revenant sur le débat engagé durant l'été sur la gouvernance du groupe, a fait état, prenant à témoin M. Jean-Pierre Balligand, ancien président de la commission de surveillance, qu'il s'agit d'un « marronnier » revenant à chaque changement de directeur général et à chaque renouvellement de la commission de surveillance. Cependant, certains facteurs externes peuvent aussi expliquer le débat de cette année.
Il faut d'abord relever que la gouvernance actuelle n'a pas été défaillante. Dans la durée, elle s'est révélée performante, bien qu'elle procède d'une alchimie complexe : l'institution, à la différence de tous les autres établissements publics, est placée sous le contrôle du Parlement, mais son directeur général est nommé par l'exécutif pour une durée de cinq ans et détient le pouvoir de décision, la commission de surveillance n'émettant que des avis. Le cas ne s'est jamais produit d'un directeur général allant contre les avis de la commission, si bien que ce mode de fonctionnement s'est avéré efficace et a évité à la Caisse les errements qu'ont pu connaître d'autres structures publiques.
Faut-il modifier une gouvernance qui a fait ses preuves ? On a parlé de réflexions au niveau du Gouvernement. Après consultation de Mme Lagarde et du cabinet du Premier ministre, il apparaît que la question soulevée concernerait quelques ajustements, ce qui ne paraît pas anormal après un certain nombre d'années. De tels ajustements ne sauraient néanmoins être discutés que sous deux conditions.
Premièrement, le débat ne doit pas porter sur le périmètre des activités de la Caisse des dépôts. Celui-ci est pertinent en ce qu'il permet à la Caisse – notamment par la stabilisation du résultat et par le mixage des compétences – de remplir les missions qui lui sont confiées par la puissance publique.
Deuxièmement, d'éventuels ajustements ne doivent pas conduire à un débat sur la banalisation de la Caisse des dépôts. Ce point de vue est en contradiction avec celui de M. Philippe Auberger, qui avait évoqué à la fin de son mandat le passage à un système de conseil de surveillance et de directoire, tel qu'on peut en trouver dans certaines sociétés. La Caisse agit certes dans le secteur financier concurrentiel, mais elle est un établissement public et l'originalité de sa gouvernance doit être préservée.
Parmi les évolutions possibles, il ne paraît pas absurde que la commission de surveillance, dont la composition est fixée par la loi, puisse s'adjoindre un économiste ou une personne ayant l'expérience de la gestion de grandes entreprises. Une modification législative pourrait aussi officialiser le rôle des comités techniques, voire accroître leur nombre en instituant par exemple un comité qui s'intéresserait aux principales nominations et aux carrières, sans faire double emploi, cependant, avec la direction des ressources humaines récemment mise en place. On peut aussi se demander si les avis de la commission de surveillance doivent demeurer consultatifs, ou si certains d'entre eux ne devraient pas devenir des avis conformes.
La semaine prochaine, la commission de surveillance réfléchira à ce qui pourrait être proposé, notamment dans le cadre du projet de loi relatif à la modernisation de l'économie qui viendra en discussion au Parlement. Toutefois, la Caisse étant placée sous la responsabilité du Parlement, il n'est pas envisageable que les propositions émanent de l'exécutif : si propositions il doit y avoir, la logique veut qu'elles soient introduites par voie d'amendement, à l'initiative de la représentation nationale.
S'agissant enfin de la demande, formulée par Mme Christine Boutin, d'une contribution de la Caisse, à hauteur de 100 millions d'euros, sous forme de subvention au bénéfice de l'ANRU, il convient d'insister sur le fait que la CDC exerce des missions d'intérêt général. Au-delà du prélèvement effectué par l'État, c'est dans ce cadre qu'elle s'engage à mettre en place des crédits. Il serait de ce point de vue utile que l'on redéfinisse avec l'État, de manière contractuelle et pluriannuelle, quelles sont les actions que l'exécutif et le législatif souhaitent voir engagées par la Caisse au nom de l'intérêt général.
Depuis plusieurs décennies en effet, l'État est soumis à la tentation croissante de demander des contributions à la CDC en fonction des contraintes que la conjoncture fait peser sur le budget. Il devient alors difficile de distinguer les priorités. Ainsi, est-il logique que la Caisse bonifie les prêts consentis aux organismes HLM à partir des ressources de l'épargne réglementée ? Est-ce une priorité pour l'État ? Il est à l'évidence nécessaire d'opérer une hiérarchisation des actions en toute transparence, car la Caisse ne saurait être un instrument permettant d'ouvrir un « budget bis » pour certains ministères, ou, en d'autres termes, un instrument de débudgétisation. La mise en oeuvre de la LOLF est le fruit d'un combat pour obtenir plus de transparence de la part des opérateurs publics. Or, s'agissant de l'ANRU, on demande à la Caisse un financement budgétaire. On a donc considéré que cette ponction faisait partie du prélèvement annuel, à charge pour l'État de résoudre les problèmes que cela soulève.
