'intéressé en Algérie, afin de pouvoir célébrer son mariage dans sa mairie ?
Sur cette question sensible, l'incohérence est totale, ce qui justifie un débat. Une proposition de loi a d'ailleurs été déposée à ce sujet.