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Intervention de Valérie Pecresse

Réunion du 9 novembre 2009 à 15h00
Commission élargie des affaires économiques, de l’environnement et du territoire et des finances

Valérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche :

Les entreprises de moins de 250 salariés ont reçu 22 % du CIR alors qu'elles ne représentent que 14 % des dépenses de R&D déclarées.

Je ne reviens pas sur l'analyse par secteurs.

Le comité stratégique des éco-industries – COSEI –, installé par les ministres de l'industrie et de l'écologie, a été chargé d'élaborer puis de suivre le plan Ecotech 2012, lancé en décembre 2008, pour faire de la France un pays leader dans les filières Ecotech. Son ambition est de générer 50 milliards d'activité supplémentaire, correspondant à 280 000 nouveaux emplois en 2020. L'évaluation à mi-parcours, en juillet 2009, a permis de constater que plus de la moitié des actions décidées étaient engagées.

En ce qui concerne la recherche, l'ANR a tenu ses engagements avec le nouveau programme Ecotech, qui représente quinze projets. Par ailleurs, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche participe à l'évaluation des futurs pôles de compétitivité Ecotech.

Nous avons fait, cette année, une petite révolution, monsieur Jardé, en faisant passer le doctorat du statut de diplôme à celui d'expérience professionnelle à part entière. C'est tout l'objet du contrat doctoral qui se substitue à l'allocation de recherche. Désormais, toutes les années de recherche effectuée dans le cadre d'une thèse et le grade obtenu à l'issue seront reconnus non seulement dans les secteurs académiques – les années de thèse compteront dans le calcul de l'ancienneté des jeunes chercheurs et des enseignants-chercheurs dans le cadre du chantier carrières, ce qui permettra les progressions de salaire que j'ai indiquées – mais également dans les secteurs administratifs : c'est la raison pour laquelle le ministère a demandé à tous les gestionnaires de corps administratifs de suivre l'exemple du corps des Ponts et chaussées et du corps des Mines, qui organisent désormais leur recrutement après la thèse en tenant compte des années de préparation de celle-ci.

Il reste la valorisation du doctorat dans les secteurs économiques : c'est l'objet du doublement du crédit d'impôt recherche – 60 % de défiscalisation pour les jeunes docteurs pendant cinq ans –, que je suis en train de populariser auprès des entreprises ; de la démarche « Pourquoi se priver des docteurs ? » engagée par l'association Bernard Gregory et le MEDEF ; de l'augmentation des contrats CIFRE de 16 % , et, enfin, du dispositif des doctorants-conseils qui permet aux doctorants d'effectuer des missions de conseil dans les entreprises et les administrations tout en faisant leur thèse en université ou dans un laboratoire de recherche.

Je suis consciente que la montée en puissance des financements de l'Agence nationale de la recherche conduit à une augmentation des contrats à durée déterminée, dont la durée est alignée sur celle des projets financés par l'ANR. Je rappelle, néanmoins, que ces contrats avaient été demandés lors des États Généraux de la recherche pour permettre de stabiliser l'emploi des post-doctorants. Cela étant, ils sont le plus souvent plus favorables que ceux du privé : ils sont en général d'une durée plus longue – pouvant atteindre quatre ou cinq ans – et le taux d'insertion des jeunes chercheurs à l'issue de ces CDD – soit dans un autre CDD, soit dans un emploi statutaire – est, d'après les premières évaluations réalisées par l'Agence, de 95 %, ce qui est une belle performance et prouve que ces contrats sont un bon marchepied pour entrer dans la carrière.

Nous souhaitons intégrer ces CDD. C'est pourquoi nous maintiendrons l'emploi dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, qui, selon l'engagement pris par le Premier ministre, ne seront touchés par la règle de non-remplacement d'un départ sur deux à la retraite ni en 2010, ni en 2011.

