Il est vrai que nous manquons dans ces négociations d'une vision commune – c'est l'une des difficultés. Les États-nations défendent leurs intérêts au moins autant que ceux de la planète.
Y a-t-il « banalisation » de Copenhague ? L'attente populaire est considérable, comme si c'était la dernière chance de la terre, mais à nos yeux un accord politique serait déjà formidable. Il faut donc préparer l'opinion à ce qu'il n'y ait pas un traité complet.
Du reste, le changement climatique est l'affaire du siècle, et il faudra sans cesse ajuster notre action aux découvertes de la science. La difficulté est que d'un côté, nous avons intérêt à ce que les périodes d'engagement soient relativement brèves afin de tenir compte des évolutions, mais de l'autre, nous avons besoin de périodes d'engagement longues pour les investissements et les infrastructures. Par exemple, le modèle selon lequel les villes se construisent est déterminant pour la consommation future d'énergie.
Le sommet de Ouagadougou a permis d'assurer une mobilisation et de préciser les positions, mais il y a plusieurs volontaires à la représentation de l'Afrique.
La traduction concrète des engagements qui peuvent être pris à Copenhague passe par les collectivités locales et les entreprises. Ce sont donc des partenaires essentiels, qui sont toujours présents dans les délégations nationales, même s'ils n'ont pas de rôle institutionnel dans les négociations. Nous avons besoin également, bien sûr, du soutien de la population, et les préoccupations qui ont été exprimées à ce sujet sont pleinement justifiées. L'équité du système est un impératif.
Le marché est un moyen d'arriver à un objectif, ce n'est pas un but en soi. La création de marchés des permis d'émission pour les entreprises et pour les États a été jugée utile, mais le système, relativement efficace, le serait beaucoup plus si on pouvait relier tous les marchés entre eux. La Chine est quant à elle en train de créer un marché volontaire, garantie par des associations nord-américaines. On constate actuellement un foisonnement d'initiatives, qu'il faudra peut-être un jour réglementer.
Une innovation remarquable est la possibilité pour des entreprises de s'exonérer d'une partie de leurs obligations en investissant dans un pays en développement. Ce mécanisme – dit du développement propre – a été critiqué parce que les investissements se font surtout en Chine – ce qui est logique, les efforts de dépollution y étant immédiatement efficaces. La reforestation fait partie du système : on peut s'exonérer d'une partie de ses obligations de réduction en finançant de la reforestation dans un autre pays. L'Union européenne ne l'accepte pas encore, mais le protocole de Kyoto l'autorise. Si j'avais des critiques à formuler, ce ne serait donc pas sur l'existence d'un marché, mais éventuellement sur l'insuffisance de la gouvernance – car il n'y a pas de marché sans gouvernance.
Beaucoup de questions ne relèvent pas de l'ambassadeur que je suis, mais plutôt des choix politiques nationaux. Sachez que la Chine réfléchit à la mise en place d'une taxe carbone intérieure. La taxe aux frontières fait partie de nos discussions ; la position française sur ce point est maintenant partagée par Mme Merkel : nous sommes favorables à un mécanisme d'ajustement aux frontières dénommé MIC – mécanisme d'inclusion carbone –, consistant à obliger l'importateur à acheter des droits aux enchères, afin d'assurer un traitement égal des industries nationales et étrangères. Il est probable que dans quelques années, tous les produits échangés dans le commerce international devront avoir leur « carte d'identité carbone ».
Concernant les Alpes, comme ancien ministre de l'environnement, je ne peux qu'être d'accord…
Sur le caractère international ou national des engagements, les discussions se poursuivent. Il est possible que nous acceptions des engagements nationaux pour les pays émergents.
La science explique très bien pourquoi la planète a connu des périodes chaudes et des périodes froides – en fonction de la position de la Terre par rapport au Soleil. Mais personne ne peut expliquer le réchauffement auquel nous assistons autrement que par l'accroissement des gaz à effet de serre.
Concernant les financements, la position de la France est simple : nous souhaitons que la clé de répartition dans l'Union européenne soit la même que la clé internationale – soit sans doute 50 % pour la capacité à payer, c'est-à-dire le PIB par habitant, et 50 % pour la responsabilité dans les émissions.
Les Objectifs du millénaire, certes, n'ont pas été atteints, mais il est difficile de mettre dans une convention la réponse à tous les problèmes de l'humanité… Le fait que l'APD n'atteigne pas 0,7 % conduit à chercher des financements innovants. Quant à l'Europe, qui est la seule partie du monde à avoir réduit ses émissions, elle ne peut être la seule à contribuer. Les efforts doivent être partagés !