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Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 3 novembre 2009 à 12h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, Rapporteur général :

Ce projet de décret d'avance, le deuxième de l'année 2009, ouvre et annule 250 millions d'euros de crédits sur le compte spécial Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres, qui porte le dispositif de « bonus-malus » et 406,1 millions d'euros d'AE et 327,6 millions d'euros de CP sur cinq missions et sept programmes du budget général.

Sur le budget général, les ouvertures de crédits visent, pour la plupart, à faire face à des problèmes habituels à ce stade de l'année. En premier lieu, 227,8 millions d'euros concernent les opérations extérieures de la Défense (OPEX). En dépit de l'accroissement de la provision constituée en loi de finances initiale (510 millions d'euros en 2009), les dépenses liées aux OPEX ne cessent d'augmenter, atteignant près de 873 millions d'euros cette année. Cette ouverture de crédits est compensée par des annulations à due concurrence sur le programme Équipement des forces. Toutefois, ce gage est susceptible de s'avérer purement fictif, dès lors que les crédits annulés risquent d'être rétablis dans le collectif budgétaire de fin d'année. C'est alors le budget général dans son ensemble qui financerait les OPEX, tandis que le volume des crédits militaires reportés d'un exercice sur l'autre augmenterait de nouveau.

La prise en charge des demandeurs d'asile, pour laquelle le décret ouvre 70,1 millions d'euros d'AE et 60,4 millions d'euros de CP, constitue également une difficulté récurrente. Il s'agit de couvrir deux types de dépense : l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile hors centres d'accueil et l'allocation temporaire d'attente (ATA). Au total, ces deux dispositifs coûteraient près de 136 millions d'euros en 2009, à comparer à 60 millions d'euros prévus dans la loi de finances initiale. Ce surcoût s'explique par un double effet : une augmentation des flux de demandeurs d'asile ; un allongement des délais de traitement des dossiers par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), délais qui ont atteint au premier semestre respectivement 121 jours et 465 jours en moyenne. Le nombre de bénéficiaires de l'ATA en 2009 est supérieur à 16 000, soit plus du double des prévisions initiales. Quant aux places d'hébergement d'urgence à financer, elles s'élèvent à plus de 9 500, au lieu de 2 700 prévues dans la loi de finances initiale.

Par ailleurs, le décret d'avance ouvre des crédits sur la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales à un double titre : le traitement des conséquences sanitaires d'une pollution environnementale survenue dans le département de la Loire en août 2008 (8,4 millions d'euros d'AE et de CP) ; la poursuite du soutien à la filière bois dans le cadre de la prise en charge des conséquences de la tempête Klaus de janvier 2009 (43,8 millions d'euros d'AE).

L'organisation de la campagne de vaccination contre la grippe A nécessite, quant à elle, une ouverture de crédits de 25 millions d'euros sur le programme Coordination des moyens de secours, qui a déjà bénéficié de 15 millions d'euros versés depuis la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles par décret du 21 octobre dernier. Le coût global de la grippe A est considérable puisque, sans même évoquer les effets indirects sur la vie économique, on estime à plus d'un milliard d'euros les dépenses liées à cette pandémie, charge à répartir entre l'assurance maladie et l'État. S'y ajoutent les frais supportés par les collectivités territoriales, par exemple pour acquérir des masques de protection.

Dernière ouverture sur le budget général prévue dans le décret, les AE du programme Presse seraient majorées de 25 millions d'euros, afin de compléter le financement de l'aide exceptionnelle en faveur des diffuseurs de presse. Cette aide s'inscrit dans l'ensemble de mesures annoncées en janvier 2009 à l'issue des états généraux de la presse écrite. Les crédits viennent s'ajouter aux 150,8 millions d'euros d'AE et de CP déjà ouverts par la loi de finances rectificative du 20 avril 2009. Comme souvent avec ce type de dispositif, le coût de l'aide a été initialement sous-évalué, faute de définition précise des diffuseurs de presse susceptibles d'en bénéficier. Alors que cette aide devait concerner environ 7 000 diffuseurs de presse (soit une enveloppe de crédits de 27,6 millions d'euros), environ 14 500 bénéficiaires apparaissent aujourd'hui éligibles. C'est, une fois de plus, la preuve des insuffisances des évaluations préalables.

Ces différentes ouvertures de crédits sur le budget général sont strictement compensées par des annulations d'AE et de CP sur 22 missions et 42 programmes du budget général. Les crédits annulés ne sont pas majoritairement des crédits figurant dans la réserve de précaution, mais plutôt des crédits devenus « sans objet » en cette fin de gestion budgétaire. On doit regretter que l'« auto-financement » par les missions ou ministères bénéficiaires d'ouvertures de crédits soit très insuffisamment pratiqué, a fortiori si le ministère de la Défense obtient, dans la prochaine loi de finances rectificative, la réouverture des crédits d'équipement annulés par le décret.

Enfin, 250 millions d'euros de crédits supplémentaires seraient ouverts au titre du « bonus » automobile. Il faut rappeler que la prévision budgétaire relative au compte Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres s'était déjà montrée gravement défaillante en 2008 : alors qu'il était censé être équilibré, le bonus-malus s'était soldé par un déficit de 214 millions d'euros. En 2009, les dépenses excèdent largement les prévisions, en raison notamment de l'impact de la « prime à la casse » décidée dans le cadre du plan de relance de l'économie. Les ouvertures de crédits correspondantes sont compensées par des annulations de 250 millions d'euros de crédits prévus au titre des prêts à la filière automobile du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés. Toutefois, comme il faut également s'attendre cette année à de sérieuses moins-values de recettes apportées par le « malus » automobile, l'équilibre budgétaire devrait être dégradé en exécution : le compte Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres pourrait être déficitaire de près de 530 millions d'euros, alors que la loi de finances initiale tablait sur un déficit limité à 161 millions d'euros. Pour 2010, il est également très probable que les recettes tirées du « malus » se révèleront inférieures au montant attendu (213 millions d'euros). L'expérience de 2008 et 2009 montre que le bonus-malus automobile, faussement présenté comme un dispositif ayant vocation à s'équilibrer de lui-même, s'analyse finalement en une dépense budgétaire pure et simple.

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