Ce n'est pas le cas, car cela irait sans doute à contre-courant de la libre concurrence.
À ce titre, je ne doute pas que M. le ministre de l'agriculture sera présent dans l'hémicycle pour défendre cette partie du texte après sa brillante intervention devant les éleveurs le 3 octobre dernier au sommet de l'élevage de Clermont-Ferrand, intervention durant laquelle pas une fois, je dis bien pas une fois, le projet de loi dont nous discutons n'a été évoqué ! Sans doute, se fera-t-il ici le chantre de l'élevage français durable, puisqu'il a renoncé – nous n'en doutons pas – à négocier en sous-main une libéralisation durable des marchés agricoles avec Mme Fischer-Boel.
Au chapitre « gouvernance », concept éminemment libéral, la traduction d'une plus grande responsabilité environnementale des entreprises tient en quelques mots, sans véritable application pratique. Il se pourrait en effet que l'État mette à l'étude « l'obligation de faire figurer dans un rapport destiné à l'assemblée générale des actionnaires des informations environnementales et sociales ». Sans mauvais esprit, mes chers collègues, cela me fait penser au sketch d'un Coluche qui croquait à merveille les fausses prudences journalistiques. On s'autorise à penser, dans les milieux autorisés, qu'un accord secret avec les actionnaires pourrait être conclu en ce sens, qui « pourrait inclure l'activité des filiales », qui « pourrait comprendre des informations relatives à la contribution de l'entreprise au développement durable.» Quel courage politique, quel sens de l'engagement !
Quant à la participation des salariés à la veille environnementale au sein des entreprises, l'article 46 prévoit que « Le Gouvernement engagera une procédure de consultation, de concertation et de négociation sur la possibilité de… ». À croire que ce texte a été tout bonnement rédigé par les instances représentatives patronales ! Mais peut-être ne suis-je pas loin de la vérité…
En lien avec l'information des consommateurs, l'article 2 prévoit également qu'une des lignes directrices sera «l'amélioration de l'information sur le coût écologique des échanges». Je ne manquerai pas alors de demander au Gouvernement de soutenir divers amendements que je présente, au nom des députés communistes et républicains, dont l'un vise, par exemple, à mettre en place un étiquetage environnemental des produits alimentaires mentionnant la distance parcourue entre le lieu de production et le lieu de vente au consommateur final, puisque l'on parle du coût écologique des échanges !
Le marché, tout le marché, rien que le marché, nous voyons tous les jours ce que cela donne avec les faillites bancaires en cascade. C'est pourtant ce que l'on nous propose aujourd'hui pour résoudre les problématiques environnementales.
Le Gouvernement veut persévérer dans l'erreur en nous assénant le principe d'une écologie politique soluble dans un libéralisme sans entrave. Nous veillerons à y opposer tout au long des débats parlementaires le principe d'une écologie sociale, indissociable d'un dépassement du capitalisme.
Dans une logique constructive, en tant que députés communistes, nous souhaitons porter à travers nos amendements un rééquilibrage utile bien que nous partions d'une base rédactionnelle très éloignée de notre vision de la société du XXIe siècle. Déjà, le travail en commission nous a permis, monsieur le rapporteur, d'apporter des améliorations notables à ce texte avec, par exemple, dans le domaine du transport ferroviaire, l'affirmation du rôle de l'État dans la régénération des voies ; dans le domaine de l'eau, l'inscription d'un second objectif visant à garantir un approvisionnement durable en eau de bonne qualité et assurant l'engagement de l'État en faveur d'actions visant à limiter les prélèvements et consommations ; ou encore l'intégration de l'objectif de qualité pour les productions agricoles et sylvicoles ; et enfin l'ajout des écosystèmes dans l'entête du titre II. Nous reconnaissons ces avancées.
Pour autant, je ne peux me satisfaire du rejet devenu quasi mécanique, monsieur le président de la commission, sous le prétexte de l'article 40, de très nombreux amendements qui portaient pourtant sur des enjeux essentiels comme l'installation agricole sous signe de qualité, le soutien aux collectivités s'engageant en faveur de repas biologiques, ou l'aide aux ménages les plus modestes pour agir sur leurs choix de consommation. Mais il est sans doute plus facile de débloquer en une journée 3 milliards d'euros pour renflouer une banque au nom de la confiance dans le marché !