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Intervention de Guy Teissier

Réunion du 14 octobre 2009 à 11h45
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Teissier, Président :

Nous sommes très heureux d'accueillir le chef d'état-major de la marine, l'amiral Pierre-François Forissier.

Les crédits que vous allez nous présenter, amiral, seront ouverts par la loi de finances, mais ils s'inscrivent également dans le cadre préalablement fixé par la loi de programmation militaire. À ce titre, pourriez-vous revenir sur le surcoût des onze frégates FREMM ? Ce que nous avons appris par l'intermédiaire de la presse est-il exact ? A quoi est dû le surcoût éventuel ?

Pourriez-vous également revenir sur le démantèlement des bâtiments de guerre ? Je rappelle que notre rapporteure, Marguerite Lamour, avait abordé ce sujet dans un rapport d'information remis en 2007 à la suite de l'affaire du Clemenceau, qui avait beaucoup marqué les esprits. Dans leur rapport sur la loi de programmation militaire, nos collègues Patrick Beaudouin et Yves Fromion ont par la suite démontré tout l'intérêt du démantèlement des équipements de la défense pour l'industrie et la recherche. Pouvez-vous nous dire s'il y eu un travail de réflexion dans ce domaine ?

Amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine. C'est la deuxième fois que j'ai le plaisir et l'honneur de m'exprimer devant les membres de votre commission à l'occasion de l'examen du projet de budget. Cette audition devant la représentation nationale revêt pour moi un grand intérêt, car ce rendez-vous annuel est un moment privilégié pour présenter l'avenir de la marine.

En toute rigueur, je ne suis que le gestionnaire d'un BOP – budget opérationnel de programme – du programme 178, mais j'ai également pour mission de garantir la cohérence de notre marine. Je serais donc heureux de vous apporter un éclairage transversal sur l'ensemble des crédits.

L'adoption de la loi de programmation militaire, qui met en oeuvre les orientations retenues par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, lequel suscite un grand intérêt chez nos homologues étrangers, car il établit un lien entre deux questions jusque–là distinctes, a constitué une période charnière pour les armées.

Avant d'évoquer le projet de loi de finances, je commencerai par rappeler les finalités de la marine au travers de ses activités opérationnelles.

En moyenne, trente bâtiments et huit aéronefs de la marine participent chaque jour, en mer ou au–dessus de la mer, à des missions opérationnelles.

Sur le plan des opérations militaires, la force océanique stratégique a continué d'assurer la permanence de la mission de dissuasion, rarement évoquée, mais qui représente pour nous un travail énorme depuis trente-cinq ans.

Dans le nord de l'océan Indien, la marine poursuit son engagement dans la lutte contre le terrorisme en participant à l'opération Héraclès, volet maritime de l'opération interalliée Enduring Freedom. Nous avons maintenu une présence quasiment constante au sein de la Task Force 150, dont nous avons assuré le commandement depuis le bâtiment de commandement et ravitailleur – BCR – Marne, entre le 9 avril et le 20 juillet dernier.

Dans la zone sensible de la Corne de l'Afrique, la marine nationale a poursuivi son engagement au sein de l'opération EU NAVFOR Atalanta. Deux frégates et un avion de patrouille maritime sont actuellement déployés en permanence dans cette zone et le resteront aussi longtemps que nécessaire. Cette opération, à laquelle nous prenons une part active, constitue la première opération maritime de l'Union européenne. Elle témoigne de la volonté des États membres, en particulier la France, d'apporter une réponse durable à la piraterie dans cette région.

Je précise que les unités françaises présentes dans cette zone restent sous le contrôle opérationnel et l'assistance logistique de l'amiral commandant la zone maritime de l'océan Indien. En fonction des besoins opérationnels, elles peuvent être amenées à réaliser d'autres actions spécifiques, telles que l'opération de vive force menée pour libérer les otages du voilier Tanit en avril dernier, le repêchage des boîtes noires de l'Airbus A 310 de la compagnie Yemenia en juin dernier, ou encore la protection de la flotte de pêche au thon française.