Nous souhaitons, pour donner du temps à nos chercheurs, simplifier la gestion des unités mixtes de recherche grâce à la délégation globale de gestion : l'hébergeur – qui, la plupart du temps, est l'université – assurera la gestion administrative entière des laboratoires, ce qui mettra fin aux trois systèmes d'information régissant les 600 UMR, ces dernières étant soumises à trois tutelles ou plus. Nous devons utiliser les pratiques de gestion les plus favorables pour ces unités mixtes : services facturiers, cartes achats, cartes affaires, délégation de signature aux directeurs de laboratoire. La généralisation de ces bonnes pratiques est un travail à la fois de fourmi et de titan mais on en mesure l'intérêt quand on sait – et je vous demande de répandre cette information – que 25 % des commandes du CNRS sont de moins de 100 euros et que le coût – complet – de traitement d'une commande CNRS est de 80 euros. Nous devons en finir avec la suradministration des laboratoires et passer à un régime de confiance – encadré. Mais cela relève de l'organisation des laboratoires et des établissements publics eux-mêmes Je ne peux que leur préconiser des bonnes pratiques et j'ai donc publié une circulaire pour généraliser celles-ci.

Dès janvier 2010, vingt laboratoires, réunissant en tout 1 000 chercheurs, expérimenteront ce système. Afin de généraliser celui-ci et d'assurer une vraie transparence de la gestion des UMR, nous les accompagnerons par des formations, une modernisation de la gestion et une optimisation du système d'information et des budgets en coût complet.

En 2009, les EPST ont bénéficié, monsieur Lasbordes, d'une mise en réserve allégée : les crédits de fonctionnement des organismes de recherche ont été gelés à hauteur de 2,5 % et leur masse salariale à hauteur de 0,25 %, ce qui est un régime dérogatoire du droit commun. Les EPIC, eux, sont restés dans le droit commun.

Nous sommes actuellement en discussion avec Bercy pour que les EPST bénéficient d'une mise en réserve comparable en 2010 parce que c'est une année primordiale pour la réforme de la recherche. Si la représentation nationale veut nous appuyer pour que le même régime soit appliqué aux EPIC, nous ne sommes évidemment pas défavorables à l'idée.

Les annulations de crédits qui ont frappé le CNES au cours de l'année 2009 ont été compensées par les produits de cessions de Spot Image et par un bonus fiscal. La tenue du contrat s'apprécie sur quatre ans, la fin de celui devant intervenir en 2010, mais, comme nous sommes encore en discussion avec Bercy sur la fin de gestion 2009, je ne puis vous donner aucun élément à ce sujet aujourd'hui.

Les IHU – instituts hospitalo-universitaires –, monsieur Paul, ont deux objectifs : développer l'excellence de la recherche dans nos meilleurs CHU – je vous renvoie à ce sujet à la loi relative à l'hôpital – et favoriser la coopération public-privé, pour couvrir tout le spectre de la recherche, du laboratoire aux innovations thérapeutiques. Je suis au regret de vous dire que tous les rapports parus en France comme à l'étranger montrent que notre système pèche de ne pas avoir des lieux de ce qu'on appelle la recherche translationnelle, c'est-à-dire réunissant recherche publique et recherche privée.

Le Président de la République a proposé la création de cinq IHU en 2010 après appels à projets et décision par un jury international. Nous devons être très sélectifs pour faire émerger les meilleurs instituts. J'attends les recommandations de la mission que j'ai confiée au professeur Marescaux en phase 2 concernant le financement des IHU par le grand emprunt.

M. Christian Estrosi s'est saisi de la question du pillage des brevets par certaines grandes entreprises internationales qui rachètent des PME françaises innovantes pour récupérer leurs brevets, leur savoir-faire et leurs clients avant de fermer le site français en refusant les repreneurs potentiels. Cette question, qui dépasse la simple question du crédit d'impôt recherche, est à l'ordre du jour des États Généraux de l'industrie, qui ont été ouverts le 15 octobre dernier.

