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Intervention de François de Rugy

Réunion du 9 décembre 2008 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2008 — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Vous pouvez relire les comptes rendus intégraux des débats de cette époque, monsieur le ministre ! Nous avions été plusieurs à évoquer les problèmes naissants de l'immobilier aux États-Unis et à suggérer qu'ils ne manqueraient pas d'apparaître également en France et d'y avoir des conséquences économiques et financières, même si, je le reconnais, nous n'avions pas imaginé qu'elles puissent être d'une telle ampleur et s'accompagner d'une telle brutalité.

On ne peut également que déplorer vos choix économiques et budgétaires depuis l'élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République.

En effet, en juillet 2007, quelques semaines seulement après l'élection présidentielle et les élections législatives, votre première action a été de soumettre à notre assemblée le projet de loi Travail emploi et pouvoir d'achat, rebaptisé à juste titre, et pas seulement par les députés de l'opposition, « paquet fiscal ». Je le répète : ce fut votre première grande décision politique et économique.

Son impact fiscal et surtout budgétaire a été très important, chacun reconnaissant qu'il a représenté une baisse de quelque 15 milliards d'euros de recettes fiscales – et une hausse équivalente des dépenses –, dans une période de déficit budgétaire déjà particulièrement élevé. Vous pouvez le contester, vous serez le seul ! Monsieur de Courson, vous avez rappelé que, depuis quinze ans, vous avez toujours défendu l'orthodoxie budgétaire ou, du moins, préconisé la lutte contre les déficits qu'on laisse filer. Je regrette, mon cher collègue, que, lors de l'examen du texte sur le « paquet fiscal », vous n'ayez pas souligné avec plus de force, notamment en commission, qu'il s'agissait d'un projet de loi irresponsable d'un point de vue financier et économique. Il est dommage qu'à l'époque vous ne soyez pas allé jusqu'au bout de votre compte : cela aurait permis de clarifier le débat.

Le Gouvernement est bien obligé de reconnaître aujourd'hui – nous avions déjà eu ce débat lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2009 –, que le déficit de l'État s'est creusé d'environ 13 milliards d'euros, somme équivalente, à peu de choses près, au coût du paquet fiscal et ce, rappelons-le, avant le déclenchement de la crise financière mondiale.

Les mesures prévues par le paquet fiscal entraînaient des pertes de recettes fiscales directes par le biais du bouclier fiscal, des exonérations de droits de succession sur les très gros patrimoines ou encore des exonérations de cotisations ou d'impôt sur les heures supplémentaires. Lorsque nous vous avions interpellé sur ce sujet, vous nous aviez rétorqué, votre collègue Mme Lagarde et vous-même, que cela entraînerait par ailleurs un surcroît d'activité économique qui à son tour générerait des recettes fiscales supplémentaires.

L'heure du bilan a sonné et, malheureusement pour les finances de l'État, autrement dit pour les Français qui devront bientôt payer la facture, votre calcul s'est révélé totalement inopérant. Ce qui devait arriver est arrivé : non seulement le déficit s'est creusé à cause des pertes de recettes directement imputables au paquet fiscal mais encore, avec le ralentissement de l'activité, vous avez sans cesse dû réviser à la baisse les rentrées de TVA ou d'impôts sur le revenu ou sur les sociétés. Et cette évolution n'a rien à voir avec la crise financière qui vient de se déclencher.

L'inconvénient, et non des moindres, c'est que les mesures prévues par le paquet fiscal arrivaient complètement à contretemps. Nous vous avions également prévenus, en juillet 2007, et vous de nous répondre que nous nous trompions. Or le bilan, aujourd'hui, est malheureusement on ne peut plus évident : non seulement vous avez toujours refusé de prendre en compte l'aggravation des injustices engendrées par le paquet fiscal, mais vous avez refusé d'ouvrir les yeux sur l'inefficacité économique de ces mesures.

Aujourd'hui, avec plus d'un an de recul, pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, quelle est l'efficacité économique du bouclier fiscal, quelle est l'efficacité économique de l'exonération des droits de succession sur les plus gros patrimoines ? J'ai déjà dit ce que nous pensions de la « justice sociale » de ces mesures ; je n'y reviens pas pour ne parler que d'efficacité économique. Pour résumer, vous avez distribué du pouvoir d'achat à ceux qui n'en ont aucunement besoin ; alors que vous refusiez de revaloriser les salaires, les retraites ou les prestations sociales, vous avez distribué des chèques-cadeaux aux plus riches. Vous avez interpellé nos collègues pendant qu'ils expliquaient leur vote en soutenant que vous avez ainsi engagé une relance par la demande et par le pouvoir d'achat. Pouvez-vous donc continuer de nous soutenir que le bouclier fiscal, l'exonération des droits de succession sont utiles pour le pouvoir d'achat ? Vous savez fort bien qu'il n'en est rien.

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