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Intervention de Serge Eyrolles

Réunion du 25 novembre 2009 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Serge Eyrolles, président du Syndicat national de l'édition :

Un livre numérisé coûte environ 60 centimes la page en format PDF classique, et 2 euros la page en format interactif, mais tout dépend bien sûr du nombre de pages.

Il faut tout d'abord définir ce qu'est un livre numérique, et nous avons engagé une réflexion sur ce point avec le ministère de la culture. Il peut s'agir du texte homothétique du livre papier, et dans ce cas leur contenu est identique. Mais si nous ajoutons du son, de la vidéo, des liens Internet, il importe de savoir où commence le service – et sur ce point, nous sommes en désaccord avec Bercy.

Pour reprendre l'exemple cité, la différence de prix s'explique par le fait que l'auteur – Marc Levy en l'occurrence – a conservé ses droits numériques pour les gérer lui-même. C'est cette possibilité qui nous inquiète. Déjà, dans d'autres pays, des auteurs considèrent qu'ils n'ont plus besoin d'éditeur, estimant qu'il leur suffit de présenter leur oeuvre sur une plateforme de diffusion pour en tirer le meilleur bénéfice. Je pense qu'ils se trompent, car notre métier d'éditeur consiste à apporter une plus-value à un ouvrage en le numérisant.

En France, nous ne nous en sortirons que si nous mettons en place une plateforme commune. L'internaute ne peut perdre son temps à rechercher la plateforme dont il a besoin. Les éditeurs doivent donc présenter l'ensemble de l'offre sur une plateforme unique, capable de renvoyer les internautes, par l'intermédiaire des diffuseurs numériques et de l'ensemble des acteurs intéressés par les fichiers numériques, vers les librairies, lesquelles, monsieur Bloche, disparaissent hélas en grand nombre, et cela dans une certaine indifférence. C'est ainsi que, récemment, une très grande librairie située avenue de l'Opéra à Paris a dû fermer ses portes car nous n'avons pas réussi à faire comprendre au propriétaire que multiplier le loyer par sept n'était pas le meilleur moyen de préserver notre industrie culturelle… En tout cas, la survie du métier d'éditeur dépend d'une telle plateforme que quelques-uns de nos voisins européens ont d'ailleurs adoptée.

La question de la rémunération des auteurs, abordée par Hervé Gaymard, est très complexe. Aujourd'hui, la gratuité ne concerne que le droit de citation, mais elle ne s'étend ni au chapitre ni à la page, pour lesquels l'auteur est en droit d'exiger une rémunération. Encore faut-il que l'on puisse identifier avec précision ce que l'internaute a consulté. Nous devrons donc nous doter de moyens techniques – sur le modèle peut-être de l'International standard book number (ISBN) – permettant une connaissance précise des consultations.

Nous ne disposons par ailleurs des droits numériques sur les livres français que depuis une quinzaine d'années. Pour les années qui précèdent, puisque les contrats ne le prévoyaient bien sûr pas, tout l'enjeu est de pouvoir identifier les ayants droit afin d'essayer d'obtenir les droits numériques et de mieux les gérer. Nous attendons des parlementaires qu'ils nous en donnent le moyen.

Quant au prix, le prix du livre numérique doit-il être le même que celui d'un livre papier – ce qui sera le cas si nous étendons la loi sur le prix unique – ou doit-il être moins cher voire plus cher ? Selon une étude récente, les internautes souhaitent que le prix du livre numérique soit inférieur de 60 % à celui du livre papier. Mais il n'existe pas de modèle à ce prix-là ! Il faut que la réflexion avance d'ici à la fin de l'année – sinon d'autres la mèneront à notre place – sur l'opportunité d'un prix unique si le livre est homothétique, ainsi que sur le taux réduit de TVA – il serait en effet aberrant d'avoir deux taux de TVA pour un même contenu, d'autant que le taux de 19,6 % augmente d'autant le prix du livre numérique.

Vis-à-vis de Google, M. Colombet a omis l'essentiel : la protection des droits de nos auteurs est notre premier combat, car sans cette protection on tue la création. Il y aura toujours des best-sellers, mais la richesse de l'édition française n'existera plus.

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