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Intervention de Jean Launay

Réunion du 7 novembre 2008 à 9h00
Commission élargie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Launay, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour la mission « Pouvoirs publics :

Depuis que la LOLF est appliquée, la mission « Pouvoirs publics » apporte un éclairage utile sur les crédits affectés à la Présidence de la République, à l'Assemblée nationale, au Sénat, à la Chaîne parlementaire, aux indemnités des représentants français au Parlement européen, au Conseil constitutionnel et à la Cour de justice de la République. Une huitième dotation est prévue pour la Haute Cour de justice, mais il est de tradition qu'elle ne soit pas abondée.

Comme l'année dernière, j'ai pu rencontrer les principaux acteurs de chacun des pouvoirs publics retracés dans cette mission, ce qui m'a permis d'obtenir de nouvelles avancées en matière de transparence, en particulier pour la dotation relative à la Présidence de la République.

Je ne reviendrai pas sur l'ensemble de mon projet de rapport, qui est à la disposition de chacun d'entre nous. Un encadré, figurant à la page 7, résume les principaux éléments chiffrés.

Je précise en outre que je vous interrogerai uniquement, monsieur le secrétaire d'État, sur les dotations dont le questionnaire budgétaire passe par votre intermédiaire : le Conseil constitutionnel, la Cour de justice de la République et la Présidence de la République.

S'agissant de cette dernière dotation, qui suscite traditionnellement beaucoup d'intérêt, je tiens à souligner que j'ai obtenu cette année l'intégralité des éléments d'information que j'avais demandés, ce qui m'a permis d'aller bien au-delà du rapport explicatif annexé au projet de loi de finances.

C'est d'ailleurs le rôle du rapporteur spécial que de déceler ce qui se cache derrière les chiffres présentés, et de prendre le temps de la réflexion pour apporter à l'Assemblée une information aussi complète que possible.

Comme vous pouvez le constater, un chapitre exceptionnellement dense est consacré au budget de l'Élysée, lequel fait désormais preuve d'une plus grande transparence, puisqu'il retrace l'ensemble des dépenses, y compris le nombre et la provenance des personnels, mais aussi la superficie et le coût d'entretien de son patrimoine immobilier. Y figurent notamment tous les détails concernant les 1 031 personnes actuellement en poste à l'Élysée, où je n'ai décelé aucun « passager clandestin ».

Je voudrais également préciser que pour apprécier sincèrement l'évolution des dépenses de la Présidence, il est nécessaire de corriger des erreurs techniques qui avaient conduit à une sous-estimation des transferts de crédits lors de la consolidation intervenue l'an dernier, conformément aux voeux que j'avais formulés.

Il manquait ainsi 4,2 millions d'euros en provenance du ministère de la défense pour financer les pensions des gendarmes et des militaires affectés à l'Élysée. En provenance du même ministère, faisaient également défaut 5 millions d'euros en raison de la sous-estimation du transfert du coût des avions de la Présidence, et 120 000 euros au titre de la prise en charge des véhicules affectés à l'État-major particulier du Chef de l'État, désormais assurée par l'Élysée.

À cela près, les crédits demandés correspondent à la dotation de 2008 majorée de 2 %, soit le taux d'inflation pour 2009.

Grâce à ce mouvement de crédits, la réforme du budget de la Présidence devrait désormais être achevée. J'ajoute que des tableaux de bord ont été mis en place afin d'améliorer l'efficacité des services.

J'en viens aux dotations de l'Assemblée nationale et du Sénat, lesquelles sont demandées par les Assemblées parlementaires à l'État et arrêtées par une commission commune composée des questeurs des deux Chambres, conformément à l'ordonnance de 1958.

Ces dotations semblent déjà caduques avant même d'être adoptées. Dans une surenchère qui s'apparente à la course à l'échalote, l'Assemblée et le Sénat ont en effet indiqué qu'elles souhaitaient que leur dotation soit ramenée au montant de 2008, ce qui signifierait une stabilisation en volume et une réduction en valeur, égale au montant prévisionnel de l'inflation, soit 2 %.

Pour l'Assemblée nationale, un amendement déposé par M. le Président et par Mme et MM. les questeurs a ainsi été déposé en ce sens. Les dépenses prévisionnelles de l'Assemblée pour 2009 n'étant pas modifiées, la différence serait alors prélevée sur les ressources propres de notre assemblée.

L'absence de réduction des dépenses prévisionnelles démontre qu'il s'agit avant tout d'un affichage politique, qui rend au demeurant caduque une partie des informations figurant dans le rapport annexé au projet de loi de finances. À l'avenir, il me semblerait bon d'engager au préalable une réflexion sur l'élaboration des demandes de crédits.

Pour ce qui est de certaines publications de presse et de l'amicale pression qui s'exerce sur nous dans le sens d'une réduction de notre demande de dotation, je ne crois pas que nous devrions donner le sentiment que nous validons les critiques issues de l'audit réalisé par la Cour des comptes, et alimenter nous-mêmes l'antiparlementarisme qui n'a que trop tendance à resurgir.

Oui, le coût de la vie augmente. Oui, les députés ont besoin des moyens nécessaires à l'exercice de leur mission. Il ne s'agit pas d'un luxe, mais du prix de la démocratie. Le budget de notre assemblée me paraît tout à fait maîtrisé, mais je reviendrai plus tard sur cette question.

Les investissements prévus devraient fortement se réduire en 2009. Sur ce point, je rappelle que l'Assemblée a toujours eu pour principe de financer ses gros travaux sans faire appel à la dotation de l'État, en recourant à un prélèvement sur ses propres disponibilités financières. J'ai déjà eu l'occasion de souligner cet effort d'autofinancement dans le rapport que j'ai réalisé l'année dernière.

