Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Michel Mercier

Réunion du 20 octobre 2009 à 17h00
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire :

C'est avec plaisir que je réponds à votre invitation, Monsieur le président, et je regrette que le temps imparti à cette audition soit limité, en raison d'impératifs horaires liés à l'ouverture du débat sur le projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales au Sénat.

S'agissant du Grand Paris, je serai bref : le secrétaire d'État auprès du Premier ministre chargé de ce projet et moi-même sommes logés dans le même immeuble. Mais cela s'arrête là. Mon ministère a d'autres occupations, ce qui ne signifie pas qu'il ne pourra pas intervenir à l'intérieur de ce qui sera peut-être le Grand Paris.

L'intitulé de mon département ministériel traduit la volonté du Président de la République et du Premier ministre de refaire de l'aménagement du territoire une véritable ambition nationale. La semaine dernière, la DIACT (Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires) a retrouvé son nom d'origine, la DATAR (Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale), resté dans la mémoire du public comme porteur d'une grande ambition. Sans doute le retour de l'aménagement du territoire comme politique de l'État est-il également une conséquence de la crise économique. On n'attend pas que les choses se fassent toutes seules, mais on agit, en se donnant divers moyens d'action.

Cet intitulé est aussi la marque d'un « fléchage » spécifique en direction de l'espace rural. Pendant des lustres, s'occuper de la ruralité a essentiellement signifié gérer un déclin démographique et économique. Depuis quelques années, on a pris conscience de l'extrême diversité des territoires ruraux et de leur dynamisme. La population y croît trois fois plus vite qu'en ville, par exemple, ce qui change complètement l'approche : s'il n'y a évidemment pas de territoires ruraux sans agriculture, il n'y a pas seulement de l'agriculture dans les territoires ruraux.

De la cohabitation de « ruraux historiques » et de « nouveaux ruraux » résulte l'expression de nouveaux besoins. Tout l'objet des assises de la ruralité est de déterminer, par le moyen d'une expression directe sur l'Internet ou via les relais traditionnels – élus, associations –, la nature et la hiérarchie de ces besoins et le socle de services nécessaires, tels qu'écoles, garde d'enfants, offre de soins, transports, bref services au sens large, au-delà des services publics classiques. Par exemple, s'il est important d'avoir une perception, il est sans doute encore plus vital d'avoir accès à un médecin… Bien entendu, tous les parlementaires sont invités à participer à ces assises, qui seront probablement conclues par le Président de la République. Nous entendons nous appuyer sur les souhaits réels des habitants pour bâtir notre politique.

Certains moyens sont d'ores et déjà connus. Compte tenu du succès rencontré, le Premier ministre a annoncé une nouvelle vague de pôles d'excellence rurale (PER), assortie de crédits équivalents à ceux de la première vague. L'objet de ces pôles étant probablement amené à changer, nous nous proposons de procéder en deux étapes afin d'intégrer les résultats des assises. Nous prendrons donc toutes nos décisions à la fin du premier semestre 2010.

J'en viens aux crédits du ministère pour 2010. J'ai toujours pensé qu'un bon budget n'était pas forcément un budget en augmentation, mais celui-ci l'est. Lorsqu'il m'a nommé, le Président de la République m'a assuré qu'il me donnerait les moyens nécessaires et le projet de budget tient cet engagement : les crédits de la mission 112, Politique des territoires, s'accroissent de plus de 12 % par rapport à la prévision initiale. Nous avons également pu résorber la « dette » du fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT, c'est-à-dire les arrêtés de subvention non honorés.

En ce qui concerne les contrats de projets État-région (CPER), nous avons proposé que l'examen prévu par la clause dite « de revoyure » à mi-parcours se fasse après les élections régionales. Grâce au plan de relance, on ne constate de retards d'engagement ni de la part des collectivités locales ni de la part de l'État dans l'exécution de ces contrats ; c'est relativement nouveau, je le reconnais bien volontiers. Quoi qu'il en soit, la clause de rendez-vous permettra d'étudier les dossiers qui ne se seront pas concrétisés et ceux qui nécessiteront une réactualisation dans le cadre du Grenelle de l'environnement, du plan Campus ou d'autres actions. L'engagement de l'État dans les 37 CPER s'élève à 13 milliards d'euros, celui des collectivités à 15 milliards. Environ 39 % de ces crédits ont été consommés.

Environ 30 millions d'euros du FNADT abonderont en 2010 les crédits destinés à la restructuration de la défense. Le ministère de la défense a d'ores et déjà libéré cinq sites – Givet, Arras, Barcelonnette, Provins et Briançon – pour lesquels le contrat de restructuration est signé. D'autres contrats seront conclus avant la fin de l'année. Ils comprennent les crédits du FRED (fonds pour les restructurations de la défense) pour les deux tiers et du FNADT pour le tiers restant. La consommation reste modeste, ce qui n'a rien d'anormal étant donné les délais que nécessitent les opérations de reconversion : démolition, remise en état des sols, dépollution, vente des terrains, etc. Pour accentuer l'efficacité de ces crédits, nous avons revu le zonage des aides européennes à finalité régionale (AFR). Les sites de Caen, Reims et Noyon, notamment, sont concernés.

