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Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 8 décembre 2009 à 15h00
Débat sur l'identité nationale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, oui, ce débat est légitime. C'est le débat de tous. Nous débattons donc naturellement ici, à l'Assemblée nationale, comme le groupe UMP l'a proposé. En même temps, ce débat ne doit pas être celui d'un trimestre. Ce ne doit pas être un débat de préfecture ou de ministère. Il est bien que le Président de la République se soit, aujourd'hui, de nouveau exprimé sur ce sujet. Il ne saurait non plus être, par les éléments que l'on y met, un programme de gouvernement. Si vous m'y autorisez, monsieur le ministre, je n'ai pas beaucoup aimé tout à l'heure, dans votre bouche, l'utilisation du mot « scénario » qui ne me paraît pas adapté.

Oui, ce débat est, pour nous, une passion partagée ; il intéresse. On nous demande parfois si nos électeurs nous en parlent. Oui, parce que les Français ne sont heureusement pas uniquement préoccupés de questions matérielles, aussi importantes et urgentes soient-elles.

Nos concitoyens comprennent bien que cette question n'est pas résolue d'avance et que la réponse n'est pas acquise. Nous sommes dans un monde ouvert qui pose naturellement de nouvelle manière la question de l'identité nationale. Oui, Jean-François Copé l'a rappelé, notre pays vit, subit des fissures et des menaces. Oui – et c'est heureux – nos concitoyens demandent que le débat soit permanent et exigent des réponses. Je pense, en effet, que le plus grand nombre d'entre eux ressent, vit, exprime, exige que l'identité nationale soit un lien social et non un self-service où chacun viendrait chercher sa réponse et apporterait son opinion. L'identité nationale, c'est quelque chose de plus fort.

Oui, ce débat est essentiel et indispensable parce que l'identité nationale est une force, un fait à nourrir et non un contrat à négocier. Beaucoup l'ont dit, beaucoup le diront – mais pourquoi faire nécessairement compliqué ? – l'identité nationale est une source d'énergie qui se trouve dans notre belle devise de liberté, d'égalité et de fraternité : la liberté, en ce qu'elle a d'insolence et de création ; l'égalité, quand, face à nos concitoyens qui se trouvent dans des situations très difficiles, nous ne devons pas mener des politiques « localistes », spécifiques, clientélistes, mais faire en sorte que l'ascenseur social puisse fonctionner pour tous les Français, où qu'ils soient ; la fraternité, quand on mesure ce qu'est la force de la politique familiale française et qu'on voit un pays européen comme l'Allemagne se demander comment elle pourrait éclairer des politiques publiques dans d'autres pays.

Liberté, égalité, fraternité, cela dit beaucoup, et je suis parfois perplexe quand je vois ce qu'on veut ajouter à la devise de la République. La laïcité, je suis pour, mais ce n'est pas la quatrième vertu républicaine, la République en comporte trois. La diversité, c'est un objectif politique indispensable, mais ce n'est pas la cinquième vertu républicaine, il y en a trois.

Monsieur le ministre, nous sommes massivement ici contre le communautarisme, et je suis heureux qu'il y ait eu une clarification et un progrès sur ce terrain. Je suis aussi, car l'ascenseur social passe heureusement par d'autres voies, contre les discriminations positives, même parées de nouvelles présentations.

Source d'énergie, intelligence de mouvement aussi, parce que l'identité, c'est un héritage, et c'est le refus de l'ingratitude, comme Alain Finkielkraut l'a très bien décrit. L'identité nationale, c'est une transmission, c'est la conscience de ce que nos parents nous ont transmis, c'est la conscience de ce que nous voulons transmettre à nos enfants, avec une interrogation, avec une forme d'ambition, sur ce que nous aimerions qu'ils transmettent à leurs propres enfants. L'héritage, la transmission ne retirent rien à ce que la richesse nouvelle peut apporter à notre pays, tout cela est indispensable.

Source d'énergie, intelligence de mouvement, esprit de don enfin.

L'esprit de don dans notre pays, c'est le sens du service public, c'est le sens de l'effort gratuit, y compris dans la formation et les programmes scolaires. C'est le lien entre science et conscience. Y aurait-il une réponse française aux enjeux de la bioéthique – la France, dernier rempart contre la déferlante utilitariste, comme le dit le professeur Munich – si les scientifiques de notre pays n'avaient pas cette culture, ces humanités, cette histoire, que nous devons continuer de leur offrir ?

L'esprit de don, ce n'est pas l'esprit de créance. Toute revendication, même légitime, ne doit pas nécessairement ébranler l'identité nationale. L'identité nationale, c'est se poser des questions, mais c'est aussi ne pas constamment s'agiter, douter, fragiliser ce qui nous a été offert, ce que nous voulons vivre et transmettre.

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