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Intervention de Gérard Bapt

Réunion du 17 septembre 2009 à 15h00
Loi pénitentiaire — Article 20

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt :

Mes chers collègues, madame la ministre, je souhaite consacrer cette brève intervention à la question des soins psychiatriques en prison.

La charge émotionnelle est à son comble dans l'opinion s'agissant des crimes attribués à des personnes souffrant de troubles psychiatriques. L'appel simpliste à l'enfermement définitif, y compris à titre de précaution, relève d'un réflexe populiste, hélas trop souvent exploité à des fins politiques ou sécuritaires. Or des études épidémiologiques menées aux États-Unis, et portant sur de nombreuses années et sur des cohortes importantes, ont montré que les auteurs de crimes de sang étaient moins nombreux parmi les malades schizophrènes que dans la moyenne de la population.

Reste que l'émotion suscitée par les victimes incite à un enfermement trop souvent systématique, certes fondé sur des expertises psychiatriques, mais qui sont elles-mêmes aléatoires et éminemment faillibles, dans un sens comme dans l'autre. La pression exercée par l'opinion encourage une attitude de précaution qui se nourrit – c'est un drame ! – des insuffisances de la prise en charge et du suivi du malade à la sortie, lesquelles résultent des lacunes majeures de l'organisation des soins en matière de santé mentale.

Paradoxalement, l'amélioration de la prise en charge psychiatrique des personnes détenues – grâce notamment à la loi de 1994, mes chers collègues – pousse à prolonger l'enfermement. Car, s'il reste beaucoup à faire en matière de soins psychiatriques en milieu carcéral, le problème de la continuité des soins se pose de manière particulièrement aiguë à la sortie, s'agissant d'un malade devenu ambulatoire. Ainsi, l'insuffisance de l'organisation des soins en matière de santé mentale légitime en quelque sorte le maintien de l'enfermement.

Selon le rapporteur, page 233 du rapport, « il convient de ne pas oublier qu'un établissement pénitentiaire n'est pas un hôpital ». Certes ; mais la loi de 1994 avait aussi pour ambition d'intégrer les personnes détenues au système général de santé. Elle suppose notamment de prendre pleinement en considération la question du suicide, sept fois plus fréquent chez les détenus que dans la population générale, où il est pourtant plus répandu en France que dans les autres pays européens. C'est là une priorité de la loi de santé publique de 2004. La loi implique également la promotion des actions de prévention et d'éducation à la santé, notamment en matière de lutte contre les addictions.

Il est du reste regrettable que, dans l'organisation de nos débats, le texte n'ait pas été soumis, au moins pour avis, à la commission des affaires sociales, compétente en matière de santé. Car il faut agir pour remédier à cette situation consternante : un détenu sur trois avait déjà consulté pour raisons psychiatriques avant d'être incarcéré.

La réorganisation de notre dispositif territorial en matière de santé mentale est également essentielle pour que les mesures de suivi permettent aux stratégies de prévention et de réhabilitation de prendre le pas sur les stratégies d'enfermement, qui constituent des échecs sociétaux majeurs. Ce sera l'une des préoccupations de notre groupe à l'occasion de l'examen de la loi sur la santé mentale annoncée par Mme la ministre de la santé.

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