Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Claude Dilain

Réunion du 29 septembre 2009 à 16h00
Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national

Claude Dilain, président de l'association de maires Ville et banlieue de France, maire de Clichy-sous-bois :

Je vais résumer la position officielle de l'association que j'anime, dont un conseil d'administration élargi s'est réuni ce jour pour débattre, durant de longues heures, de cette question.

D'abord, il est clair que, pour les élus, il ne faut pas mélanger le problème du foulard avec celui du voile intégral, car ils sont très différents. Le foulard renvoie à la question de la laïcité, éventuellement au prosélytisme, alors que le voile intégral touche à la dignité de la personne – en l'occurrence la femme –, en même temps qu'il est un frein à l'intégration. En renvoyant à d'autres questions, le voile intégral dépasse l'aspect religieux.

Ensuite, la situation est très variable d'une ville à une autre. Le premier chiffre qui a circulé dans la presse nous a fait sursauter, car le nombre de femmes en France portant le voile intégral est très élevé dans certaines banlieues, à tel point que les gens ont dit : « Ceux qui ont fait ce décompte ne viennent jamais chez nous ! » Dans d'autres communes, on ne trouve qu'une personne parfois qui porte ce type de voile. Lorsque le problème de la pratique du port du voile intégral se pose de façon importante, comme à Clichy-sous-Bois et à Montfermeil, les adhérents de Ville et banlieue sont unanimes pour la condamner.

La première erreur serait donc de nier ou de sous-estimer ce phénomène qui connaît un développement incontestable dans certaines villes.

Face à une montée en puissance des exigences religieuses dans ces villes, les maires sont inquiets. Les requêtes portent sur les repas à l'école – après ceux sans porc, il en faut maintenant sans viande ou halal –, mais également les créneaux horaires discriminants hommes-femmes dans les piscines, les gymnases ou à l'hôpital. Tous mes collègues de l'association l'ont confirmé : nous assistons à un envahissement du fait religieux dans la vie civile.

Si la réponse est complexe, les élus sont néanmoins unanimes pour dire que la prévention – en particulier, l'éducation – reste la première chose à faire dans les associations, les centres sociaux, mais aussi à l'école, dès le plus jeune âge. Peut-être n'utilisons-nous pas suffisamment la journée de la femme. En tout cas, des améliorations sont possibles.

Faut-il une loi ? Les élus sont partagés.

Pour une partie d'entre eux, il n'y a pas matière à légiférer, en termes de droit, sur l'espace public. Surtout, un grand nombre insiste sur les risques qui existent à légiférer. En effet, une loi ne risque-t-elle pas de stigmatiser, une fois de plus, des villes qui, comme les nôtres, le sont déjà ?

En outre, une interdiction légale du port du voile intégral ne va-t-elle pas, par effet boomerang, encourager celui-ci ? Notre diagnostic montre effectivement que le voile appelle le voile : il ne se développe pas où il n'y en a pas, mais devient une épidémie dès son apparition.

De plus, qui se chargera de faire respecter la loi ? Cette question très importante a suscité beaucoup d'inquiétudes.

En dépit de tous ces risques, un certain nombre d'élus, de maires, souhaitent que le Parlement légifère. La réponse au problème ne passe cependant pas forcément par une loi ; à cet égard, Jean-Yves Le Bouillonnec vous présentera une proposition, à laquelle j'adhère totalement. En tout cas, il y a unanimité pour dire que nous ne pouvons pas ne rien faire.

Une deuxième erreur, très grave, serait de renvoyer la « patate chaude » aux maires, au prétexte que ce problème n'existe que dans un certain nombre de villes. Je le répète : cette question renvoie aux valeurs républicaines que sont l'intégration, le respect de la personne et sa dignité. Elle appelle donc une réponse de la société française – et non exclusivement des maires par le biais d'arrêtés municipaux – et, par conséquent, la réaffirmation des valeurs de la République, d'une manière ou d'une autre, mais de façon symbolique et forte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion