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Intervention de Martine Martinel

Réunion du 28 septembre 2009 à 15h00
Vote électronique pour les élections au conseil des établissements publics à caractère culturel scientifique et professionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Martinel :

Madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, sans agressivité et sans suffisance, je dirai que cette proposition de loi a été rédigée à la hâte. Et le caractère précipité de la rédaction n'est pas sans incidence sur sa qualité législative.

Encourager la participation au vote dans les universités, inciter les étudiants à exercer leurs prérogatives citoyennes est un projet auquel nous pouvons toutes et tous souscrire. Cependant, « faire le pari », comme l'écrit le rapporteur, que l'utilisation des nouvelles technologies peut conduire à « un regain démocratique » ne manque pas de provoquer le scepticisme.

Le vote électronique aurait, nous dit-on, toutes les vertus. Apparemment, quoi de plus facile que de voter d'un ou de plusieurs clics de souris. Facilité aussi puisqu'il n'y a plus besoin de se déplacer, nous explique-t-on, ce qui serait « pénible pour les étudiants ». Peut-on, en tant qu'élus de la République, réduire la question de la participation électorale à celle de la facilité d'un clic de souris ? N'y a-t-il pas d'autres moyens de redynamiser cette participation ?

Rien n'étaye aujourd'hui la thèse d'un lien entre la participation électorale et le moyen utilisé pour voter. Rien ne prouve que l'utilisation de la technologie numérique soit un stimulant pour cette participation. Rien, enfin, ne permet de lier l'intérêt du processus électoral et l'exercice formel de celui-ci.

Comme M. Robinet, nous constatons que les EPSCP peuvent manquer « d'oxygène démocratique ». Il est effectivement nécessaire d'encourager la participation de la communauté universitaire. Cependant, nous ne pouvons être d'accord avec les représentations du vote telles qu'elles ressortent de ce rapport, malgré les modifications dont nous savons gré au rapporteur.

À lire le rapport, les motivations de l'électeur seraient bridées par des facteurs « géographiques », tel l'emplacement du bureau de vote, et des facteurs physiques – « l'obligation de se déplacer se traduit par un effort qui peut être, parfois, ressenti comme pénalisant par l'étudiant ». Il est paradoxal, alors qu'on ne cesse de faire l'éloge du « travailler plus », que le sens d'un si petit effort soit banni du monde universitaire.

De plus, le rapporteur pose comme un principe « la défiance générale des jeunes à l'égard des élections ». Comment de simples modalités électroniques pourraient-elles venir à bout de cette prétendue défiance ? Cette approche me semble aussi dévalorisante pour les publics concernés que pour les institutions visées.

Comment peut-on arguer de la facilité technique comme moyen d'activation d'un comportement citoyen ? La communauté universitaire serait-elle devenue un agrégat de consommateurs qui va choisir son candidat au supermarché des offres électorales internes en cliquant sur la toile ?

Alors que l'on n'a cessé de nous prévenir des dangers d'internet, voilà que, d'un coup, celui-ci aurait toutes les vertus citoyennes ! En outre, comment inciter les citoyens à participer physiquement au rituel du vote dans tous les autres scrutins si on les en dispense à l'université ?

Prétendre que la technologie, le moyen donc, est un stimulant de l'action – ici la participation à un scrutin – est un argument qui me semble fallacieux. Comme l'a montré le rapport consécutif à l'expérience de l'université de Nantes, la participation n'est pas liée à l'offre de moyens, d'autant que le moyen n'est à l'abri ni des problèmes techniques ni des jugements assez sceptiques des utilisateurs. Les étudiants nantais ont déploré l'absence d'informations claires sur les programmes et les candidats en lice et ont noté, contrairement à ce que vous dites, le gaspillage de papier.

Il est certes souhaitable de vouloir améliorer la participation aux élections des conseils scientifiques des universités. Mais cela commence peut-être par un exercice démocratique valorisé dans les assemblées et les institutions. Plutôt que d'éviter les efforts minimes d'un déplacement pour aller voter, il me semble essentiel, si on veut que les étudiants s'inscrivent vraiment dans la vie de la communauté universitaire, de leur éviter d'avoir à travailler à l'extérieur pour financer tout ou partie de leurs études.

Pour l'ensemble des raisons que je viens d'exposer, sans arrogance, sans conservatisme et sans régression, contrairement à ce qui nous a été reproché, je conclus que cette proposition de loi est à l'heure actuelle tout à fait hors de propos. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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