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Intervention de Jean Dionis du Séjour

Réunion du 8 octobre 2008 à 21h30
Grenelle de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Dionis du Séjour :

Monsieur le ministre d'État, la loi de mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement doit devenir un texte fondateur d'une nouvelle société française. La France en a besoin. C'est pourquoi, compte tenu des enjeux, les députés centristes ne vous négocieront ni vous mégoteront leur soutien. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Au nom du groupe Nouveau Centre, je veux affirmer dès le début de mon intervention que les députés centristes voteront cette loi. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Autant être clair d'entrée, nous vous soutenons parce que nous soutenons l'objectif stratégique de ce texte, qui est de désengager notre pays le plus rapidement possible de la dépendance des hydrocarbures.

Nous vous soutenons aussi, parce que, pour atteindre ce but, le Grenelle de l'environnement ouvre des chantiers majeurs comme l'amélioration de l'efficacité énergétique de nos bâtiments et la transition de nos modes de transport du « tout automobile » à une approche faisant une place première au transport collectif urbain et au ferroviaire.

Nous soutenons l'objectif stratégique pour notre pays, nous soutenons la dynamique et les chantiers impulsés par cette loi, tel est le coeur des raisons de notre approbation.

Ce projet de loi fixe enfin, par et dans la loi, la volonté nationale de désengager notre économie du « tout pétrole ». Cela est justifié pour des raisons d'indépendance nationale et de géopolitique, le pétrole pas cher étant concentré dans les zones les plus dangereuses du monde – Irak, Arabie Saoudite – pour des raisons écologiques, car notre pays doit participer au défi mondial qu'est la réduction des gaz à effet de serre, et, enfin, pour des raisons économiques, le déséquilibre entre la demande et l'offre de pétrole amenant le pétrole à des prix toujours plus élevés menaçant directement nos équilibres commerciaux et notre compétitivité économique.

Cette volonté de désengagement des hydrocarbures n'est d'ailleurs pas nouvelle pour notre pays, elle a trente-cinq ans, depuis exactement le premier choc pétrolier de 1973.

Notre pays a su trouver, notamment avec le développement de son parc électronucléaire, des réponses à la hauteur des défis qu'il devait relever. Nous avons le devoir impérieux de continuer dans les traces de nos aînés pour nous désintoxiquer du pétrole, même si nos réponses doivent être différentes.

La société des hydrocarbures abondants et à bas prix telle que nous l'avons connu est donc en voie de disparition accélérée. Certains, et je pense ici à notre collègue Yves Cochet, affirment que nous avons déjà atteint le pic pétrolier et que la production mondiale de pétrole aurait déjà commencé à baisser. Ce qui est sûr, c'est que, sous le double effet d'une croissance forte dans les pays émergents et d'une gestion a minima de l'offre dans les pays producteurs, nous sommes déjà rentrés dans l'ère du pétrole très rare et très cher.

Le Grenelle de l'environnement, c'est d'abord l'histoire de la transition, et, j'ose le dire à nouveau, de la désintoxication de notre pays de sa dépendance aux hydrocarbures. Ceux-ci sont tellement omniprésents dans notre vie quotidienne – transports, chauffage, vêtements – qu'il sera dur de « faire mourir en nous le vieil homme ».

J'ai pu, de manière incidente, le mesurer lorsque j'ai proposé dans un amendement que l'Assemblée nationale fasse un geste dans ce sens en renonçant à son parc de voitures et de chauffeurs à la demande. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.) Que n'avais-je pas fait !

Il est clair que, pour réussir cette transition à la fois douloureuse et passionnante à vivre, l'on ne peut pas compter uniquement sur les effets de l'augmentation du prix des hydrocarbures, car son évolution est trop aléatoire, irrégulière et heurtée – ce sont les fameux chocs pétroliers, extrêmement difficiles à digérer pour nos sociétés.

Alors, oui, l'ensemble des leviers dont dispose l'État – réglementaires, budgétaires, fiscaux – doivent être mobilisés au service de cette mutation d'intérêt général. C'est la justification profonde du Grenelle.

