Dans cet article, monsieur le secrétaire d'État, vous proposez que, pour la réalisation des infrastructures et la mise à disposition des matériels, la Société du Grand Paris recoure éventuellement à un contrat de partenariat public-privé, qui pourra également porter sur l'entretien et le renouvellement des lignes, ouvrages, installations et matériels concernés.
Vous n'en serez pas surpris, nous sommes plus que réservés sur le recours à cette technique contractuelle, sur laquelle le Conseil constitutionnel et la Cour des comptes ont déjà émis les plus vives réserves.
En 2003, le Conseil constitutionnel avait estimé que les contrats de partenariat public-privé, qui dérogent au droit commun de la commande publique, sont susceptibles de « priver de garanties légales les exigences constitutionnelles inhérentes à l'égalité devant la commande publique, à la protection de la propriété publique et au bon usage des deniers publics ».
Le bon usage des deniers publics préoccupe également la Cour des comptes. Elle cite plusieurs cas où la conclusion de contrats de partenariat s'est révélée finalement plus coûteuse pour la collectivité que ne l'aurait été le recours aux solutions plus classiques, que votre majorité juge à tort trop rigides. Deux de ces exemples sont bien connus : le centre des archives du ministère des affaires étrangères et le pôle du renseignement du ministère de l'intérieur.
Concernant le secteur des transports terrestres, qui intéresse directement ce projet de loi, il n'est pas inutile de rappeler qu'un rapport sénatorial de la mission d'information sur les infrastructures de transport a estimé il y a deux ans que « la voie des partenariats public-privé ne saurait en aucun cas constituer une solution miracle au problème de financement des infrastructures de transports ». La preuve en est donnée par « les difficultés rencontrées par certains projets français comme le tramway de Mulhouse ».
Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement s'est attaché ces dernières années à libéraliser le financement des services publics et des politiques d'aménagement. Le projet du Grand Paris n'échappe pas à ce qui devient désormais une règle. Mais le recours à ce type de contrat soulève plus de problèmes qu'il n'en résout. L'appel aux capitaux privés – vous l'avez confirmé – aura pour contrepartie la rémunération des fonds investis. Celle-ci passe notamment par l'utilisation du domaine public à des fins commerciales, par la réalisation de baux commerciaux et par la délivrance d'autorisations de construction, sans que personne puisse évaluer la pertinence de l'occupation du domaine public. C'est un motif plus que suffisant – mais il y en a d'autres – de rejeter l'article dans sa rédaction actuelle.