Sur la façade ouest de l'Afrique, la marine participe à l'opération Corymbe, destinée à prévenir les crises et à participer à leur règlement dans le golfe de Guinée. La présence française est assurée par un TCD – transport de chalands de débarquement – ou un aviso, prêts à procéder à l'évacuation éventuelle de nos ressortissants. Ces bâtiments réalisent également des actions de coopération civilo-militaire au cours de leurs nombreuses escales dans la région.

Cette année encore, la marine a assuré une présence importante en Méditerranée dans le cadre de missions nationales de sécurité et de sûreté maritime, mais aussi en coopération avec les marines riveraines. Dans le cadre de l'opération Impartial Behaviour de soutien à la force des Nations Unies déployée au large du Liban (FINUL), un bâtiment a ainsi maintenu une présence dans la zone jusqu'en mars 2009 tout en participant à l'opération nationale Baliste.

Dans l'Atlantique, nous avons déployé de très importants moyens, notamment le Mistral (BPC), une frégate de surveillance, un sous-marin nucléaire d'attaque, un Falcon 50 et un avion Atlantique 2, pour rechercher les corps, les débris et les enregistreurs du vol AF 447 Rio-Paris.

En juillet dernier, nous avons également escorté jusqu'à Djibouti le premier sous-marin malaisien, le Tunkul Abdul Rahman, que nous avons ensuite remis aux autorités malaisiennes au début du mois de septembre.

La sauvegarde maritime, qui représente une part non négligeable de l'activité de la marine nationale, constitue un autre aspect important de sa contribution à la sécurité des Français. Depuis le 1er janvier 2009, 582 vies ont déjà été sauvées en mer grâce à des moyens déployés par la marine.

La marine est très engagée dans les Antilles ainsi qu'en Méditerranée occidentale dans la lutte contre le narcotrafic. Les interventions réalisées ont permis de dérouter quatre navires et de saisir près de quatre tonnes de stupéfiants.

En Méditerranée, la marine participe aux missions de l'agence européenne FRONTEX, mise en place pour lutter contre l'immigration clandestine. Elle a notamment pris part aux patrouilles Poséidon en mer Egée et Indalo en mer d'Alboran, à l'ouest de la Méditerranée. Trente navires transportant des passagers clandestins ont été interceptés et 709 immigrants ont été remis à la police à la frontière grecque.

Nous luttons également contre la pêche illicite : la marine a participé à deux campagnes « Thon rouge », à une campagne « Cabillaud », ainsi qu'à une campagne dans les Terres australes et antarctiques françaises. Dans ce cadre, 867 navires ont été contrôlés et 14 déroutés.

La protection de la mer fait aussi partie de nos missions. Notre action de prévention des pollutions est efficace, car nous avons de moins en moins de cas à traiter. Les bâtiments de la marine ont détecté depuis le début de l'année 14 pollutions accidentelles et un cas de pollution volontaire, qui a conduit au détournement du navire.

Le renforcement de l'action de l'État en mer et la création de la fonction de garde-côtes, annoncés par le Président de la République au Havre, le 16 juillet dernier, représentent pour nous une avancée très significative. Nous travaillons d'arrache-pied pour la concrétiser.

Bien que notre bilan soit relativement positif, la disponibilité fluctuante des moyens aéromaritimes n'a pas été sans conséquences pour l'efficacité de nos opérations et le respect de notre contrat opérationnel. Le vieillissement des parcs d'hélicoptères obère notamment l'aptitude de la marine à projeter des frégates embarquant des aéronefs fiables et à réaliser ses missions de service public. Or, nous ne voulons pas être responsables de la disparition en mer de vies qui auraient pu être sauvées.

