S'agissant des évaluations, le CPME publie chaque année un rapport sur l'ensemble des recherches et des commémorations. J'indique que le Comité, en dépit de faibles moyens, fait un travail d'une grande qualité, notamment en collaboration avec le CNRS, pour faire connaître l'existant.
Cela dit, ces questions ne me semblent pas relever uniquement, au sein du Gouvernement, du secrétariat d'État à l'outre-mer, mais d'un co-pilotage avec le ministère de la culture. Sans vouloir en déposséder mon secrétariat d'État, je pense que les questions relatives à l'esclavage doivent également concerner l'Éducation nationale et la Culture. Le fait de les limiter à l'outre-mer me gêne un peu, car le travail de mémoire est un dessein national et nous devons éduquer les populations dans cette voie : tel est le sens de la date du 10 mai. A nous d'en faire un événement. Si j'ai organisé cette année des expositions au sein du secrétariat d'État, c'est pour amener le grand public de métropole à réfléchir à une question qui fait sens, grief et débat aux Antilles. Le secrétariat d'État à l'outre-mer ne saurait piloter seul cette opération, sous peine de l'enfermer dans une logique territoriale, ce qui aurait des effets négatifs.
Quant à la concurrence des mémoires, elle ne me semble pas créer de problème ou de blocage, pour autant du moins que je peux en juger au bout de quelques mois. Je crois qu'il y a, au contraire, une volonté claire et partagée d'étendre la réflexion au-delà des territoires concernés par l'esclavage. Et je serais heureux que les perspectives européennes se développent, car cette question ne concerne pas uniquement notre pays mais l'ensemble du monde. On veut travailler avec le CPME afin de créer un centre virtuel, c'est-à-dire de mettre en place un site Internet pour conserver les connaissances et mettre en réseau les chercheurs. Le secrétariat d'État approuve cette démarche et entend l'accompagner, car les lieux géographiques de mémoire de l'esclavage sont nombreux et très différents les uns des autres : il ne faudrait pas privilégier l'un d'entre eux. Un outil dématérialisé, outre qu'il a un plus grand retentissement, permet d'éviter le piège d'une implantation géographique qui serait forcément limitative.
Le Comité, qui approche de la fin de son premier mandat de cinq ans, publiera dès le début 2009 un bilan complet de son action, donc des effets de la loi de 2001.
Certains des Martiniquais qui assistaient à Fort-de-France aux récentes cérémonies de commémoration nous ont confié qu'ils les jugeaient auparavant trop politisées. Aujourd'hui, tous les Martiniquais s'y associent, quelle que soit leur origine et leur couleur de peau. Encore un progrès intéressant, même si certains disent aussi que « ce n'est plus notre commémoration ».
Pour conclure, je ne suis pas partisan de l'inflation législative sur les questions mémorielles, mais je ne nie pas que la loi a permis d'apaiser les tensions et de faire évoluer les positions des uns et des autres.