La surreprésentation de la presse quotidienne régionale au conseil d'administration de l'Agence est incontestable mais c'est un fait ancien puisque, comme cela a été rappelé, la création de l'AFP tendait aussi à apporter une aide indirecte à la presse. Pour autant, les désabonnements de la PQR française traduisent-ils une évolution inéluctable ou sont-ils conjoncturels ? À l'étranger, l'Agence ne perd pas de clients de la presse écrite, les nouveaux abonnements compensant les désabonnements. Il apparaît que pour l'AFP la crise a eu des effets plus marqués en France, où se manifestent en outre les effets de l'extrême concentration de la presse entre les mains de quelques-uns. Pour autant, je ne suis pas absolument sûre que le mouvement de désabonnement constaté ici soit irréversible. On se livre, me semble-t-il, à des analyses hâtives. Ainsi, après avoir annoncé une première fois la disparition de la presse, qui n'a pas eu lieu, on explique maintenant que la multiplication des sites Internet va la précipiter. Mais le public ne va-t-il pas en revenir au bon vieux journal sur papier ? On observe une tendance qui reflète un moment de la vie politique du pays ; rien ne prouve qu'elle se prolongera et une réflexion de plus long terme serait nécessaire.
Bien que la définition du modèle économique de l'Agence ne relève pas des syndicats, nous avons fait des propositions, en nombre et de longue date. J'en ai formulé une dans mon propos liminaire, en soulignant que point n'est besoin de transformer l'AFP en société par actions puisque, d'une part, nous vendons nos services et que, d'autre part, nous remplissons des missions d'intérêt général pour lesquelles l'État peut nous allouer des dotations comme il l'a fait plusieurs fois dans le passé sous diverses formes. L'Agence a ainsi bénéficié en 1982 de prêts participatifs, qui n'ont pas été remboursés, pour améliorer son outil informatique. On pourrait donc envisager une dotation annuelle de l'État, ou une dotation sur plusieurs années destinée à des investissements techniques lourds, ou encore un prêt à taux zéro de la Caisse des dépôts et consignations. Diverses possibilités existent et les syndicats ont fait des propositions à ce sujet.
Nous ne sommes pas favorables à un changement de gouvernance de l'Agence. Le statut de 1957 a certes institué un équilibre fragile et une sorte de schizophrénie en faisant de nos clients nos patrons mais, avec une autre configuration statutaire, l'AFP aurait-elle eu la même indépendance ? Le statut a ceci d'extraordinaire qu'il a doté l'Agence d'un conseil d'administration pluriel dans lequel tout le spectre de la presse est représenté, et qu'il a préservé l'AFP de tout soupçon de soumission ou de dépendance à l'égard des pouvoirs politique et économique. Je redoute qu'on ne modifie cet équilibre précaire en prétextant les désabonnements de la PQR et que de fâcheuses conséquences ne s'ensuivent.
Comme d'autres, M. Herbillon considère que le statut devrait être modifié. Mais pourquoi changer un statut qui nous a si bien réussi ?