C'est ce que j'espère, même si elles ne sont pas à la hauteur de nos ambitions.
Alors même qu'elles s'efforcent de se coordonner, les différentes structures internationales présentes tentent de perfectionner leur coopération. Pieter Feith a créé un outil : le Forum, qui réunit en tant que de besoin les responsables de ces structures internationales plus les ambassadeurs des cinq pays du Quint (France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni et Etats-Unis). Les mandats étant très différents, les divergences sont inévitables. Le représentant de la communauté internationale est dans une position difficile due à sa double casquette – il représente l'Union européenne, dont cinq États membres n'ont pas reconnu l'indépendance, tout en étant le porte-parole de l'international steering group composé de pays l'ayant reconnue. Les pouvoirs du RSSG sont de moins en moins réels et le gouvernement du Kosovo conteste sa présence même, ce qui nuit à la coordination de la communauté internationale. Mais il ne faut pas surévaluer les problèmes : j'entretiens de bons rapports avec l'ensemble des autres représentants de la communauté internationale.
Le personnel local est recruté pour deux raisons. Premièrement, il est indispensable de s'adjoindre une aide locale, ne serait-ce que pour contourner l'obstacle de la langue – les traducteurs en serbe ou en albanais sont sélectionnés correctement, au terme de tests de sécurité. Deuxièmement, notre présence ne saurait être éternelle et nous devons avoir en tête une stratégie de sortie, en préparant les fonctionnaires locaux à assumer leurs responsabilités.
La situation était beaucoup plus difficile en 2002 – je commandais alors la brigade multinationale basée à Mitrovica – qu'elle ne l'est aujourd'hui. Au Kosovo, beaucoup de gens occupent deux ou trois emplois et l'économie souterraine est extrêmement développée. Cela ne relève pas d'EULEX, mais c'est un aspect complémentaire car les conditions de vie jouent forcément sur le crime organisé et la stabilité du pays. Il est important de donner de l'espoir aux jeunes du Kosovo.
Comparée à la justice, la police kosovare est une success story. Ses 8 000 officiers ont reçu une assez bonne formation de base, dans une école créée par l'OSCE et administrée par la communauté internationale. Par rapport aux pays voisins, le Kosovo n'a pas à rougir de sa police, mais il existe une marge de progression. Dans des domaines sensibles comme les investigations criminelles ou les crimes de guerre, la police locale n'est pas à même de remplir ses missions, pour des raisons de compétence mais aussi pour des raisons historiques, ce qui justifie la présence internationale. La police est sûrement en partie corrompue – un policier est payé 200 euros par mois et peut toucher 1 000 euros en détournant les yeux cinq minutes – mais de jeunes policiers ont envie de faire sortir leur pays de la situation où il se trouve.