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Intervention de Marie-Hélène Amiable

Réunion du 27 octobre 2009 à 9h00
Commission élargie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Hélène Amiable :

Le groupe GDR déplore les conditions dans lesquelles ce budget est examiné cette année. Chaque groupe ne disposera que de cinq petites minutes d'explications de vote en séance publique, le reste des travaux se faisant au sein de cette commission élargie, avec une publicité moindre. S'agissant du premier budget de l'État, ce n'est pas acceptable : en 2000, par exemple, son examen s'était étalé sur deux séances publiques alors qu'il avait été adopté à l'unanimité par la Commission des finances. En outre, les indicateurs présentés ne permettent pas aux parlementaires d'évaluer correctement les programmes et actions engagés.

Sur le fond, ce budget ne répond pas aux difficultés que rencontrent les élèves, leurs parents, les enseignants et la communauté éducative dans son ensemble. Aux classes surchargées, aux problèmes de non-remplacements, à la dégradation des conditions de travail, vous opposez une réduction de 16 000 postes dans l'éducation nationale. Vous annoncez 2 658 créations de postes dans le primaire et 144 dans le secondaire, mais en vous gardant bien de dire que l'an dernier, dans le premier degré, vous avez réussi à consommer 1 232 postes de moins que le plafond annoncé, notamment grâce aux heures supplémentaires ou aux emplois précaires. Par ailleurs, 476 créations d'emplois sont prévues dans l'enseignement privé, en application d'un principe de parité que le Conseil constitutionnel, dans sa décision concernant la proposition de loi Carle, n'a pourtant pas voulu affirmer. Mais il semble que la perte de moyens, dans le privé, ne représente que 7,5 % de celle du public, alors qu'il accueille 20 % des élèves. Le secteur privé devrait être soumis aux mêmes contraintes que le service public.

Aucun bilan critique n'est effectué des réformes Darcos, dont 51 % des parents pensent qu'elles ne sont pas dans l'intérêt des élèves et dont même les rapports officiels n'arrivent plus à masquer les dégâts, par exemple pour ce qui est de l'assouplissement de la carte scolaire ou de la mise en place de la semaine de quatre jours. Vous dites que les nouveaux horaires répondent à la demande sociale de suppression des cours le samedi matin. Les syndicats qui ont appelé à la grève pour le 24 novembre seront heureux d'apprendre que vous êtes sensible à la demande sociale, mais ils attendent des réponses plus précises pour lever leur mouvement.

Vous avez supprimé 3 000 postes de RASED à cette rentrée. Les 1 500 que vous prétendez avoir créés, qui ont été financés par le reliquat du budget des rectorats, ne semblent pas apparaître dans ce budget. Que deviendront-ils à la rentrée 2010 ? Ces postes doivent non seulement être maintenus, mais développés, comme le montre une étude récente de l'Université Paris-Descartes. Ainsi, 20 % des élèves ayant suivi trente heures de soutien dans le cadre de l'aide personnalisée montrent des progrès dans les acquisitions scolaires – et exclusivement dans ce domaine. Mais 70 % des élèves ayant suivi trente heures d'aide rééducative dans le cadre de l'aide spécialisée des RASED font des progrès, non seulement dans les acquisitions scolaires mais également dans le domaine des compétences cognitives.

Sur les accompagnements scolaires, vous n'apportez aucun élément rassurant. D'après l'Union nationale pour l'avenir de l'inclusion scolaire, sociale et éducative pourtant, vos belles promesses du projet de loi sur la mobilité des fonctionnaires se soldent par un fiasco complet, le dispositif, un mois et demi après la rentrée, n'étant toujours pas opérationnel.

L'école maternelle enregistre une baisse de la scolarisation des moins de trois ans. La présentation du budget ose prétendre que son efficacité pédagogique n'est pas avérée. Mais le directeur général de l'enseignement scolaire avait déclaré qu'elle était nécessaire à l'égalité des chances… Bref, la confusion règne.

En outre, on peut déplorer une baisse de 50 % des crédits pédagogiques dans le premier degré public, qui financent des activités complémentaires et des partenariats dans le domaine artistique ou scientifique. Encore une fois, les collectivités locales devront mettre la main à la poche – si elles le peuvent, alors qu'elles assurent déjà 40 % des dépenses en matière d'éducation. Ceux qui veulent réduire ces crédits reprochent aux enseignants d'« aller se balader » avec les élèves. Mais il s'agit de les emmener dans les musées ou à l'opéra par exemple – des lieux où certains d'entre eux n'iront jamais sans l'école.

Depuis 2003, près de 45 000 postes ont disparu dans le second degré. Les répercussions concrètes de ces suppressions ont-elles été évaluées – ou alors les 45 000 personnes concernées ne faisaient-elles rien ? Quel impact constate-t-on sur la réussite des élèves et l'organisation de l'enseignement ? Nous attendons une réforme ambitieuse, qui s'étende aussi au collège.

Il faudrait en profiter aussi pour s'attaquer à la division très sexuée des filières d'enseignement. Mais pour l'instant, le grand service public d'orientation qu'on nous promet semble se résumer à des plateformes régionales d'orientation en ligne. Peut-être nous donnerez-vous quelques précisions.

Vous ne vous engagez pas en faveur de l'éducation prioritaire, qui est pourtant complètement en panne. Les moyens consacrés aux réseaux « ambition réussite » sont d'une faiblesse notable. Quant à l'éducation physique et sportive, elle est dans une situation dramatique. Avec la disparition de 3 300 professeurs en quatre ans, 5 % des établissements ne peuvent assurer des horaires d'EPS à toutes leurs classes, et près de 15% des collèges, 40 % des lycées et 50 % des lycées professionnels ne peuvent enseigner la natation.

En matière de médecine scolaire, 30 % des enfants ne bénéficient pas du bilan de santé obligatoire à l'entrée en CP. Et nous ne voyons toujours rien venir en matière de revalorisation du métier d'enseignant, alors que le salaire de nos enseignants est inférieur de 20 % à ceux des autres pays de l'OCDE. Vous prétendez que la prime de 100 euros par mois des nouveaux recrutés au niveau mastère sera l'équivalent d'un treizième mois, mais en l'état actuel des choses, ces 100 euros s'obtiennent déjà au bout de trois mois. Enfin, vous annoncez que ceux qui accepteront de nouvelles missions seront payés. Encore heureux !

A propos des élèves en décrochage scolaire, vous dites avoir été inspiré par les théories d'Éric Maurin – qui est par ailleurs un économiste, pas un éducateur. M. Maurin évoque des primes pour les enseignants en fonction des résultats des élèves. Cela figure-t-il parmi vos intentions ?

La formation des enseignants reste la grande inconnue. Ce qui est sûr, c'est que des économies seront faites sur ce poste mais, pour tout le reste, les propositions du ministère restent très floues. Ce thème pourrait pourtant servir de base à une réflexion d'ensemble autour de l'école.

Pour toutes ces raisons, et parce que les richesses existent, dans notre pays, pour envisager une transformation ambitieuse de l'école qui permette de réussir l'éducation de tous les jeunes et de faire reculer l'échec scolaire, le groupe GDR n'adoptera pas ce budget à moins qu'il ne fasse l'objet de modifications significatives.

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