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Intervention de Henri Emmanuelli

Réunion du 10 novembre 2009 à 9h00
Commission élargie des affaires économiques, de l’environnement et du territoire et des finances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Emmanuelli, rapporteur spécial pour la mission « Aide publique au développement :

Je ne partage pas tout à fait le même point de vue que Mme Aurillac. En effet, l'augmentation de ce budget n'est qu'apparente : elle tient pour l'essentiel, à l'intégration, consécutive à l'amendement dit « Charasse », des bénéfices de l'Agence française de développement, l'AFD, dans le périmètre de l'APD. A défaut, ce budget serait en stagnation, voire en diminution. La faible hausse des crédits s'explique en outre par l'augmentation du volume des prêts, dont on sait qu'ils sont davantage destinés aux pays émergents qu'aux pays les plus pauvres.

Mes premières questions porteront, monsieur le secrétaire d'État, sur le respect par la France de ses engagements.

Je vous rappelle tout d'abord que l'ancien Président de la République avait fixé pour objectif de porter en 2012 l'effort d'aide publique au développement à 0,7 % de notre revenu national brut. Or ce pourcentage n'a été que de 0,38 % du RNB en 2007, de 0,39 % en 2008 et de 0,44 % en 2009, mais avec la particularité que je viens de mentionner. En 2010, il devrait être à nouveau de 0,44 %, car la prudence invite à s'en tenir à l'hypothèse basse, les prévisions d'annulations de dette n'étant habituellement guère tenues et l'initiative pays pauvres très endettés (PPTE) devant prendre fin.

Même si l'objectif initial a été repoussé à 2015 par l'actuel Président de la République, on voit bien que la France s'en éloigne, tandis que le Royaume-Uni et l'Espagne accentuent leurs efforts dans la perspective de 2015.

Je souhaite donc tout simplement savoir quel est aujourd'hui l'objectif de la France à l'horizon 2015.

En 2005, la France, toujours par la voix du président Chirac, s'était engagée à accroître de 60 millions d'euros en trois ans ses contributions volontaires aux organismes des Nations unies. Pourtant, ces contributions n'ont significativement augmenté qu'en 2006. Depuis, non seulement les objectifs annuels n'ont été atteints, mais en 2010 leur montant – 53 millions d'euros – sera inférieur, à ce qu'il était en 2005 – 68 millions d'euros. On peut donc se demander si le Gouvernement juge utile l'action de ces organisations ?

Je souhaiterais également vous interroger sur l'aide consacrée à l'Afrique. Le Président de la République s'est engagé à consacrer à ce continent la moitié de l'aide publique bilatérale, mais qu'est-ce que cela signifie exactement ? Le concept géographique est large, puisqu'il inclut des pays émergents ou en passe de l'être comme l'Afrique du Sud et les pays du Maghreb. Le concept d'aide est très large aussi car, à l'exception de l'Irak, les annulations de dette portent essentiellement sur des pays africains.

En réalité, la faiblesse des crédits d'aide-projet, c'est-à- dire des subventions, qui sont le seul moyen d'encourager le développement des pays les plus pauvres dans des secteurs non rentables comme l'éducation, les transports et la santé, marque en soi un désengagement du développement de l'Afrique. C'est d'autant plus regrettable que d'autres grands pays s'engagent fortement en faveur de ce continent, en particulier la Chine, qui vient d'annoncer qu'elle lui consacrerait, sans contrepartie, 10 milliards de dollars.

En 2008, près de la moitié des autorisations d'engagement de l'aide-projet de l'AFD ont été gelées, si bien qu'un certain nombre de projets ont dû être abandonnés, comme l'a révélé l'ONG Oxfam. Finalement, vous avez décidé de sauver certains projets, en reportant sur 2009 les AE gelées en 2008. Tant mieux, mais on a tout de même perdu un an.

Pouvez-vous nous dire comment vous entendez soutenir réellement la réduction de la pauvreté en Afrique ?

Au sein de l'aide-projet, une enveloppe de 20 millions d'euros est consacrée à l'Afghanistan et au Pakistan. Elle est mise en oeuvre par la mission AFPAK gérée par le représentant spécial de la France en Afghanistan et au Pakistan, qui est désormais Thierry Mariani. N'y a-t-il pas là une confusion entre les intérêts militaires et stratégiques de la France et l'aide au développement ?

J'aimerais par ailleurs avoir des précisions quant à la stratégie de l'AFD, dont on a le sentiment qu'elle consiste actuellement en un rôle de banquier, en privilégiant son activité de prêts, au détriment de sa fonction de principal opérateur de l'aide au développement. Quels sont les objectifs que vous assignez à l'Agence ? Doit-elle se consacrer d'abord au développement des pays les plus pauvres ou à celui de sa propre activité ?

Enfin ne craignez-vous pas, madame la secrétaire d'État au commerce extérieur, une confusion entre le développement de l'activité de l'AFD dans les pays émergents et celui de la réserve pays émergents, la RPE, qui finance des projets opérés par des entreprises privées, qui sont néanmoins comptabilisés au titre de l'APD ?

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