Je ferai part de votre intervention à M. Christian Estrosi, monsieur le député, mais sachez que je suis déjà intervenue auprès du Fonds stratégique d'investissement en faveur de PME particulièrement innovantes que mon ministère connaît pour avoir participé à leur création et qui étaient en péril d'être rachetées parce que les « capitaux-risqueurs » voulaient se désengager – ce qui est typiquement le cas au bout de cinq à six ans de développement d'un brevet. Nous travaillons actuellement sur ce sujet. Le FSI répond très favorablement quand nous lui demandons d'investir en capital dans des start-up innovantes. Le Président de la République a, d'ailleurs, indiqué que le FSI aurait une obligation d'investissement dans des petites et moyennes entreprises au cours de l'année qui vient. Il ne reste plus qu'à souhaiter que ces PME soient innovantes.

Nous avons signé, cette année, monsieur Chassaigne, un contrat avec l'IFREMER qui garantit les moyens de cet institut sur le long terme. D'un montant de 2,7 millions d'euros, correspondant à une augmentation des crédits de 1,8 %, ce contrat est en prise avec les attentes de la société et les orientations du Grenelle de l'environnement puisqu'il est prévu de travailler sur les énergies marines, les économies de carburant pour la flotte, la filière ostréicole et la coordination de la recherche sur les sciences de la mer, avec la création, à terme, d'une Alliance des sciences de la mer à laquelle nous voulons confier la gestion de la flotte. Je considère, en effet, que la flotte est une très grande infrastructure de recherche, actuellement très mal gérée, dont le fonctionnement mérite d'être optimisé.

Dans les trois cas que vous avez cités, monsieur Chassaigne – les recherches OGM de l'INRA à Colmar, les expertises sur les huîtres d'Arcachon par l'IFREMER et la question des déchets nucléaires à Cadarache – l'information et la transparence sont devenues cruciales.

À Colmar, on ne peut que regretter qu'une démarche exemplaire du point de vue de la concertation sur le court-noué, qui avait donné lieu à un consensus local exceptionnel et qui correspondait à l'amendement que vous aviez présenté dans le cadre de la loi Grenelle, se voie ruinée par l'action de fanatiques jusqu'au-boutistes qui n'avaient sans doute pas participé à la concertation. Cela ruine complètement l'équilibre qui avait été trouvé dans la loi Grenelle, par lequel nous nous déclarions favorable au renforcement de la précaution à condition que les chercheurs puissent travailler dans la sérénité. La recherche sur les OGM est une question de souveraineté nationale car, sans elle, nous ne pouvons pas connaître l'impact de ces organismes sur l'environnement et sur la santé.

Je regrette également l'agressivité dont ont été victimes les experts de l'IFREMER. Si leur expertise est contestée, il existe des procédures pour le faire valoir. La violence n'est pas de mise dans ce domaine.

Concernant l'incident survenu à Cadarache, le CEA doit, à l'évidence, agir en toute transparence. En tout cas, ce n'est pas une question de budget mais davantage d'approche. Comme vous l'aurez remarqué, j'ai souhaité, dans la stratégie nationale de recherche et d'innovation comme dans les conseils d'administration des organismes, permettre aux associations porteuses d'enjeux de se faire entendre.

La Cité des Sciences et le Grand Palais sont en train de fusionner, chaque établissement gardant cependant sa vocation propre. Cela va devenir le haut lieu de la diffusion de la culture scientifique, monsieur Garrigue. La Fête de la Science, avec les trois prix « le goût des sciences » que nous allons créer, va participer à cette diffusion. Je remettrai samedi les prix « le goût des sciences » au livre de vulgarisation, à l'action de communication et à l'initiative de vulgarisation les plus prometteurs. Il est important que nous travaillions à rapprocher les scientifiques de la société et à ouvrir les portes des laboratoires pour redonner confiance à nos concitoyens dans le progrès.

Une ministre franco-allemande de la recherche est un beau rêve. Cela étant, nous avons créé, sous la présidence française, un outil très précieux, à 100 000 lieues de la bureaucratisation du programme cadre : la programmation conjointe pour Alzheimer. Ce produit purement intergouvernemental, donc purement politique, fonctionne très bien puisqu'il regroupe maintenant 21 projets, sous la direction d'un Français : le professeur Amouyel. C'est une grande satisfaction. Nous devons étendre la programmation conjointe aux domaines de l'énergie, des batteries électriques et du cancer. Cet outil permet de programmer ensemble nos efforts de recherche, avec des appels à projets, de ne pas doublonner les travaux de nos laboratoires et de choisir les meilleurs. C'est essentiel.