La part des investissements financés par prélèvement sur les disponibilités s'élèverait en exécution à 75 % en 2005, à 94 % en 2006 et à 70 % en 2007. Si l'amendement que je viens d'évoquer était adopté, le prélèvement sur les disponibilités s'élèverait à près de 24 millions d'euros, contre une prévision initiale de 3,6. Ce serait en rupture avec l'option retenue jusqu'alors, qui consiste à faire appel à ces prélèvements uniquement et systématiquement pour financer les gros investissements.

Enfin, il faut aussi donner aux parlementaires les moyens de leur action, en particulier au vu des nouvelles missions de contrôle qui leur sont conférées. La révision constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République intervenue le 21 juillet 2008 engendrera inévitablement des coûts de réorganisation et de fonctionnement supplémentaires pour l'Assemblée nationale, avec notamment le passage de six à huit commissions permanentes. Le projet de demande budgétaire n'en faisait d'ailleurs pas mention, alors que le Sénat a indiqué avoir provisionné 3,5 millions d'euros pour faire face aux conséquences de cette réforme institutionnelle.

Le fait que l'amendement ne réduise pas les dépenses prévisionnelles pour 2009 me conduit d'ailleurs à penser que, peut-être, elles étaient nécessaires, voire justifiées.

Je ne suis donc pas favorable à l'adoption de cet amendement.

Une autre particularité importante que je tiens à relever concerne la seule dotation de l'Assemblée nationale. J'avais en effet demandé, dès la mi-octobre, à prendre connaissance du fameux audit de la Cour des comptes portant sur l'organisation et la gestion des services administratifs de l'Assemblée nationale. La sortie dans la presse d'éléments de cet audit m'a amené à réitérer ma demande de façon formelle, et j'ai pu accéder au document. Le chapitre II de mon rapport, consacré à la dotation de l'Assemblée nationale, intégrait déjà un certain nombre d'éléments d'analyse et de clarification, qui divergent, semble-t-il, de l'analyse de la Cour des comptes. Ainsi ai-je découvert avec stupéfaction que le budget de fonctionnement de notre Assemblée, qui comprend les frais de personnel et les charges parlementaires, connaîtrait une croissance vertigineuse, notamment en 2007. D'après les éléments d'information dont je disposais, à savoir le rapport de la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes de l'Assemblée nationale, les dépenses de fonctionnement n'ont augmenté que de 0,30 % en 2007, malgré le renouvellement. Les prévisions à ce jour sont, pour 2008 une diminution de 0,88 % et, pour 2009, une hausse de 1,02 %, seulement, ce qui me paraît au contraire traduire une certaine maîtrise.

Par ailleurs, je suis sceptique quant à l'éventualité d'un recours à une entité tierce, à savoir la Cour des comptes, pour mettre en oeuvre les préconisations de l'audit réalisé. Je ne saurais, mes chers collègues, que vous inviter à la plus grande prudence en la matière.

Je rappellerai une fois encore la spécificité de la mission « Pouvoirs publics », dont les dépenses ne peuvent pas faire l'objet d'évaluation de performance. Il s'agit, comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans une décision du 25 juillet 2001, d'« assurer la sauvegarde du principe d'autonomie financière des pouvoirs publics concernés, lequel relève du respect de la séparation des pouvoirs ». C'est bien dans cet esprit que j'ai veillé, avec l'oeil de l'ancien comptable public que je suis, à exercer la mission de contrôle qui m'incombait. C'est pourquoi, mes chers collègues, je ne vois aucune raison de ne pas adopter, en l'état, les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

J'en viens, monsieur le ministre, à mes questions.

Je commencerai par la plus petite des dotations de la mission : celle de la Cour de justice de la République, qui paye, pour ses locaux du 21 rue de Constantine, un loyer substantiel qui représente, en 2009, 56 % du total de la dotation. Compte tenu de la tendance à la baisse actuelle du prix de l'immobilier, l'encourageriez-vous à se porter acquéreur du bâtiment ou, au contraire, à maintenir le statu quo ?

Ma deuxième question porte sur la dotation exceptionnelle que sollicite le Conseil constitutionnel pour 2009 et qui est essentiellement destinée à financer de gros travaux de rénovation, dont celle de locaux restitués par le ministère de la culture à compter de la rentrée 2008. Pensez-vous que cette restitution est opportune ou qu'il eût été préférable que ces dépenses relevassent du ministère de la culture, comme cela est le cas pour les bâtiments appartenant à la dotation de la Présidence de la République ?

Pour ce qui concerne, en troisième lieu, la dotation de la Présidence de la République, j'ai déjà souligné que la consolidation intervenue l'an dernier allait dans le bon sens. Existe-t-il, selon vous, des dépenses non réintégrées dans le périmètre de la dotation et qui devraient l'être ?

Mes deux dernières questions sont plus générales.

La quatrième porte sur le contrôle parlementaire qui doit s'exercer sur les comptes des pouvoirs publics. Je suis convaincu de sa légitimité et de sa primauté. Il se distingue ainsi de la certification des comptes des pouvoirs publics, laquelle peut être exercée soit par la Cour des comptes, soit par une entité tierce comme cela est le cas pour les assemblées parlementaires. Pouvez-vous me préciser comment doit s'articuler, selon vous, le contrôle effectué par la Cour des comptes avec celui auquel procède le Parlement ?

Considérez-vous, enfin, que l'alignement des demandes de dotation des pouvoirs publics sur le rythme prévisionnel d'évolution de l'inflation, soit 2 % en 2009, soit un objectif pertinent ?

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