Cette révolution de nos comportements de producteurs et de consommateurs à laquelle nous appelle le Grenelle peut être une opportunité. C'est une chance, en effet, de pouvoir envisager un système économique plus sobre, plus durable, plus respectueux de notre environnement.

J'entends souvent dire qu'il est trop tard pour être pessimiste. Cela me paraît être une évidence, il faut agir maintenant. Des études récentes ont montré que le trou constaté dans la couche d'ozone il y a quelques années était en passe de se résorber, grâce en partie à l'action menée à un niveau international pour bannir les aérosols responsables. Preuve s'il en fallait, que nous avons les moyens d'inverser des tendances lourdes qui nous semblaient irrésistibles.

Au nom de mes collègues du groupe Nouveau centre, je tiens à revenir aussi sur le processus de concertation qui a abouti à ce projet de loi.

Monsieur le ministre, vous avez été avec vos collègues Nathalie Kosiuscko-Morizet et Dominique Bussereau, les artisans, pour reprendre votre belle expression, de cette conférence des parties prenantes de l'environnement.

Collectivités territoriales, syndicats, entreprises, associations, tous se sont réunis au sein de plusieurs groupes de travail. Beaucoup de choses ont été dites, beaucoup de problèmes ont été soulevés, bon nombre de propositions ont émergé. Nous tenons à saluer le caractère innovant de votre démarche. Elle a abouti notamment à donner la place qu'elles méritent aux grandes associations mobilisées pour la défense de l'environnement.

Enfin, la société française reconnaît, par le Grenelle, le capital d'engagement pour la cause environnementale et d'expertise que constituent les adhérents de ces associations que je salue ici. Il y a là une percée majeure en termes de démocratie dans notre pays, et celle-ci doit être pérennisée avec pour vocation le suivi de l'exécution du Grenelle et, en conséquence, les corrections nécessaires de trajectoire. Ce sera l'objet de l'un de nos amendements principaux.

De manière plus générale, ce Grenelle a déclenché au sein de toute la société française un effort d'imagination et de propositions sans précédent, le Nouveau Centre tient à vous en féliciter.

Cette démarche est un modèle en termes de concertation. Des gens qui ne se parlaient jamais, militants écologistes et agriculteurs ou chasseurs, se sont rencontrés, se sont écoutés et se sont parlé.

Cette confrontation a été longue, elle a été difficile mais elle a été féconde. Après quelques mois, il en est ressorti une liste de 273 engagements faisant l'objet d'un consensus entre toutes les parties prenantes. Il faut être sacrément de mauvaise foi pour nier la filiation entre ces 273 engagements et le texte qui nous est soumis aujourd'hui. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Ces engagements sont largement repris dans votre projet de loi, et c'est ce qui lui donne une force politique rare. Nous verrons bien quelle sera la position de l'opposition par rapport à ce texte. En tout cas, cette force politique, les centristes la saluent, eux qui ont toujours tenu à développer une culture du consensus.

Au nom de mes collègues centristes, je fais le voeu que cet esprit du Grenelle anime nos débats et nous permette notamment de changer nos regards respectifs les uns sur les autres.

Les députés centristes tiennent ainsi à saluer l'apport du mouvement écologiste, de ses très nombreuses associations et de ses adhérents. Ils ont été, reconnaissons-le, à l'avant-garde de ce mouvement de fond qui est aujourd'hui devenu la défense de notre environnement. Que ce soit sur l'eau – pensons à René Dumont et à son verre d'eau de la campagne de 1974 –, sur les déchets, sur le réchauffement climatique, les écologistes ont eu souvent raison avant les autres. Gardons en mémoire, au moment de démarrer nos discussions, cet apport incontestable.

Au mouvement écologiste lui-même d'être à son tour dans les mêmes dispositions d'écoute, de rigueur, et d'humilité intellectuelle, notamment pour ce qui fait encore débat entre nous, je veux parler du débat sur le nucléaire et du débat sur la croissance.

À ce moment de mon intervention, je voudrais dire un mot sur les sujets qui ne sont pas abordés dans ce texte, ce qui est normal puisque c'est un texte de consensus. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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