Pour remédier à cette situation, nous poursuivons nos efforts en matière de disponibilité des moyens, objet d'un véritable combat. Les résultats sont encourageants, car le taux moyen de disponibilité technique des bâtiments se maintient au dessus de 70 % depuis plus de trois ans. C'est la conséquence de la réorganisation du maintien en condition opérationnelle (MCO) au cours des dernières années : nous avons progressé dans la voie d'une contractualisation associant pluri-annualité, mise en concurrence et responsabilisation des titulaires sur les résultats.

Alors que la première IPER – indisponibilité périodique pour entretien et réparation – du porte-avions Charles-de-Gaulle s'était remarquablement déroulée grâce à la mobilisation de l'ensemble des acteurs – équipage, services de soutien de la marine, industriels maîtres d'oeuvre et sous-traitants –, le porte-avions a subi une avarie sur un arbre de transmission, qui a provoqué son arrêt de mars à septembre. Après enquête, il est apparu que l'avarie résultait de la conjonction d'un sous-dimensionnement au moment de la conception et d'une erreur de fabrication de la pièce de rechange installée pendant l'IPER.

La détection rapide du problème, grâce au professionnalisme exemplaire de l'équipage et de l'industriel, a permis d'arrêter à temps le bâtiment et d'éviter la catastrophe : cet incident aurait pu causer des avaries considérables et faire des victimes humaines. D'une certaine façon, nous avons eu de la chance dans notre malheur. Il n'en demeure pas moins que cet incident a beaucoup perturbé la remontée en puissance du groupe aéronaval et la requalification des pilotes, qui a aujourd'hui repris.

Au plan budgétaire, le plan de relance nous a apporté une bouffée d'oxygène appréciable en nous permettant de financer un troisième bâtiment de projection et de commandement (BPC), ainsi qu'un certain nombre d'actions peu visibles, mais présentant un réel intérêt : nous avons pu consacrer 48 millions en autorisations d'engagement et 24 millions en crédits de paiement à la passation de commandes supplémentaires de rechanges.

A cause de l'insuffisance des rechanges, de l'âge moyen du parc et des pertes de compétence technique, le taux de disponibilité de l'aéronautique navale demeure un grave sujet de préoccupation. Nous avons lancé de nombreux chantiers pour remédier à cette situation.

L'arrivée d'un hélicoptère EC 725 de l'armée de l'air dans la base de Lanvéoc est effective depuis février 2009. Du fait du prochain retrait de service des hélicoptères Super-Frelon, nous souhaitons toutefois disposer de deux hélicoptères lourds supplémentaires pour assurer nos missions de sécurité maritime en attendant la livraison des NH 90 en version sécurité maritime. La DGA y travaille. D'autre part, nous nous efforçons d'améliorer l'organisation interne de la maintenance aéronavale en renforçant les synergies entre nos équipes et celles du service industriel de l'aéronautique – le SIAé.

Alors que nous étions très préoccupés l'an dernier par l'augmentation du prix du pétrole, nous avons profité de l'évolution favorable de la conjoncture pour reconstituer nos stocks de combustibles, dans lesquels nous avions beaucoup puisé. L'activité de nos forces est garantie pour cette année et le niveau des stocks devrait être satisfaisant en fin d'année même s'il sera sans doute inférieur au niveau atteint par le passé.

En début d'année, les opérations concernant nos infrastructures ont été perturbées par les conditions de construction du budget, qui faisait largement appel à des ressources extrabudgétaires finalement absentes. Des re-dotations ont permis de débloquer la situation, mais nous avons pris du retard dans la contractualisation d'un certain nombre d'opérations.

En revanche, le renouvellement de la flotte se poursuit conformément aux prévisions. Ont ainsi été commandés un deuxième sous-marin, les trois dernières des onze frégates FREMM prévues – je rappelle que la commande initiale portait sur huit unités avant d'être modifiée –, dont les deux dernières, les FREDA, viendront en complément des frégates de défense aérienne Horizon dont les essais sont en cours d'achèvement, neuf avions Rafale destinés à la marine et 150 missiles de croisière naval, dont 50 à destination de nos sous-marins. À cela s'ajoutent la commande d'un troisième BPC, financée grâce au plan de relance, et celle de quatre petits engins de débarquement. Tout cela nous permettra de disposer d'un parc cohérent et moderne.