Le taux d'admission au Conseil européen de la recherche pour les jeunes étant de 4 % – ce qui est un indice de la qualité des admis –, j'ai souhaité dispenser tous ceux qui étaient sur la liste complémentaire, c'est-à-dire les admissibles non admis, de redéposer un dossier à l'ANR et les faire bénéficier automatiquement des programmes jeunes chercheurs de l'ANR, afin de mettre fin à la « dossiérite » aiguë dont souffre la recherche française.

Je suis très favorable à la révision des politiques publiques en matière d'innovation, mais j'ajouterai à la liste impressionnante que vous avez citée, monsieur le rapporteur, les politiques régionales d'innovation qui doivent, elles aussi, passer par des guichets multiples.

Concernant le logement étudiant, monsieur Birraux, nous voulons aller plus vite et plus fort et, pour ce faire, nous faisons feu de tout bois. Comme vous l'avez remarqué, j'ai « sauté » sur les casernes d'Hervé Morin. Le patrimoine militaire étant, en général, en très bon état, la reconversion des logements est très rapide. Nous explorons également la piste des logements modulaires qui font florès dans les pays nordiques et aux Pays-Bas : cinq résidences modulaires sont en chantier. Les chantiers Bénéteau travaillent avec nous sur du logement modulaire en bois. L'architecte Jean-Michel Wilmotte m'a proposé de construire des résidences flottantes, en cabines de bateau, dans les endroits où il n'y pas de foncier. Il paraît qu'au Pays-Bas, cela marche très bien et que l'ambiance y est très bonne.

J'ai déjà répondu sur l'Institut Pasteur ainsi que sur les alliances. Je vous remercie de souhaiter que se taisent les Cassandres qui ne cessent de prédire l'échec des politiques de réforme du Gouvernement. C'est, là aussi, une belle utopie.

En plus de 29 projets très concrets issus de la stratégie nationale de recherche et d'innovation, j'ai soutenu, devant la commission présidée par M. Alain Juppé et M. Michel Rocard, cinq principes concernant le grand emprunt, monsieur Le Déaut.

J'ai soutenu que la recherche fondamentale était un choix politique que le grand emprunt devait soutenir dès lors que cette recherche est au meilleur niveau d'excellence. Le retour sur investissement prévu par la commission du grand emprunt doit s'apprécier, non pas au sens purement financier du terme – c'est-à-dire sur la capacité des laboratoires à générer des flux financiers leur permettant de rembourser le grand emprunt au bout de cinq ou dix ans –, mais au sens de Stiglitz, c'est-à-dire en tenant compte également des progrès pour la société. Je prends un exemple : une recherche fondamentale dans le domaine des sciences du vivant qui se traduit par un allongement de la durée de la vie a des répercussions financières positives qu'il faudrait être capable de chiffrer.

J'ai également soutenu que les projets financiers devaient s'inscrire, chaque fois que cela était possible, dans un cadre partenarial entre recherche publique et recherche privée, entre sciences humaines et sciences exactes, entre organismes de recherche et universités afin de décloisonner la recherche. Ces projets doivent intégrer la dimension de valorisation du transfert depuis la preuve de concept jusqu'au développement de marché.

J'ai aussi soutenu que le grand emprunt, s'il finance les investissements aux grandes infrastructures de recherche en plateformes de recherche partenariale, doit permettre de couvrir également les frais de fonctionnement. Ces derniers sont souvent oubliés et viennent ensuite grever, au grand désespoir de nos chercheurs, les budgets des organismes de recherche. Ces projets doivent s'intégrer dans le nouveau paysage de la recherche et de l'enseignement supérieur sans créer de nouvelles structures. Je crois avoir été entendue sur ce point.

Je vous ai répondu sur les campus.

Le démonstrateur de biomasse de deuxième génération a été annoncé, il y a trois semaines, par l'ADEME. Nommé Bio-T-Fuel, il sera opérationnel en 2013.

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