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Intervention de Yves-Claude Llorca

Réunion du 2 décembre 2009 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Yves-Claude Llorca, SNJ :

Ni l'intersyndicale ni les syndicats de journalistes de l'AFP ne sont les immobilistes ringards que l'on se plaît parfois à présenter. L'AFP a connu des crises récurrentes dues à ses problèmes de financement. J'y travaille depuis 1982, et j'ai vu des présidents contraints de démissionner par des mouvements de personnel dus aux menaces qui pesaient sur l'indépendance de l'Agence et sur son développement. L'intersyndicale est unie dans son refus d'une transformation en société par actions. Certains syndicats sont toutefois favorables à un toilettage du statut, qui pourrait se faire par décret – c'est la piste qui avait été envisagée avec M. Gérard Larcher. Cela étant, il reste à résoudre la quadrature du cercle : comment garantir le financement pérenne de l'AFP, fleuron mondial de la collecte et de la vérification de l'information, sans compromettre son indépendance ? L'article 2 du statut de 1957, loin d'être obsolète, est indispensable à l'exercice quotidien de notre profession. L'Agence compte plus de 2 000 journalistes de 81 nationalités répartis dans 165 pays, et dotés de statuts divers. Nous nous sommes battus pour obtenir des statuts régionaux. Outre les journalistes dits « du siège », salariés de droit français, l'Agence emploie aussi des journalistes en Afrique ou en Amérique latine par exemple, avec des statuts locaux, parfois précaires, payés 300 ou 400 euros pour un travail à temps plein. Tous composent, ensemble, la « famille AFP », en ce qu'ils remplissent la même mission, avec la même éthique professionnelle et en suivant les mêmes règles déontologiques. C'est ce qui fait notre force et notre unité.

Mais le fonctionnement de l'Agence a un coût – le réseau satellitaire, par exemple, coûte fort cher. De même, dans les années 1980, il a fallu dépenser une fortune dans les premiers appareils photos numériques, mais nous devions en être équipés pour affronter à armes égales la concurrence d'Associated Press et de Reuters. Il nous fallait, à l'époque, 300 millions de francs et le gouvernement Mauroy nous a aidés, comme des gouvernements de droite nous ont aidés à surmonter des crises financières ; à l'inverse, nous avons craint de voir l'AFP passer sous la coupe de Vivendi alors que la gauche était au pouvoir… Autrement dit, l'orientation politique du gouvernement n'entre pas en ligne de compte. L'AFP appartient à la communauté française et à la communauté internationale parce qu'elle garantit le pluralisme de l'information et le respect de l'éthique professionnelle.

Il existe plusieurs pistes permettant de capitaliser l'AFP sans la transformer en société par actions ; on pourrait par exemple retenir l'hypothèse d'une fondation capitalisée. Mais en aucun cas il ne faut transformer l'Agence en une société par actions, qui serait étatisée dans un premier temps et peut-être privatisée ensuite. C'est notre crainte majeure. Pour le reste, on peut évidemment modifier le statut.

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