Nous attendons également deux Rafale, ce qui ne fera malheureusement que nous ramener à la case de départ, car nous venons d'en perdre deux. Cinquante torpilles Mu 90 sont également en cours de livraison, et nous allons bientôt conclure les essais du sous-marin nucléaire lanceur d'engins – SNLE – n°4, le Terrible. Le dernier tir de maquette du missile M 51 s'étant bien déroulé cette semaine, nos programmes concernant la dissuasion océanique sont parfaitement en phase.

L'année 2009 est marquée par une réorganisation générale du ministère, à laquelle la marine prend sa juste part, notamment avec l'expérimentation conduite dans la base de défense de Brest. Les retours d'expérience sont tout à fait intéressants et pourront utilement être mis à la disposition de l'ensemble de la communauté militaire.

J'en viens au budget pour l'année 2010. Avant de présenter les programmes dont je suis « client », je dois rappeler qu'il est de plus en plus difficile d'identifier les crédits qui nous reviennent précisément, car il n'y a plus de budgets distincts pour l'armée de terre, l'armée de l'air et la marine. Nous travaillons de plus en plus en synergie, ce qui est heureux : l'essentiel est de disposer d'un ensemble d'armées cohérent et fonctionnant bien. Cela étant, nous travaillons à la mise en place d'une comptabilité analytique et nous commençons à avoir une image assez précise de la façon dont nos crédits sont utilisés dans les faits.

J'en viens au programme « Préparation et emploi des forces », qui concerne la quasi-totalité des unités en service de la marine et rassemble 90 % du personnel, dont 15 % est aujourd'hui composé de civils. Afin de participer aux efforts demandés au ministère, nous devrons porter nos effectifs à 44 000 personnes en 2015 – 37 000 militaires et 7 000 civils – ce qui représente une réduction de 12 %, soit 850 personnes par an. La manoeuvre sera difficile : il faudra trouver de nouveaux modes de fonctionnement, notamment en matière de soutien, pour continuer à assurer nos missions. Nous devrons veiller à maintenir l'équilibre de la balance "entrées-sorties" pour conserver les compétences opérationnelles dont la marine a besoin et maintenir la jeunesse de nos équipages, dont la moyenne d'âge est aujourd'hui comprise entre 26 et 28 ans.

Pour cela, il sera nécessaire de fidéliser les compétences, notamment dans les spécialités critiques, et de piloter les départs, lesquels ne doivent pas seulement s'envisager d'un point de vue quantitatif, mais être ciblés. Nous devrons aussi assurer un bon niveau de recrutement, principalement dans notre coeur de métier, en veillant à conserver un bon ratio entre les forces et le soutien, et enfin adapter les pyramides des grades pour répondre aux besoins de demain tout en offrant des cursus professionnels diversifiés et valorisants.

Après avoir connu des difficultés de recrutement en 2008, qui avaient occasionné un sous-effectif d'environ 500 personnes, nous avons redressé la barre, et les départs en retraite ont été moins nombreux que prévus à cause de la crise. Si l'on fait la moyenne des deux dernières années, les résultats sont conformes à la trajectoire que nous devons suivre pour atteindre notre objectif de format. À la fin de l'année, nous constaterons un léger sureffectif par rapport à nos objectifs initiaux, mais la réduction des effectifs reste pilotée de façon satisfaisante.

Pour l'année 2010, la baisse des crédits du titre 2 sera de 3,6 %, ce qui correspond à une baisse d'effectifs de 822 postes au titre des mesures d'économies et à un transfert de 1 631 postes résultant de changements de périmètre dans le cadre des restructurations en cours.

