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Intervention de Jean-Pierre Blazy

Réunion du 29 septembre 2009 à 16h00
Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national

Jean-Pierre Blazy, maire de Gonesse :

Gonesse est située dans l'est du Val-d'Oise, territoire qui s'apparente à celui que connaît Claude Dilain à Clichy, avec les mêmes caractéristiques sociodémographiques et socioculturelles.

Le voile intégral y est minoritaire par rapport au foulard, lui-même très répandu dans l'espace public. Il est cependant visible et suscite des réactions de condamnation et de rejet de la part d'une partie de la population qui, loin de voter pour le Front national à chaque scrutin, a des convictions laïques et républicaines. Si ces réactions ne se manifestent pas au quotidien de façon apparente, elles n'en demeurent pas moins une réalité.

Il faut bien comprendre que c'est d'abord sur nos territoires de banlieue, déjà fragilisés, que le phénomène existe. D'où le risque de renforcer leur stigmatisation. C'est pourquoi je suis hésitant sur l'adoption d'une loi sur ce sujet. Certaines personnes issues des couches moyennes n'ont-elles pas déjà fait le choix, pour toutes sortes de raisons, de quitter ces territoires ? Si le voile intégral n'explique pas tout, il peut entrer en ligne de compte.

Je tenais à insister sur cet aspect des choses, car les élus que nous sommes ressentent les réactions de la population.

Je peux également témoigner que nos fonctionnaires territoriaux et hospitaliers – car je suis également président de conseil d'administration d'un hôpital public – se trouvent démunis. Pour ma part, je leur ai donné quelques instructions. Certes, ils sont placés dans une situation où ces réalités ne sont pas encore le fait d'un grand nombre, mais que se passera-t-il, par exemple, dans un bureau d'état civil, le jour où ils devront demander à une personne de retirer son voile intégral ? À l'hôpital, une femme venant chercher ses résultats d'examens devra-elle enlever son voile pour que les agents puissent s'assurer de son identité ? Quelle sera la force de la loi ? À mon avis, il faut regarder certaines situations de près, car nos fonctionnaires risquent de ressentir un malaise.

J'ai été partisan, dès le départ, d'une loi sur les signes religieux à l'école. Elle était nécessaire et a trouvé son application : l'apocalypse qu'on nous avait prédite ne s'est pas réalisée et la fermeté a payé. En revanche, je ne suis pas sûr qu'une loi sur le voile intégral apporte des réponses au problème : j'ai des doutes non seulement sur son bien-fondé, mais encore sur son efficacité.

Cela étant dit, comme Claude Dilain, je récuse la solution qui consisterait à rejeter la responsabilité sur les maires, car des arrêtés municipaux ne régleront pas non plus le problème.

En tant que républicains, nous sommes tous interpellés par cette question. Aujourd'hui, malgré la loi sur les signes religieux à l'école, la République me paraît encore trop faible en matière de laïcité. D'après moi, nous avons tous des responsabilités pour faire vivre la laïcité sur nos territoires et, de ce point de vue, nous faisons peut-être preuve – certains plus que d'autres – d'une certaine faiblesse coupable.

C'est pourquoi, au-delà de la signification du problème du voile pour les femmes, je voudrais insister sur le vivre ensemble dans l'espace public, car la question est là. Je crois à un dialogue ferme au sein de l'espace public. Au total, s'il faut faire reculer le phénomène du voile intégral, dont les causes sont complexes, je ne crois pas à la loi, pour l'instant.

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