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Intervention de David Sharp

Réunion du 2 décembre 2009 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

David Sharp, SUD :

Je sais qu'un grand groupe de presse allemand s'est désabonné de la Deutsche Presse-Agentur pour s'abonner à l'AFP. Inversement, en France, des clients traditionnels de l'Agence France-Presse tendent à se désabonner. On pourrait donc croire que nous allons vers une situation où il n'y aurait plus d'agence nationale, mais je ne pense pas que ce soit le cas. Même dans des pays peu réputés pour être des nids de socialisme, comme le Royaume-Uni ou les États-Unis d'Amérique, il y a toujours une agence nationale, même si les modes de financement et les modes opératoires diffèrent.

Quel pourrait donc être le modèle futur de l'AFP, sinon celui que nous avons actuellement ? Le projet de M. Louette apporte deux réponses. Il souhaite renforcer les missions d'intérêt général de l'AFP, sachant que la mission d'intérêt général est un concept reconnu en droit européen. Ce serait donc un moyen d'échapper aux éventuelles foudres de la Cour de Luxembourg. Or, comme Mme Carmona l'a rappelé, l'avocat de M. Louette nous a expliqué que selon la jurisprudence de cette cour, un État peut très bien signer un contrat définissant une mission d'intérêt général avec une entreprise comme l'AFP. Sachant que cinq de nos six langues de travail sont en usage dans de grands pays de l'Union européenne, il n'y aurait aucune raison pour qu'un tel contrat soit limité aux seules activités en langue française. Une telle solution n'impliquerait aucun changement de statut – changement auquel, comme les autres syndicats, nous nous opposons, celui de 1957 ayant à nos yeux de nombreux avantages.

L'autre versant du projet de M. Louette s'inspire de ce que l'on peut observer dans le paysage actuel des agences d'information – notamment du côté des agences privées comme Reuters – : un foisonnement de produits annexes et de diversifications censés apporter des recettes supplémentaires. Mais Reuters par exemple, c'est l'économie, à l'origine de 95 % de son chiffre d'affaires, et nous sommes donc là dans un autre cas de figure. M. Louette a déjà lancé un certain nombre de projets, qui selon nous ressemblent plus à un ensemble de tentatives sans grande cohérence qu'à une stratégie réfléchie. Ainsi, il y a deux ans, il a ouvert une filiale à San Francisco afin de fabriquer des quiz d'information en anglais. Il pensait en effet que, sur des sites comme Facebook, on pourrait attirer les lecteurs avec des produits un peu ludiques. Pourquoi pas ? Certaines entreprises de presse comme Rue 89 ou France 24 élaborent des quiz très respectables. Ce n'est pas forcément un produit non journalistique. Le problème est que, pour paraître sur Facebook, on a employé à San Francisco des informaticiens qui ont élaboré un produit sans aucun rapport organique avec le reste de l'Agence. Depuis, cette filiale a été fermée.

Si notre avenir dépend de produits que nous considérons comme des gadgets, qui n'ont rien à voir avec le coeur de métier de l'AFP mais sont élaborés dans des langues diverses par une nébuleuse de filiales excentrées, nous allons forcément perdre de l'argent – et je pense que nous en avons déjà perdu beaucoup avec cette histoire de quiz. Au contraire, le projet technologique dit « 4 XML » est absolument central pour l'agence. Mais pour qu'un tel projet soit techniquement viable, il faut que les données soient intégrées, que l'on soit une seule entreprise, regroupant des salariés soudés, et non pas dispersés dans le monde, travaillant sous des statuts différents et avec des technologies et des codes de travail différents.

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