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Intervention de Simon Renucci

Réunion du 23 octobre 2007 à 21h45
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSimon Renucci :

Mesdames et monsieur les ministres, mes chers collègues, avec un déficit de près de 12 milliards d'euros pour l'année 2007, c'est peu dire que d'avancer que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 se présente mal.

Six ans après votre premier PLFSS, j'aurais aimé vous dire que je m'étais trompé à l'époque, j'aurais voulu reconnaître que les efforts que vous aviez demandés aux Français, et en particulier aux malades et aux retraités étaient enfin récompensés. J'avais fait le rêve qu'au bout de six ans, notre système de solidarité serait sauvegardé et renforcé.

Mais à l'heure où nous débattons, alors que les déficits cumulés dépassent les 50 milliards d'euros, soit plus de 300 milliards de francs, vous vous apprêtez à imposer de nouvelles franchises médicales ce qui signifie que vous augmentez les taxes sur les malades

Mes chers collègues, de plus en plus de gens ne se soignent plus et, phénomène nouveau, de plus en plus de retraités basculent dans la pauvreté tandis que les familles elles-mêmes s'appauvrissent. Il est temps d'ériger la réduction de la pauvreté en priorité nationale.

À ce sujet, et puisque je m'attacherai à commenter vos seules propositions pour la branche famille, j'espérais que vous tiendriez les engagements pris en 2005 concernant des enfants pauvres. J'avais à l'époque en tant que parlementaire, mais aussi comme pédiatre, beaucoup apprécié le rapport de Martin Hirsch et les pistes qu'il présentait. Je regrette qu'aucune des mesures significatives de ce rapport ne soit inscrite, ni même retenue dans le cadre de nos débats.

Vous l'aurez compris, mesdames et monsieur les ministres, nous avons désormais quelques doutes lorsque nous sommes confrontés à des effets d'annonces, d'autant que certaines réalités concrètes sont peu favorables aux Français, et en l'occurrence aux familles.

Ainsi, d'après son annexe 9, le PLFSS 2008 comporte, pour la branche famille, seulement 35 millions d'euros de dépenses nouvelles, mais 130 millions d'euros d'économie.

Ces économies résultent de deux mesures : d'abord la création d'un âge unique de 14 ans, au lieu de deux aujourd'hui, pour la majoration des allocations familiales, soit une économie de 80 millions d'euros ; ensuite, l'ouverture d'un droit d'option entre la prestation de compensation du handicap et les compléments d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé.

La première de ces mesures nous renvoie à l'article 59 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui introduit le principe d'une modulation de l'allocation de rentrée scolaire en fonction de l'âge des enfants. Je rappelle que l'allocation de rentrée scolaire, l'ARS, est une prestation attribuée, sous condition de ressources, à toute famille ayant, à charge, un ou des enfants de 6 à 18 ans. Actuellement, son montant de 272,57 reste identique, quel que soit l'âge des enfants scolarisés.

Lors de l'audition, à l'Assemblée nationale, des ministres en charge du PLFSS, le 11 octobre dernier, j'avais eu le sentiment que M. Xavier Bertand – je suis presque certain qu'il s'agissait de lui – avait esquivé la question sur le chiffrage de cette mesure. L'annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale nous donne la réponse, il y est précisé que « les mesures dont l'impact est neutre sur les soldes par branche ne figurent pas dans le tableau sur l'impact des mesures nouvelles 2008 ». Or, la modulation par âge de l'ARS n'est pas présentée dans ce tableau. J'en déduis, que cette mesure sera mise en oeuvre à coût nul, par redéploiement entre classes d'âge et se traduira donc par une diminution du montant de l'allocation pour des millions de familles et d'élèves. Convenons qu'une telle économie, faite sur le dos des familles, peut surprendre en cette période !

Peut-on d'ailleurs vraiment parler d'une politique familiale quand le texte se contente d'évoquer cet aspect dans deux articles qui ont pour seul objectif la rigueur et la volonté de faire des économies ?

La seconde mesure relative aux droits d'option entre la prestation de compensation du handicap et le complément d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé renvoie à l'article 60 du PLFSS. La loi prévoit que les bénéficiaires de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé peuvent cumuler cette dernière avec la prestation de compensation.

Mais si, comme vous le souhaitez, l'entrée dans le dispositif de compensation du handicap reste liée à l'attribution de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, il y aura, pour les adultes une compensation attribuée en dehors de toute référence à un taux d'incapacité, en application d'une des avancées de la loi de 2005, et pour l'enfant, une compensation, toujours liée à un taux d'incapacité. Or, non seulement cette mesure n'a pas fait l'objet de concertation préalable avec les associations de personnes handicapées, mais elle apparaît comme discriminatoire et elle est en contradiction avec l'esprit même de loi de février 2005.

Pour finir, je voudrais dire un mot des maisons départementales du handicap. La Caisse nationale des allocations familiales évalue que cette mesure équivaut à une dépense supplémentaire de 130 millions d'euros à la charge de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Quel sera l'impact financier de cette mesure pour les départements ? Mesdames et monsieur les ministres, les départements attendent votre réponse. Nous ne doutons pas que cette situation soit délicate, elle nous convie tous à beaucoup d'humilité, et je sais que vous allez répondre avec une très grande franchise.

J'ajoute, puisque, ce soir, il a beaucoup été question de la lettre d, que pour nous, le d qui compte pour réussir dans la vie, c'est aussi celui du mot doute. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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