Cette discussion intervient dans un contexte très sensible entre les opérateurs, et ces éléments de réponse doivent permettre d'apporter une réponse satisfaisante aux acteurs qui se sont engagés à ne pas tenter de faire pression pour faire bouger le texte de loi. Il me revient donc de dire ici ce que le Gouvernement entend par partage équitable des coûts.
Le déploiement des réseaux en fibre optique est un enjeu majeur pour notre pays et pour le Gouvernement. Afin de mettre en oeuvre le principe de mutualisation de la partie terminale de la fibre, posé par la loi de modernisation de l'économie, l'ARCEP a conduit de nombreux travaux. J'ai réuni par deux fois, les 7 avril et 10 juillet derniers, l'ARCEP et les opérateurs pour faire le point. Ces travaux ont mis en évidence que, pour garantir un accès effectif au réseau déployé dans les immeubles, et dans un souci de respect de la neutralité technologique, il convenait de permettre à tous les opérateurs de mettre en oeuvre leurs choix technologiques.
Le projet de décision élaboré par l'ARCEP prévoit ainsi, dans les zones très denses, la possibilité pour les opérateurs tiers de demander à l'opérateur d'immeuble de pouvoir, soit bénéficier d'une fibre optique dédiée, soit, s'il privilégie la technologie monofibre, installer un dispositif de brassage au niveau ou à proximité du point de mutualisation. Ceci peut se faire à deux conditions : d'une part que cette demande soit formulée antérieurement à l'équipement de l'immeuble, d'autre part qu'elle donne lieu à un préfinancement d'une part équitable des coûts par cet opérateur. Ce principe est repris dans l'article 1er G de la présente proposition de loi.
Je peux témoigner que les projets de décision et de recommandation de l'ARCEP ont fait l'objet d'une concertation intense avec les opérateurs, de trois consultations publiques, et ont reçu l'avis favorable de l'Autorité de la concurrence et de la Commission européenne. Ils font désormais l'objet d'un consensus et devraient rapidement entrer en vigueur.
La notion de partage équitable des coûts, qui figure dans l'article 1er G, est en particulier précisée à travers quatre principes fixés dans le projet de décision de l'ARCEP et détaillés dans le projet de recommandation. D'abord, le principe de non-discrimination : deux opérateurs dans une situation similaire doivent bénéficier de conditions de partage des coûts équivalentes. Ainsi, le projet de décision de l'Autorité prévoit que l'opérateur d'immeuble puisse exiger que les opérateurs qui se manifestent avant les travaux participent au financement de l'installation des lignes en fibre optique dans l'immeuble.
Ensuite, le principe d'objectivité, qui implique que la tarification mise en oeuvre par l'opérateur d'immeuble doit pouvoir être justifiée à partir d'éléments de coûts clairs et opposables.
Par ailleurs, le principe de pertinence : il requiert une adéquation entre les coûts supportés par les opérateurs et les infrastructures et prestations dont ils ont l'usage. Ainsi, et j'appelle votre attention sur ce point, ce principe signifie qu'un opérateur ayant demandé des fibres dédiées finance la totalité des surcoûts induits par cette demande ainsi qu'une quote-part équitable des coûts ayant vocation à être partagés entre tous les opérateurs.
En outre, ce principe appelle une cohérence entre partage des coûts et partage des éventuels revenus ultérieurs liés à l'accueil d'opérateurs se raccordant ultérieurement à l'immeuble. Si le coût du dispositif de brassage est partagé entre les opérateurs, ceux-ci partagent également les revenus liés à l'accueil d'opérateurs sur ce dispositif.
Enfin, le principe d'efficacité des investissements implique que les coûts pris en compte correspondent à ceux encourus par un opérateur efficace ; il convient notamment que l'opérateur d'immeuble ne fasse pas supporter de coût indu ou excessif aux opérateurs tiers.
Les modalités de partage équitable des coûts sont ainsi clairement définies dans les projets de décision et de recommandation de l'ARCEP, conformément à l'esprit et au texte de la loi de modernisation de l'économie et de la présente proposition de loi. Ils font désormais, et nous nous en réjouissons, l'objet d'un consensus général, comme la rapporteure et d'autres parlementaires ont pu le vérifier à l'occasion d'une récente réunion qu'ils ont organisée avec les opérateurs de télécoms et l'ARCEP. Par ailleurs, l'ARCEP a confirmé qu'elle n'entendait pas revenir sur l'équilibre ainsi trouvé et les principes qui le fondent. Dans ces conditions, l'article 1er G n'a pas, me semble-t-il, à être modifié ou complété.
Je vous remercie d'avoir écouté avec attention cette déclaration quelque peu fastidieuse…