Plusieurs mesures de revalorisation salariale et catégorielle sont toutefois prévues au profit du personnel militaire et civil pour un montant de 10 millions d'euros. Il s'agira en particulier de poursuivre la revalorisation des parcours indiciaires du personnel militaire.

Les mesures d'accompagnement social des restructurations, destinées à renforcer les incitations au départ s'élèveront à près de 17 millions d'euros, dont près de 9 millions d'euros supplémentaires au titre des pécules des personnels militaires.

La part relative des dépenses liées aux produits pétroliers continue d'augmenter : en 2010, elle atteindra 28 % des crédits alloués au fonctionnement des forces. Cependant, l'augmentation de la dotation correspondante est limitée en valeur absolue, puisqu'elle passe de 106 à 110 millions d'euros. Au cours actuel, cette dotation permet d'assurer normalement l'activité des forces.

Outre notre contribution à la dissuasion, les grandes lignes de notre activité en 2010 comportent le retour dans le cycle opérationnel du porte-avions Charles-de-Gaulle, dont deux déploiements sont programmés, la poursuite de la lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes, ainsi que deux campagnes du groupe école d'application des officiers de marine – la première avec la Jeanne d'Arc, la seconde avec le Tonnerre, dans un paysage opérationnel. En effet, il est prévu de passer quasi instantanément de la mission « école » à la mission « opérations » si nécessaire.

En matière de MCO, l'enveloppe des autorisations d'engagement – 1 632 millions d'euros – augmente de 20 %, ce qui est considérable. Cette évolution, durement négociée, s'inscrit dans le cadre d'une évolution du partage des risques entre l'État et les industriels. Le développement des engagements contractuels pluriannuels devrait nous permettre d'obtenir des réductions de prix et ainsi de réduire la facture dans les années à venir.

La dotation en crédits de paiement – 1 040 millions d'euros – est, en revanche, beaucoup plus contrainte. D'où la recherche de nouvelles économies, notamment grâce au retrait du service de petits bâtiments ou de bâtiments anciens et à une réduction de nos activités. Cela signifie que nous ne disposons pas de marges de manoeuvre pour aller au-delà de ce que prévoient nos contrats opérationnels : quand il faut aller ramasser les débris d'un avion, nous devons nécessairement réduire nos activités dans d'autres domaines. Ces contraintes sont naturellement partagées entre les flottes – navale et aéronavale.

Je vous avais fait part, l'an dernier, de mes craintes concernant l'envolée des prix du MCO pour l'aéronautique navale, du fait de l'arrivée en service de nouveaux aéronefs et de l'augmentation des coûts de rechange. C'est une question sur laquelle nous travaillons avec l'armée de l'air et la SIMMAD – la structure de maintenance du matériel de l'aéronautique de défense. La situation n'est finalement pas aussi grave qu'on pouvait l'imaginer, mais elle reste critique, car il n'est plus possible de régénérer la totalité de notre potentiel. Nous modulons donc notre volume d'heures de vol en fonction des contraintes du MCO.

La dotation pour 2010 ne permettra pas d'améliorer la situation et pourrait même conduire à une baisse de la disponibilité. La taille et l'ancienneté des parcs d'aéronefs rendent, en effet, l'aéronautique navale plus sensible aux aléas budgétaires que d'autres armées. Nous avons des micro-parcs d'avions vieux et nous serons contraints de gérer des reliquats tant que nous ne disposerons pas d'appareils plus récents.

On pourrait certes espérer que les conditions économiques actuelles conduisent à une stabilisation, voire à une baisse des prix, mais notre paysage industriel, marqué par une situation de concurrence insuffisante, ne s'y prêtera pas nécessairement. De concert avec les industriels, notamment DCNS, nous devrons veiller à diversifier les clients et les fournisseurs. Pour cela, nous disposons d'un avantage particulièrement intéressant pour les marines européennes : l'existence, très peu fréquente à l'étranger, de chantiers navals à l'intérieur d'enceintes protégées, à savoir nos bases navales. Cela pourrait inciter un certain nombre de clients étrangers à s'adresser à nous.