Les pôles de compétitivité ont fait l'objet de rapports de la Cour des comptes et du Parlement. Nous sommes en train de faire le point et devrions prendre nos décisions avant la fin de l'année concernant les éventuelles « délabellisations » – les analyses portent sur 13 sites – et les 19 candidatures au titre des écotechnologies.

Je veux saluer l'excellent travail accompli par l'agence française pour les investissements internationaux, l'AFII, qui a récemment rendu compte de son activité. De nombreux projets d'investissements étrangers dans notre pays voient le jour grâce à son action et à celle de ses correspondants sur l'ensemble du territoire. La prime d'aménagement du territoire (PAT), dont le budget pour 2010 est consolidé à hauteur de 38 millions d'euros, a joué son rôle dans ce cadre.

Les pôles d'excellence rurale (PER) ont prouvé leur intérêt. Ils ont en premier lieu provoqué un travail en commun dans des zones où l'on n'y était pas forcément habitué. Ils ont apporté des réponses non seulement à des questions institutionnelles, mais aussi à des questions économiques (énergies nouvelles, par exemple) ou portant sur les services (personnes âgées, maladie d'Alzheimer…). Les rapports parlementaires relatifs aux derniers PER sont achevés ou en cours d'achèvement. Le Gouvernement en fera l'analyse avant de déterminer la façon dont il entend mener la nouvelle vague de PER.

D'ores et déjà, il apparaît que le problème de l'ingénierie est important. Comment aider collectivités, associations, entreprises, à monter des projets de façon satisfaisante alors que la présence sur ces territoires est insuffisante ? J'ai demandé aux préfets de mobiliser les sous-préfets à ce sujet, d'autant que la réforme préfectorale qui entrera prochainement en vigueur libérera ces derniers de certaines tâches de gestion. Ils devront être plus présents sur le terrain et faciliter les projets aux côtés des élus, en les aidant, s'ils le souhaitent, notamment à se repérer dans le maquis des financements possibles d'un PER.

J'entends également utiliser les PER, en coordination avec le ministère de la santé, pour organiser la présence des soins sur tout le territoire. La loi Hôpital, patients, santé, territoires ouvre des pistes. La démographie médicale varie fortement selon les territoires et je souhaite travailler avec vous sur un sujet qui pose des problèmes de financement, de formation d'équipes médicales pluridisciplinaires (médecin, infirmière, kinésithérapeute, etc.) et de redéfinition du rôle de chacun au sein de ces équipes, d'utilisation d'Internet pour l'aide au diagnostic. Les assises des territoires ruraux permettront de faire émerger les demandes du public en la matière.

Parmi les dispositifs nouveaux, celui des « grappes d'entreprises » (clusters), lancé il y a quinze jours, devrait permettre d'améliorer l'accès des PME aux pôles de compétitivité. Il reprend et développe les anciens « systèmes productifs locaux » introduits à l'initiative de la DIACT, en aidant les PME travaillant dans un même secteur à mutualiser différents services de base, à assurer la veille technologique ou à gagner de nouveaux marchés. La DATAR étudiera les dossiers, et nous apporterons un financement, notamment pour l'acquisition de matériel, les démarches pour l'exportation ou la gestion du personnel. Nous pourrons également financer, pour une période déterminée, l'emploi d'une ou deux personnes dont le rôle sera de faciliter le fonctionnement des grappes d'entreprises et de tisser des liens avec les pôles de compétitivité.

Le 29 juillet dernier, nous avons demandé aux préfets d'établir dans chaque département un schéma directeur d'aménagement numérique (SDAN) destiné à assurer l'accès au très haut débit sur tout le territoire et de façon concomitante pour toutes les zones : il ne s'agit pas de desservir d'abord les zones rentables et ensuite, moyennant une aide de l'État, les zones peu ou pas rentables, car les territoires peu denses n'auraient aucune chance de bénéficier du très haut débit avant des lustres. Le financement devrait être assuré en partie par le grand emprunt, ainsi que par le fonds d'aménagement numérique prévu par la proposition de loi du sénateur Xavier Pintat.

Enfin, mon ministère sera très attentif au maintien des trains d'aménagement du territoire, les « Corail ». En effet, si le financement des TER est assuré par les régions et celui des lignes à grande vitesse par le marché, les Corail n'ont pas de financement spécifique. Ils sont assez lourdement déficitaires, le matériel est vieillissant et les voies qu'ils empruntent en font de véritables « tortillards ». Pour assurer la pérennité de ces trains, il faut que la SNCF trouve environ 190 millions d'euros. Ce n'est pas aux collectivités d'apporter ce financement. Il n'y a encore eu aucun arbitrage mais on peut penser aux économies que la SNCF tirera de la suppression de la taxe professionnelle, aux modes de reversement de la taxe carbone, ou encore à la mutualisation de certains tarifs avec les lignes à grande vitesse.

Vous le voyez, le champ d'action de ce ministère est très vaste, étant entendu qu'il est par nature interministériel. Nous nous efforçons de traduire dans les faits la volonté politique affirmée par le Gouvernement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion