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Intervention de Michel Liebgott

Réunion du 28 octobre 2009 à 10h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Liebgott :

Je m'inscris en faux contre l'optimisme du rapporteur concernant le contexte socio-économique de notre pays. Nous ne sommes absolument pas en sortie de crise. Ce sont des mesures structurelles et non des mesures conjoncturelles que le Gouvernement doit prendre, car nous avons un retard considérable à rattraper par rapport à nos voisins européens. En effet, fin 2008, avant même le début de la crise, le taux de chômage en France était de 7,8 %. Ce chiffre correspond au taux actuel du chômage en Allemagne, où il est de 7,7 % et au Royaume-Uni, où il est de 7,5 %. Le taux de chômage est désormais de 9,5 % en France.

On peut certes noyer le poisson et mélanger les genres, en comptabilisant les crédits inscrits sur la mission « Plan de relance de l'économie », il n'en reste pas moins que les crédits de la mission « Travail et emploi » sont en baisse. Qu'en sera-t-il l'année prochaine lorsque les crédits du Plan de relance auront disparu mais que la crise, elle, sera toujours là ? J'estime qu'il s'agit non seulement d'un recul pour cette année mais d'un motif d'inquiétude pour l'avenir.

Selon la Direction de l'animation, de la recherche et des études statistiques (DARES) du ministère du travail, certains secteurs d'activité connaissent des destructions d'emploi sans précédent. L'industrie a perdu 52 000 emplois au premier trimestre 2009. Depuis début 2008, près de 225 000 emplois ont été supprimés dans le secteur de l'intérim.

Le taux de chômage au sens du Bureau international du travail a connu une hausse historique de 1,3 point au cours du premier semestre 2009. Il est ainsi revenu au même niveau qu'au premier trimestre 2006. Par conséquent, six trimestres de hausse auront suffi à effacer huit trimestres de baisse du chômage.

À cette crise sans précédent, s'ajoute un effet d'aubaine pour les employeurs, parfaitement analysé par certains cabinets indépendants, tels que le cabinet Syndex, qui a observé la propension de certaines entreprises à profiter du contexte économique pour délocaliser leur activité ou améliorer leur productivité.

Face à l'ampleur de la crise, les crédits inscrits dans ce projet de loi de finances sont-ils suffisants ? La réponse est non. À périmètre constant, sans comptabiliser les crédits du Plan de relance, et en tenant compte des mouvements financiers liés à la suppression des dispositifs d'aide à la restauration dans le cadre du passage à la TVA à taux réduit, les crédits de la mission diminuent en réalité de 1,73 % en valeur relative.

Comme le relève fort justement l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS), on peut considérer qu'une hausse nette des crédits dédiés à cette mission aurait été plus que bienvenue en période de crise. Laurent Hénart l'a lui-même récemment déclaré à l'occasion de l'examen de ce même budget en Commission des finances, le volume des crédits doit être suffisant pour que nos dispositifs d'emplois aidés jouent pleinement leur rôle contracyclique. Force est de constater que ce n'est pas le cas.

Je déplore que, concernant l'allocation de fin de formation, les « stocks » soient couverts, mais que rien ne soit prévu pour les nouvelles entrées en 2010. Par ailleurs, la non reconduction de l'allocation équivalent retraite est une erreur, alors même que se multiplient les plans de sauvegarde de l'emploi et que les seniors peinent à trouver du travail. Enfin, je regrette que l'allocation de solidarité spécifique n'augmente pas cette année.

Par ailleurs, le montant des crédits de paiement alloués à Pôle emploi laisse perplexe. En effet, alors même que près de 500 000 emplois ont été supprimés cette année, les crédits n'augmentent pas d'un euro. Les moyens financiers ne sont absolument pas à la hauteur de la crise économique. Chaque conseiller doit d'ores et déjà suivre 150 personnes : c'est l'accompagnement des personnes en difficulté qui en pâtira.

La mission « Travail et emploi », c'est aussi le programme 103 sur l'accompagnement des mutations économiques et le développement de l'emploi. Sur ce sujet, je formulerai deux remarques. La première concerne le chômage partiel. On sait que ce dernier demeure le meilleur amortisseur contre la crise. C'est pourquoi y consacrer 60 millions d'euros me semble notoirement insuffisant. Par ailleurs, les crédits au profit des conventions de reclassement personnalisé et des contrats de transition professionnelle sont désormais intégrés au programme 316 de la mission « Plan de relance de l'économie », par définition transitoire. Je regrette que vous ne les inscriviez pas dans la durée. Faut-il y voir le signe que le Gouvernement envisage leur suppression après la crise ?

En conclusion, les organismes indépendants annoncent un taux de chômage qui pourrait dépasser les 10 % en 2010. C'est pourquoi, vous l'aurez bien compris, les crédits de cette mission ne nous semblent pas à la hauteur de la crise qui continuera de sévir en France.

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