Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de François Asensi

Réunion du 8 décembre 2009 à 15h00
Débat sur l'identité nationale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Asensi :

Notre nation, c'est celle de la laïcité, remise en cause par le discours de Latran.

Notre nation, c'est celle du Conseil national de la Résistance et de son pacte social. Or, du démantèlement du droit du travail à la privatisation des services publics, la politique de votre gouvernement renie cette République sociale, véritable ADN de la France.

Notre nation, c'est, enfin, une communauté politique ouverte sur les autres nations, dans une relation de coopération et de dialogue. Comme le rappelait Jean Jaurès, cet internationalisme-là ne nous éloigne pas de la nation. Il nous en rapproche, à l'inverse d'un capitalisme mondialisé qui met les peuples en concurrence, attisant hier les guerres coloniales, aujourd'hui les guerres économiques et impériales.

Je ne cesse de m'étonner d'une contradiction : les initiateurs du débat sur l'identité, les défenseurs des symboles de la nation, sont ceux-là mêmes qui fragilisent le rôle des États en promouvant la liberté absolue de circulation des capitaux ; ceux-là mêmes qui soutiennent une construction européenne coupée du peuple ; ceux-là mêmes qui abaissent les solidarités nationales en défendant la directive Bolkenstein. Ces élites capitalistes apatrides, dignes héritières des réfugiés de Coblence, mettent en doute le patriotisme des classes populaires, alors qu'elles n'hésitent jamais à défendre leurs privilèges depuis les fourgons de l'étranger.

Enfin, comment accepter que le Gouvernement français caricature et stigmatise à ce point l'immigration ? Notre nation est un creuset de cultures, une terre ancienne d'immigrés. Près d'un quart des jeunes français a un grand-parent né à l'étranger, ne l'oublions pas, monsieur le ministre.

Élu du département de la Seine-Saint-Denis, berceau depuis longtemps de métissages au gré des migrations économiques, je ne peux accepter le procès de la différence que votre gouvernement instruit. Non, l'immigration n'est pas un danger. Elle est une richesse, pour peu que l'on sache lui donner une juste place dans notre République. La France, sa croissance, son modèle social, se sont construits sur les efforts et les sacrifices de ces populations qui nous ont rejoints. La stigmatisation de l'immigration est un reniement absolu de l'intégration républicaine. En confortant les préjugés, vous condamnez certains Français à devenir d'éternels étrangers dans leur propre pays. Vous condamnez ces Français de la deuxième ou troisième génération à subir, comme leurs parents, des discriminations ethniques qui sont la honte de notre République.

Parfois avec difficulté, la France a su, par le passé, offrir sa générosité à plusieurs générations d'immigrés. Je constate avec beaucoup de tristesse que votre politique discriminante ferme désormais la porte à la génération des enfants d'immigrés maghrébins et africains, terriblement absents de notre hémicycle.

Je constate également que la tradition humaniste française est bafouée, à l'heure des charters pour l'Afghanistan. Ces réfugiés ou immigrés sans papiers ont vécu le déchirement de quitter leur pays, leur famille, font le sacrifice d'occuper des emplois pénibles, en deçà de leurs compétences, pour assurer à leurs enfants un avenir en France. Quelle épreuve supplémentaire comptez-vous leur imposer, alors que leur régularisation est un droit fondamental ?

La France, patrie des droits de l'homme, voit chaque jour ses lumières décliner. Le Conseil de l'Europe vient de dénoncer « la vision étriquée de l'identité », défendue par le gouvernement français, qui n'accorde aucune place à la diversité des cultures. La tribune du Président Sarkozy, dans Le Monde, ressuscite la funeste idée d'assimilation. Le juste refus du communautarisme ne saurait faire table rase des cultures d'origine.

Finalement, le véritable mal français n'est pas l'immigration, c'est l'affaiblissement de notre modèle républicain. Affaiblissement dû à la crise systémique du capitalisme, mais aussi à un passé colonial qui a durablement figé une image de la France opposée à la culture africaine. Une image réaffirmée récemment par le Président de la République dans le terrible discours de Dakar.

Rien n'est pire que ces murs d'incompréhension et de discriminations qui existent au coeur de notre République, où les jeunes diplômés immigrés subissent un chômage quatre fois plus important que les non immigrés, où l'ensemble de la société souffre d'inégalités si criantes que le vivre-ensemble est brisé.

Certains à droite, au nom de leur chef, font le choix de maintenir ces murs de défiance et d'injustice, les députés communistes et républicains sont, au contraire, déterminés à les faire tomber ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion