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Intervention de Luc Chatel

Réunion du 27 octobre 2009 à 9h00
Commission élargie

Luc Chatel :

ministre de l'éducation nationale. M. Schneider a commencé par évoquer la lutte contre les inégalités. Un élève de seconde, s'il est enfant d'ouvrier, a cinq fois moins de chances d'être trois ans plus tard – seulement ! – en classe préparatoire que son voisin enfant de cadre. Et si 16 % des parents d'élèves de sixième sont des cadres, contre 55 % qui sont employés ou ouvriers, la proportion est exactement inverse en première année d'université. L'égalité des chances est donc pour nous un enjeu prioritaire.

Depuis trente ans, nous avons réussi la massification du système éducatif. L'école accueille tous les enfants de France. Il faut maintenant garantir la réussite de chacun d'entre eux. Pourquoi est-il tellement question aujourd'hui de décrochage alors qu'on n'en parlait pas il y a trente ans ? Parce que ces élèves n'étaient pas au lycée ! Lorsque seulement 25 % d'une classe d'âge allait jusqu'au bac, les autres trouvaient du travail avant. L'éducation nationale qui accueille l'ensemble de ces jeunes doit donc s'adapter. Nous devons conserver un système élitiste, qui conduise à l'excellence, mais qui donne aussi une solution à chacun.

C'est tout l'enjeu de notre réforme du lycée. Nous sommes partis de la situation observée : le problème aujourd'hui, c'est 50 000 élèves qui arrêtent avant le bac et un étudiant sur deux qui échoue en première année d'enseignement supérieur. Il est vrai qu'un élève qui n'a pas véritablement été l'acteur de son orientation se retrouve souvent en situation d'échec. Nous voulons donc mieux préparer les élèves, grâce à un parcours d'orientation choisi plutôt que subi. Il faut passer d'un système couperet à un système progressif et réversible. Le droit à l'erreur doit exister en matière d'orientation. Nous voulons que les élèves et les parents qui ne savent pas se débrouiller dans les arcanes du système d'orientation, généralement vécu comme une épreuve, puissent avoir un guide qui les accompagne dans leurs choix. Et nous voulons aussi rapprocher le lycée de l'enseignement supérieur, parce qu'un élève qui entre à l'université sans y avoir été préparé subit un véritable électrochoc.

L'apprentissage des langues constitue une autre priorité. Je ne me résigne pas à ce que notre pays soit 69e sur 109 au classement TOEFL. Nous allons donc mobiliser des moyens sans précédent au lycée pour que les lycéens puissent sortir bilingues, et certains trilingues dans les filières littéraires. Nous allons mettre en place des cours de littérature étrangère et des enseignements directement en langue étrangère. Les élèves seront divisés en groupes de compétences de niveaux homogènes – l'expérimentation a montré que cela donnait des résultats. Nous allons aussi, avec les régions, généraliser l'usage des techniques de communication modernes qui assurent un degré d'assimilation beaucoup plus élevé dans l'apprentissage des langues. Un cadre national permettra à chaque établissement de nouer un partenariat avec un collège ou un lycée étranger – et l'on revient ici à la lutte contre les inégalités : tous les élèves n'ont pas des parents qui les envoient un mois à l'étranger. Il y a donc une véritable mobilisation en faveur des langues.

La baisse des crédits pédagogiques dans le premier degré est simplement liée à la mastérisation et à la disparition des stagiaires dans le budget de 2010.

Quant au rôle des parents, je pense qu'à l'école chacun doit remplir sa mission. Il n'est pas question, par exemple, que les lycéens s'occupent d'établir les programmes du lycée, comme le demandait un de leurs syndicats ! Les parents ont évidemment un rôle majeur. Ils participent déjà à la vie des établissements, notamment en tant que membres du conseil d'administration, mais nous souhaitons qu'ils trouvent toute leur place dans un lycée qui deviendrait un lieu d'ouverture sur l'extérieur, et sur le monde de la culture notamment. On peut penser à la mise en place d'un cinéclub auquel les familles seraient associées… Mais leur rôle est différent de celui des enseignants, qui doivent assumer intégralement leurs propres missions.

Mme Martinel m'a interrogé sur les moyens de l'éducation nationale. C'est le premier budget de l'État. Jamais il n'aura été aussi élevé, en valeur absolue. Il connaît une augmentation de 1,56 % dans un contexte extrêmement contraint. C'est donc une priorité dans la politique du Gouvernement. Je rappelle que les 16 000 suppressions de postes s'effectuent à taux d'encadrement constant. Le nombre d'élèves par classes ne change pas : 25,8 élèves en préélémentaire et 22,6 en élémentaire, 24,1 élèves par division au collège, 19,1 en lycée professionnel et 28,4 en lycée d'enseignement général. J'ajoute qu'ils effectuent un tiers de leur emploi du temps en demi-groupes.

C'est ce non-renouvellement d'un poste sur deux qui nous permet de mener une politique très volontariste en matière de revalorisation, et aussi de proposer de nouveaux services, comme l'aide personnalisée, qui représente deux heures par semaine en primaire. Au collège, 800 000 élèves en bénéficient. C'est la réponse aux « orphelins de seize heures » : désormais, 40 % des collégiens, et leurs familles, ont une solution. Ils sont pris en charge de seize à dix-huit heures pour du soutien scolaire, du sport ou des activités culturelles.

Pour ce qui est de la répartition entre public et privé, nous respectons scrupuleusement la proportion des élèves, qui est de 20 % pour le secteur privé. C'est le taux qui est appliqué, dans le premier comme dans le second degré, depuis 2004. Cela se traduit, pour la rentrée 2010, par une réduction de 1 400 emplois, la suppression de la totalité des emplois de stagiaire, remplacés par des enseignants nouvellement recrutés, et la création de 476 emplois. C'est une stricte application de la règle de parité.

Contrairement à Mme Martinel, jamais un hommage rendu aux enseignants ne pourra me paraître ridicule. Les enseignant font un métier difficile. Nous les formons, nous leur proposons une affectation mais, ensuite, nous les laissons beaucoup trop seuls. Cela explique une bonne partie de nos mauvais résultats. Les enseignants ont besoin d'être soutenus et accompagnés, tout au long de leur parcours. M'étant, dans une autre vie, occupé de ressources humaines, c'est le devoir que je me fixe. Et je n'ai pas l'impression qu'une prime équivalant à un treizième mois, en cette période de crise, soit une insulte en matière de revalorisation. Car il ne s'agit pas de donner une prime pour trois mois, mais de modifier l'ensemble du début de carrière.

Quant à l'accueil des enfants handicapés, nous y consacrons 292 millions. Certes, ce ne sera jamais suffisant, et il y a encore beaucoup à faire. Mais je voudrais souligner le travail remarquable qui a été fait depuis cinq ans. La loi de 2005 a permis un changement radical. Depuis 2005, l'école accueille 40 % d'élèves handicapés supplémentaires – 185 000 en cette rentrée. Nous créons en cette rentrée 200 unités pédagogiques et 5 000 postes d'auxiliaire de vie scolaire individuel. Par ailleurs, pour éviter les difficultés que cause la fin de contrat d'un auxiliaire qui accompagnait un enfant depuis plusieurs années, j'ai signé avant la rentrée une convention permettant au monde associatif de reprendre ces contrats. Enfin, nous avons créé et pérennisé 1 500 postes en RASED.

Pour ce qui est du bilan des réformes engagées, je dois dire que l'évaluation est un souci permanent du ministère. Nous disposons de deux inspections générales de grande qualité, celle de l'éducation nationale et celle de l'administration de l'éducation nationale, qui suivent entre autres les effets des lois ou dispositions nouvelles.

Le nouveau service public de l'orientation, qui résulte d'un amendement parlementaire dans le projet de loi sur l'orientation professionnelle, sera une grande avancée. D'abord, il était important que l'État considère que l'orientation constitue un véritable service public. Ensuite, il fallait clarifier et coordonner l'intervention des très nombreux acteurs de ce domaine – différents ministères au sein de l'État, les collectivités locales mais aussi d'autres organismes. Les familles sont aujourd'hui tellement perdues dans les méandres du système, je le constate en tant que maire, que nous n'aurons pas grand'peine à l'améliorer.

Je tiens également à vous donner certaines garanties.

Tout d'abord, l'ONISEP restera sous la tutelle de l'éducation nationale. Les conseillers d'orientation et les plateformes d'orientation de l'ONISEP telles que celle qui a été expérimentée dans l'académie d'Amiens seront généralisés. Il s'agit là d'un outil formidable pour informer les familles des différents métiers possibles.

En matière d'éducation prioritaire, deux types de réseaux existent depuis 2006 : les réseaux « ambition réussite », qui concernent 281 000 élèves du premier degré et 118 000 du premier cycle de second degré, soit 25 lycées, 254 collèges et 1 710 écoles et 11 collèges privés, et les réseaux de réussite scolaire, qui concernent environ 700 000 élèves du premier degré et 395 000 du second degré, soit 5 259 écoles et 851 collèges. Les moyens consacrés à l'éducation prioritaire, en augmentation dans le cadre du budget 2010, s'élèvent à 1,204 milliard d'euros. Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit également 278 millions d'euros pour l'accompagnement éducatif que nous avons mis prioritairement en oeuvre dans le système de l'éducation prioritaire.

Pour ce qui concerne enfin le sport à l'école, je vous rappelle que, dans le cadre de l'accompagnement éducatif, nous proposons notamment aux élèves des collèges un renforcement du temps consacré l'éducation physique et sportive, qui vient s'ajouter à ce qui existe aujourd'hui. Le volume de crédits prévus au titre de l'éducation physique et sportive est, je le rappelle, de 3,3 milliards d'euros.

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