Au total, le débat que l'on peut mener sur l'évolution de la gouvernance doit s'accompagner d'un autre débat consacré au périmètre des missions d'intérêt général et aux priorités à dégager dans l'emploi de la contribution de la Caisse.
Le Président Didier Migaud, a demandé si les 2,250 milliards étaient ou non inclus dans la règle des trois tiers.
Le Rapporteur général a indiqué qu'il était d'accord avec M. Michel Bouvard sur les questions de gouvernance, notamment sur celle du périmètre, à ce jour équilibré entre, d'une part, les missions d'intérêt général et les activités concurrentielles et, d'autre part, entre les différentes activités de la CDC. Il importe donc de ne pas le modifier.
Les règles qui régissent les relations financières entre l'État et la CDC doivent en outre reposer sur des principes clairs qu'il convient de respecter dans la durée : l'intéressement aux résultats, la contribution représentative de l'impôt sur les sociétés, la rémunération de la garantie des fonds d'épargne. Il faut néanmoins aller plus loin, d'autant que la contribution exceptionnelle à l'ANRU – qui s'élève à 100 millions – ne serait pas affectée au titre du tiers du résultat servant aux missions d'intérêt général. Il faudra faire preuve de vigilance tant la tentation sera grande, pour certains ministères, d'aller chercher des financements complémentaires auprès de la CDC.
S'agissant de la décomposition de la participation attendue en recettes non fiscales pour 2008, il faut espérer que le chiffre de 2,250 milliards est définitivement arrêté. Ce montant doit d'ailleurs être comparé aux 2,800 milliards inscrits en recettes non fiscales en 2007 – y figuraient la plus-value de cession de la participation à la Caisse nationale des caisses d'épargne (CNCE) – 750 millions – ainsi que le solde du fonds de réserve de financement du logement : 300 millions. Vis-à-vis de ce 1,750 milliard, la participation demandée au titre du résultat est donc sensiblement majorée par rapport à l'année dernière.
La prévision de résultats de 2007 sera-t-elle par ailleurs affectée par la crise financière ? Quelle est l'hypothèse de résultat de la CDC en 2007 ? Quelle fiabilité lui accorder ?
Si les très bons résultats de l'ensemble des filiales doivent être salués, le Rapporteur général a souhaité néanmoins qu'une plus grande clarté soit faite quant aux montants engagés entre la CDC Capital-Investissement et ce qui relève de la mission d'intérêt général – CDC Entreprises – avec le déblocage de moyens pour les PME, notamment pour l'amorçage et le capital risque.
Le Président Didier Migaud a demandé quels étaient les éléments de comparaison possibles quant au chiffre de 2,250 milliards et quel est le pourcentage de majoration en cycle normal.
Si M. Jean-Pierre Balligand a partagé l'analyse qui vient d'être faite, il a également considéré qu'il fallait tenir compte d'un événement important : la banalisation de la distribution du livret A – diligentée par des banquiers français – qui conduira la CDC, à terme, à avoir grandement besoin de liquidités et ce, quelle que soit la présentation « soft », très « Quai d'Orsay », de M. le directeur général. Les missions d'intérêt général devront donc être hiérarchisées et définies contractuellement avec l'État, surtout en ce qui concerne le logement et la politique de la ville - la banalisation incitant les banquiers à proposer des produits financiers de substitution ; celle-ci entraînera en outre un « siphonage » des fonds d'épargne qui modifiera les résultats sur les prélèvements. Il importe, de plus, que les relations entre la section générale de la CDC et les filiales soient bien équilibrées.
Les commissaires des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat ne doivent pas accepter que Bercy s'occupe de la modification de la gouvernance, comme la tentation en est grande depuis toujours, alors que cette modification aurait un sens particulier si, par exemple, des personnalités qualifiées entraient dans la CDC. Celle-ci est un établissement public sui generis, sous la protection du Parlement.
Enfin, il n'est pas souhaitable que cet établissement public, à terme, ne comprenne, d'une part, que les fonds d'épargne – ou ce qu'il en resterait – et la gestion pour compte de tiers que constitueraient, par exemple, les retraites et, d'autre part, les actifs, qui seraient gérés par un conseil d'administration où ne figureraient pas de parlementaires.
Compte tenu de l'absence de véritable capitalisme en France et que la CDC est actionnaire des sociétés du CAC 40, M. Charles de Courson s'est quant à lui interrogé sur la position de la CDC à l'égard de ces participations.
Dans le domaine du capital risque, la CDC intervient essentiellement dans les entreprises en plein développement et fort peu dans les start-up. Cette très grande prudence n'est-elle pas comparable à celle dont font preuve les grandes banques ?
Pourquoi, et sous l'influence de qui, la CDC a-t-elle acheté des actions d'EADS ayant entraîné une moins-value de 126 millions ?
Sachant, de surcroît, qu'il ne sera pas possible de gagner la bataille du contentieux européen, n'est-il pas préférable de réfléchir aux moyens d'éviter la décentralisation de la collecte en cas de banalisation de la distribution du livret A ?
Enfin, quelle est la stratégie de la CDC quant à Icade ? Faut-il ou non la privatiser ? À quoi sert-elle dans la CDC ?