rapporteur pour avis de la Commission des lois, sur les programmes « Justice judiciaire » et « Accès au droit et à la justice ». Les crédits de la mission « Justice » augmentent, cela a été dit. L'essentiel de cette hausse est lié au programme « Administration pénitentiaire », ce dont je me félicite. Les augmentations des crédits des programmes concernés par mon rapport sont plus modérées. Ainsi, ceux du programme « Justice judiciaire » progressent de 0,6 % et ceux des deux programmes de soutien de 0,5 %. Quant à ceux du programme « Accès au droit et à la justice », ils sont en baisse apparente de 7,2 %.
Même si elle suit son cours normalement, la réforme de la carte judiciaire suscite des inquiétudes au sein du corps judiciaire. On s'interroge sur la charge qu'elle peut entraîner pour le budget de l'Etat. En présence du Premier président de la Cour des comptes, M. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour, a d'ailleurs indiqué à la Commission des lois que la réforme représentera dans un premier temps une charge nette pour le budget de l'État, sans pouvoir préciser expressément ni le montant ni la durée de ce surcoût. Il a envisagé une période comprise entre cinq et dix ans. Je souhaitais, madame la garde des sceaux, appeler votre attention sur cette inquiétude persistante.
Je tiens aussi à revenir sur les modalités de l'accompagnement social de la réforme. A ce sujet, mon attention a été appelée sur le fait que les fonctionnaires des départements de la petite couronne parisienne, affectés par la fermeture de leur tribunal, ne percevraient ni les primes d'aide à la mobilité du conjoint ni les primes de restructuration de service. Qu'en est-il ?
Je vous interrogerai ensuite sur l'Ecole nationale de la magistrature, un sujet qui m'est cher. Une réforme de l'Ecole a été décidée à la suite des conclusions rendues par la commission d'enquête parlementaire chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l'affaire d'Outreau. Cette réforme est en cours, mais je m'interroge sur le nombre des recrutements : la promotion 2006 de l'ENM comptait 286 auditeurs de justice ; celle de 2009 n'en compte que 141. Ces recrutements ne suffiront pas à compenser les départs à la retraite des magistrats, estimés à quelque 300 chaque année à l'horizon 2014. Qu'en pensez-vous, madame la garde des sceaux ?
Par ailleurs, la masse salariale des auditeurs de justice figurera en 2010 au budget de la mission « Justice » et non plus au budget de l'ENM. Celle-ci perd donc la maîtrise de ses finances ; et si cela concerne aussi les frais de déplacement, cette évolution ne risque-t-elle pas d'avoir une incidence sur la pédagogie de l'ENM ?
Mes questions suivantes portent sur la situation des fonctionnaires des services judiciaires. Au cours des auditions, mon attention a été à nouveau appelée sur la réduction de leur effectif : on est passé pour la première fois sous le seuil de 2,5 fonctionnaires – toutes catégories confondues – pour un magistrat, avec un ratio de 2,46 en 2009. Or, tout magistrat doit pouvoir s'appuyer sur les fonctionnaires des services judiciaires, avec lesquels il forme équipe, et qui jouent un rôle essentiel dans le fonctionnement de la justice. Sans fonctionnaires, aucun magistrat ne peut prendre de décision.
Pourtant, l'effectif des fonctionnaires de catégorie B stagne. Quant à celui des fonctionnaires de catégorie C, il baisse, alors qu'ils accomplissent un travail d'exécution indispensable. Il est nécessaire d'en recruter, et aussi de revaloriser leur situation, ce qui me conduit à évoquer à nouveau la question des primes.
Le principe d'une prime au mérite modulable, est entré en vigueur. Cette prime vaut pour les magistrats et pour les fonctionnaires des services judiciaires, mais même si l'on tient compte du degré de responsabilité exercé par les uns et par les autres, force est de constater la très forte différence des primes respectivement perçues par les magistrats et par les fonctionnaires concernés. Cette situation, parfois très mal vécue, peut susciter de graves difficultés au sein des équipes, voire mettre le travail en péril. Il semble par ailleurs que les fonctionnaires en congé de formation ne bénéficient pas de ces primes. On peut le comprendre, mais cela a pour effet pervers de ne pas inciter les fonctionnaires judiciaires à se former.
Il apparaît aussi que beaucoup d'heures supplémentaires ne seraient pas payées aux fonctionnaires des services judiciaires et que leur compte épargne-temps ne peut être alimenté que de dix jours par an. Qu'en est-il ? Et qu'en est-il des frais de déplacement qui semblent être remboursés très tardivement ?
J'en viens à l'intégration des salariés d'avoués, pour vous demander, madame la garde des sceaux, si les 190 ETPT sont bien inclus dans le plafond d'emplois figurant dans le projet annuel de performance. Cela semble être le cas ; toutefois, les salariés d'avoués n'apparaissent pas dans le tableau des entrées et des sorties du bleu du ministère des finances ? Qu'en est-il ? Par ailleurs, comment ces salariés seront-ils recrutés ? S'agira-t-il d'un concours réservé, de recrutements sur dossier, ou d'autres modalités ?
Je constate par ailleurs que les frais de justice, après avoir été maîtrisés au cours des années précédentes, augmentent à nouveau. M. le président Migaud et M. le président Warsmann l'ont indiqué, plusieurs cours d'appel sont dans l'impossibilité d'honorer ces factures.
Je conclurai en traitant de l'aide juridictionnelle. Les crédits qui lui sont affectés sont en baisse apparente mais vous nous avez indiqué, madame la ministre, que cette dotation serait en réalité stable puisqu'il est prévu de doubler le rythme des rétablissements de crédits et de les porter ainsi à 24 millions en 2010. Mais, au-delà de la stabilité ainsi rétablie, une augmentation de 3 % de l'aide juridictionnelle devrait être prévue l'an prochain si l'on s'en tient aux données figurant au projet annuel de performances. Je sais qu'une réflexion est engagée sur la réforme de l'aide juridictionnelle ; quelles sont les pistes privilégiées ?