Le renouvellement de nos moyens se poursuit dans le cadre du programme 146. Il s'agit principalement de la commande d'un troisième BPC et de la mise en service du Terrible. Après quelques difficultés dans la mise au point des systèmes de combat, le programme de frégates de type Horizon avance également à un bon rythme. Ces bateaux, aux qualités exceptionnelles, vont bientôt rejoindre les forces vives de la marine. Nous attendons, par ailleurs, trois Rafale au standard F3 et la livraison des quatre premiers hélicoptères NH 90, dont l'absence nous fera malheureusement défaut pendant les nuits d'hiver qui viennent.

Le programme 212, « Soutien de la politique de défense », disposera de dotations budgétaires un peu mieux équilibrées que l'année dernière pour soutenir les opérations d'infrastructure. Cependant, les montants consacrés à la marine – 170 millions d'euros – ne correspondent qu'à 80 % de nos besoins annuels, sans compter l'effort de rattrapage du retard pris en 2009. La gestion sera donc tendue, et nous devrons veiller à utiliser au mieux les marges de manoeuvre dont nous disposerons.

La priorité sera donnée à la réfection des installations de l'Île Longue où les travaux devront se poursuivre à un rythme soutenu. Il est notamment prévu de poursuivre la refonte des installations électriques, dont l'achèvement est prévu en 2012, et celle de la station d'eau de mer de réfrigération, absolument nécessaire pour assurer la sécurité et le soutien de nos sous-marins nucléaires. Des travaux d'infrastructure sont également prévus dans les autres ports, notamment pour l'accueil des sous-marins de type Barracuda et des frégates FREMM, qui nécessitera l'adaptation des postes d'amarrage de Brest et de Toulon.

À côté des travaux portant sur les installations, lesquelles représentent l'essentiel des infrastructures de la marine, un effort d'amélioration des conditions de vie est également programmé. Je pense en particulier à la création d'une maison de l'enfance à Brest, dont le but est de permettre aux jeunes mères de famille de concilier plus facilement leurs contraintes familiales et professionnelles.

La gestion pourrait subir, en 2010, des aléas liés à nos opérations de réorganisation, à commencer par celle des structures : un commissariat des armées sera créé le 1er janvier prochain, ce qui aura pour effet de supprimer le commissariat de la marine, même si un service spécifique, nommé « service logistique de la marine », subsistera pour nos besoins propres. À cela s'ajoutera le déploiement du nouveau système d'information financière de l'État – CHORUS –, qui bouleversera complètement nos méthodes de travail. Nous devrons faire en sorte que l'impact des à-coups soit aussi limité que possible.

À l'heure où le Président de la République appelle à la reconstruction d'une politique et d'une ambition maritimes pour la France, mais aussi à l'heure où la menace devient plus diffuse, où la mondialisation ne fait qu'accroître l'incertitude stratégique et renforcer l'importance des espaces maritimes, la marine nationale continue d'intervenir et d'assurer une présence vigilante et active sur l'ensemble des mers du globe, au plus loin, comme au plus près. Ses capacités demeurent un formidable levier d'action et de puissance.

La rédaction du Livre bleu, qui doit définir la nouvelle stratégie maritime française, et la réunion d'un comité interministériel de la mer d'ici à la fin de l'année sont autant d'opportunités à saisir. Elles devraient avoir avec un impact considérable sur la politique maritime de notre pays dans les années à venir.

L'application de la nouvelle stratégie de sécurité nationale définie par le Livre blanc et l'adoption de la loi de programmation militaire confortent la marine dans ses missions. Pour nous, marins, il s'agit maintenant de participer avec détermination à cette transformation majeure de l'outil de défense à laquelle nous devons prendre toute notre part.

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