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Intervention de Jean Glavany

Réunion du 23 juin 2009 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Glavany, Rapporteur :

Les taliban comprennent plusieurs cercles. Le « noyau dur » est constitué de la mouvance appartenant à Al-Qaïda et rassemble quelques centaines de personnes au maximum, installées à cheval sur la frontière entre l'Afghanistan et le Pakistan. On les dénomme aussi parfois « les Arabes », car ils viennent des pays arabes. Le deuxième cercle regroupe des groupes taliban de caractère tribal. Divers, ils poursuivent des objectifs tout aussi divers, mais peuvent se coaliser contre l'Occident. Le troisième cercle est celui des « unhappy brothers », c'est-à-dire des mercenaires prêts à prendre les armes contre quelques dollars, ou à cultiver le pavot parce que cette activité est plus lucrative que l'agriculture irriguée. Quant à savoir qui les finance, les trois sources citées par M. Ferrand y contribuent. On peut mutatis mutandis comparer cette situation à celle des FARC, les Forces armées révolutionnaires de Colombie, qui mêlent revendications politiques et activités de narcotrafic. Ce « troisième cercle » représente une mouvance de la population que les experts des services de renseignements, comme les diplomates et les militaires, nous incitent à regarder comme des insurgés bien plutôt que des taliban.

Nous n'avons pas entendu, au cours de nos déplacements et auditions, de revendication tendant à former un Pachtounistan. Nous avons en revanche posé la question au Président Karzaï, qui nous a répondu que cette aspiration existait mais qu'elle n'était pas envisageable spontanément… à moins que le Pakistan ne continue à se désagréger jusqu'à un point tel que cette éventualité devienne plausible.

Jacques Myard pose la bonne question : pour qui et contre qui se bat-on ? Ce qui était clair au début tend à se brouiller. Néanmoins, il est patent que la lutte contre les taliban au pouvoir à Kaboul et contre Al-Qaïda a été un double succès, même si les coups portés n'ont pas été suffisamment décisifs. Aujourd'hui, devant le risque d'enlisement, affrontés à des intérêts divergents, aux prises avec une frontière très poreuse, les Occidentaux se trouvent dans une situation de plus en plus difficile. Il est vrai que l'anti-occidentalisme existe, au Pakistan peut-être plus que partout ailleurs, en raison des frappes aériennes aveugles. Et pourtant, on sait que dans d'autres circonstances des frappes précisément guidées ont permis d'atteindre efficacement certains chefs terroristes.

Le discours de Barack Obama est important car nous devons des explications aux opinions publiques. Il faut proclamer que nous n'avons pas vocation à maintenir une présence qui serait celle de troupes d'occupation. Certes, plus vite ces troupes seront retirées et mieux cela vaudra. Il ne s'agit pas d'une croisade contre l'islam, dont je rappelle qu'il est la deuxième religion de France, République laïque qui protège son libre exercice. Il s'agit d'une lutte contre des forces terroristes dont l'Afghanistan et le Pakistan ne doit pas devenir un sanctuaire. Il serait parfaitement irresponsable pour quelque gouvernement que ce soit de se retirer du jour au lendemain ; pour autant, c'est bien à la perspective d'un retrait qu'il faut travailler.

Sur les élections, nous avons dit ce que nous en pensons. Ce ne sera pas un processus parfait ni une consultation parfaitement libre et loyale ; ce sera plus contraint, pour des raisons de sécurité évidente. Néanmoins, des éléments positifs sont à souligner, qui semblent montrer une attente de la part de la population : par exemple, dans le cadre de la nouvelle stratégie du général Petraeus, de recherche de la confiance des populations, de contact avec les chefs de village, les militaires français travaillent à la reconstruction, développent des relations avec les populations, les incitent à aller voter et les gens leur montrent leurs cartes d'électeurs avec enthousiasme. Encore une fois, ce ne sera pas un processus parfaitement rigoureux au sens des démocraties sophistiquées, mais il doit en tout cas y avoir un effort important de la communauté internationale et du pays lui-même pour surveiller les opérations car beaucoup de choses fondamentales pour la poursuite du processus de paix en découleront.

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