Leur mission est de représenter les parties devant les cours d'appel, dans les contentieux civils pour lesquels la représentation est obligatoire. Or la Cour de justice des communautés européennes a jugé, dans un arrêté déjà ancien du 21 juin 1974, que l'activité de représentation et de défense en justice ne relève pas de l'article 45.
De surcroît, la réglementation et l'organisation de la profession d'avoué sont incompatibles avec les dispositions de la directive « services » sur la liberté d'établissement des prestataires. C'est vrai en particulier du régime d'autorisation et notamment de la limitation du nombre des offices : la directive n'envisage la possibilité de limiter le nombre d'autorisations pour une activité donnée qu'en raison de la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables. Et le système des offices n'est pas compatible avec les articles 12 et 13 de la directive sur la sélection entre plusieurs candidats et les procédures d'autorisation.
Quant à la concertation, que vous jugez insuffisante (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC), elle a été engagée en juin dernier, dès l'annonce de la réforme avec les représentants des avoués et de leurs salariés, grâce à la mission confiée à Michel Mazard, avocat général auprès de la Cour de cassation, qui les a rencontrés pendant plusieurs mois dans toute la France. De cette écoute, nous nous sommes inspirés pour faire évoluer le projet initial. Depuis quelques mois, avec Mme la garde des sceaux, nous avons accéléré le rythme de la concertation, en commission et dans d'autres circonstances. Vous avez pu constater que cette concertation était fructueuse aux évolutions du projet initial. Les avancées qu'a fort bien évoquées le rapporteur peuvent être reconnues par la profession.
D'autre part, ce projet s'inscrit dans une volonté globale du Gouvernement, qui se traduit par le fait que la procédure d'appel sera réformée en parallèle. La dématérialisation des procédures devant les cours d'appel, dont vous vous êtes inquiété, progressera avec la postulation électronique pour rendre la justice non pas expéditive, mais plus rapide, conformément à l'attente des justiciables. Vous avez présenté cette démarche de manière un peu caricaturale, car la procédure sera mise en oeuvre de façon très progressive entre 2011, date de la fin de la période de transition, et 2013 : les cours d'appel auront le temps de s'organiser. Que je sache, pour la réforme de 1971, quand il n'était pas encore question de dématérialisation, les professions, les cours d'appel et les justiciables en ont eu la possibilité.
Par ailleurs, le Gouvernement a été attentif au devenir des avoués. Comme l'a rappelé la garde des sceaux, il a prévu une indemnisation au niveau qui convient et pris en compte d'autres demandes sur l'aménagement de la période transitoire, l'octroi d'une avance de 50 % avant même la fusion, ou le remboursement des emprunts en cours. Selon vous, des avoués devraient repartir de zéro. Mais, dans les ultimes propositions, l'indemnisation de la valeur de l'office est fixée à 100 %, soit bien plus que les 50 % accordés aux commissaires-priseurs lors de la réforme de 2000, ou que les 65 % accordés aux courtiers interprètes. Et si les avoués qui ne prendront pas leur retraite décident d'opérer une reconversion professionnelle, ils ne partiront pas de rien. Ils ont déjà une formation, une expérience qui a une valeur, une pratique de différentes missions, outre celles prévues par le monopole ; ils bénéficieront de l'avance de 50 %, et des possibilités leur sont offertes dans des professions voisines, pas seulement celle d'avocat.
S'agissant des salariés, vous ne connaissiez peut-être pas, lorsque vous avez rédigé votre intervention, le dispositif présenté par la garde des sceaux, qui est aussi le fruit du dialogue comme on l'a évoqué en commission, et qui s'est poursuivi depuis avec la volonté d'améliorer leur situation. Il constitue un progrès notable pour la prise en compte de l'ancienneté, non seulement dans l'étude mais dans la profession. Bien entendu, il y a également des passerelles pour les salariés, en fonction de leurs diplômes, vers les autres professions juridiques, et vers la fonction publique avec la création de 380 postes dans les greffes. Pour d'autres – et certains ont déjà commencé une reconversion professionnelle – un dispositif spécifique sera mis en place dans chaque cour d'appel pour offrir un accompagnement personnalisé dans la formation et la recherche d'emploi, voire d'un soutien financier de l'État à la création d'entreprise. Dans tous les cas, cette démarche sera adaptée aux situations personnelles.
Vous évoquez le coût pour les justiciables. Les montants que vous citez, y compris les plus élevés, sont inférieurs au coût moyen des services d'un avoué en appel. La situation du justiciable ne sera donc en rien plus défavorable, et parler d'une atteinte aux droits de la défense n'est guère raisonnable. D'ailleurs l'expérience montre que les réformes précédentes, dont celle évoquée par la garde des sceaux, n'ont pas été préjudiciables aux droits de la défense.
De toute façon, cette réforme était indispensable. La retarder encore n'aurait rien réglé. Nous avons pris le temps nécessaire, jusqu'au dernier moment, pour aboutir à la proposition la plus favorable. Le Gouvernement s'oppose donc à votre motion.